La douce brise nocturne soufflait contre mon pelage doré et je me laissais aller à de sombres pensées. Ces atroces souvenirs continuaient de hanter mes nuits et j'en avais perdu le sommeil. Comment dormir lorsque nos rêves étaient remplis de peine et de sang ? J'avais beau demeurer aux côtés de Samekh et de sa famille, ces jours obscurs me poursuivaient. Pourtant si loin de lui, Mopanga continuait d'exercer une pression permanente sur mon esprit. Dans mes cauchemars à redondance, le lion noir retrouvait ma trace et m'emmener loin de tous ceux que j'aimais, sur une terre aride et dénuée de tout espoir pour y élever notre enfant dans la violence et le chaos. Notre enfant... cette vérité semblait si dure à accepter.

Semblable au vent qui soufflait, Samekh se mouva à mes côtés et sans un bruit, il se coucha contre mon flanc. Longuement, le silence nous entoura mais cela n'avait rien de gênant. L'avoir à mes côtés me suffisait. Son odeur réconfortait mes peurs et je fermais doucement mes paupières, laissant mes cauchemars se faire chasser par cette présence bienveillante. J'avais retrouvé toutes ces personnes chères à mon cœur et je savais que c'était à leur côté que je parviendrais à me reconstruire. Ils étaient tout ce dont j'avais besoin actuellement.

Sans faire office de reproche, Samekh m'affirma simplement que je n'avais pas de compte à rendre aux Pridelanders. Certes mais face à la détresse du prince, je n'avais pu rester indifférente. Je ne savais que trop ce que pouvait représenter la perte de son royaume et de son héritage mais Samekh ne pouvait comprendre ces raisons. Je me souvenais encore de ce jour où j'étais revenue. Nous n'avions que peu échangé à nos retrouvailles, nos regard exprimant ce que les mots ne pouvaient dire. Quand bien même cette situation m'avait contenté, Samekh, lui, avait aujourd'hui besoin de réponses ou plus précisément une seule et unique réponse. Qui ? Mon regard prit une mine plus sombre tandis que ma mâchoire se crispait.

« Et que feras-tu si je te le disais, Samekh ? » murmurais-je, le regard porté au loin. « Il n'y a rien qui puisse être réparé. Cette germe est d'ores et déjà implanté dans mon ventre. Un cadeau empoisonné qu'il m'a laissé afin de nous lier à jamais. »

Enfin le non-dit était levé. Lui comme moi savions ce qui se tramait au cœur de mes entrailles mais aucun n'avait eu l'audace d'évoquer ce fait car en parler, c'était accepter son existence. Alors nous avions tous deux fait le choix de l'ignorer seulement, nous ne pouvions plus évincer l'évidence.

« Il n'y a rien que tu puisses faire pour remédier à cela. »

La haine n'avait jamais entraîné l'oublie bien au contraire, elle alimentait cet flamme vile et cruelle qu'était un souvenir douloureux. Se sentait-il fautif ? Il ne l'était pourtant pas. Comment aurait-il pu savoir après tout, j'avais tout fait pour le lui cacher. Le regard lointain, j'écoutais les paroles de Samekh qui me proposait de partir. Détachant mes pupilles dorés de l'horizon, j'observais brièvement le mâle. Trouvait-il par ce moyen une solution à nos problèmes ? Combien de temps devrions-nous marcher avant de trouver une terre accueillante qui voudrait bien de nous... Nous étions des exilés, ce titre était lourd à porter.

« Très bien, partons. C'est ce que je tu veux m'entendre dire ? Mais partir pour aller où, Samekh ? Nous n'avons plus chez nous. » répondis-je, la voix basse. « J'en ai assez de passer ma vie à errer. Ce n'est pas ce que je veux pour lui. »

Nul besoin de nommer l'enfant, Samekh comprendrait bien de qui je parlais. Le jour où les Nyeusis tomberont, nous retournons sur Prideland et quand ce jour viendra, ma propre colère s’atténuera. Je voulais les voir payer de leurs crimes. Oui, j'attendrais ce jour toute ma vie s'il le fallait mais je voulais le voir arriver. Je le désirais plus que tout. J'ignorais combien de temps cette situation allait durer mais pour le moment, demeurer sur ces terres reculées aux côtés de Samekh et de sa famille me convenait. Fuir serait choisir la facilité et ce n'était pas ce que je voulais. Qui plus est comment partir alors que des personnes chères à mon cœur demeurait ? Non, ce n'était définitivement pas une option.

« On ne peut pas fuir notre passé. Toi et moi le savons plus que quiconque. »

Je me souvenais encore des pas d'Uhucha, s'éloignant promptement dans la nuit en direction du Rocher. J'ignorais ce qu'il était advenu de lui après cela... et je ne souhaitais certainement pas la même chose pour Samekh aussi me tairais-je dans mon silence de mort. Le désir de vengeance n'engendrait jamais rien de bon.

Le temps guérirait les blessures et c'était aux cotés de ceux que j'aimais que je pensais pouvoir surmonter cette épreuve. La brise nocturne soufflait sur nos deux pelages et nos crins se mêlaient comme dans une promesse éternelle.

« Si tu restes à mes côtés, ça sera suffisant pour moi. »

Mon murmure était aussi doux que ce regard que je lui portais. Je voulais sortir de cette nuit sanglante qui semblait impérissable et retrouver la chaleur des rayons du soleil. Plus de sang, seulement de l'amour.

Alors même qu'il n'était encore que dans mon ventre, mon enfant s'attirait déjà la colère : celle de Samekh. Il ne l'aimait pas. Bien que ses mots ne reflétaient qu'une dure réalité, ils me blessaient. Aussi longtemps que le temps me le permettrait, je tâcherai de tenir mon enfant éloigné de ce funeste avenir quitte à lui cacher l'identité de son père. Je voulais qu'il ait une enfance heureuse, loin des problèmes d'adultes. Son héritage aussi sombre était-il ne devait pas gâcher ça. J'y veillerai personnellement.

« Je ne les laisserai pas faire, sa mère le protégera. » répondis-je d'un ton sûr et quand à sa seconde hypothèse sur l'avenir du lionceau, je n'avais pas besoin d'y songer davantage : « Moi je l'aimerai. »

Être la progéniture du diable n'était pas un mince titre à porter et j'avais conscience des difficultés que rencontrerait ce lionceau mais je serais là pour lui, toujours. C'était mon devoir de mère et tout cet amour qu'on lui refuserait, je le compenserais. Je veillerais à ce qu'il ne manque de rien, c'était là ma première promesse envers cet enfant à naître.

Un nouveau silence s'installa. Je n'avais plus le cœur à rire et cette nuit semblait particulièrement froide. Chacun avait la tête remplie de pensées multiples et nous songions à l'avenir. Si seulement j'avais le don de lire les étoiles comme Killik... Rompant finalement le silence, Samekh s'interrogeait sur mon attachement pour les terres du prince doré. La raison était ridiculement simple mais je ne l'avais jamais partagé avec Samekh. Non pas par honte mais parce qu'elle était symbole de souvenirs précieux et intimes. Un soupir s'échappa d'entre mes crocs, laissant paraître un nuage de chaleur.

« Te souviens-tu de la raison de mon exil ? La nuit où Sheru a été tué, nous avions prévu de fuir. Il m'avait parlé d'une terre lointaine regorgeant de ressource et où il faisait bon d'y vivre. Cette terre c'était Prideland. » Le regard nostalgique, je m'égara quelques instants dans mes souvenirs avant de reprendre : « C'était son rêve de vivre ensemble là-bas alors quand je foule ces terres, c'est comme si Sheru était avec moi. Peux-tu comprendre ça ? »

D'abord source de haine puisqu'elles me rappelaient mon amour perdu, mon regard sur ces terres avait changé. C'était devenu pour moi une façon d'honorer sa mémoire et d'entretenir son rêve bien qu'il n'était pas là pour le vivre avec moi. Peut-être était-ce une pensée sotte mais je me sentais accompagnée par sa présence.

Le silence berçait notre contemplation de la nuit. Samekh n'avait jamais été un grand bavard mais en cette nuit, il était plus silencieux que d'ordinaire et je n'avais pas d'énergie à dépenser pour des paroles inutiles. Il fallait aussi savoir apprécier le silence qui était des plus reposant et bien que j'ignorais encore l'annonce qu'allait me faire Samekh, sans doute aurais-je préférée rester dans ce silence.

Bien qu'anodine comme question, le ton employé par Samekh ne m'inspirait guère. C'était solennel, bien trop à mon goût.

« Je l'ai connu quand elle n'était encore qu'un lionceau. Ce temps ne me semble pas si éloigné. » je marqua une courte pause, une étrange lueur animant mon regard. « L'as-tu également rencontré ? »

Étrangement, j'appréhendais sa réponse comme si un non-dit demeurait depuis trop longtemps déjà et que l'abses allait se percer, pour le meilleur comme le pire. Mais sans doute serait-ce pour le pire.

Une angoisse que je ne comprenais pas montait peu à peu dans mon ventre. Cela ne provenait pas du bébé mais de moi-même, une crainte prenait possession de mon être sans même que je puisse en expliquer la provenance. Tahani serait toujours une enfant à mes yeux, une petite sœur que je chérissais. Je ne comprenais pas pourquoi Samekh s'entêtait à affirmer qu'elle n'en était plus une d'ailleurs, je me demandais même quand l'avait-il rencontré, il ne m'en avait jamais parlé... Nous avions tous nos petits secrets mais avant même de découvrir celui de Samekh, je pouvais d'ores et déjà savoir que cela ne plairait pas. Je pouvais lire dans le regard du vieux lion une certaine hésitation, chose que je n'avais encore jamais vu. Quelque chose se tramait... et je n'étais pas prête pour cela.

Puis la foudre tomba et je déglutis péniblement, frappée par la nouvelle. Le visage d'abord inexpressif, une forme de révolta l’épris soudainement tandis que mes pupilles se rétractaient pour ne former qu'un minuscule point doré. Comme touchée par le feu brûlant, je m'écarta du contact du mâle dans un sursaut puis l'observa d'un étrange regard.

« Samekh ! Elle a l'âge d'être ta fille bon sang... Tu... tu ne peux pas ! » murmurais-je, ébahie.

Il ne pouvait pas, c'était insensé... Quel avenir aurait cette union ? Aucun, absolument aucun mais Samekh en avait-il seulement conscience ? J'étais complètement sous le choc, abasourdie par cette nouvelle que je qualifiais de désastreuse. Depuis combien de temps cette relation durait-elle ? Combien de temps me l'avait-il caché ? J'étais blessée, profondément blessée mais plutôt que laisser ma peine s'exprimait, ce fut la colère qui parla :

« Qu'est-ce tu crois qu'il va se passer lorsque tu la laissera seule, le cœur brisée ?! Et toi alors, tu as pensé à toi ? Tu la verras s'épanouir de jour en jour alors que tu vieilliras d'instant en instant ! » mon ton s'élevait au fur et à mesure de mes paroles tandis que mon visage se tordait d'aigreur. « Je t'ai toujours vu comme quelqu'un de sage Samekh mais j'avais tort, tu es un idiot sans pareil. N'as-tu pas assez souffert de l'amour ? »

Mes mots allaient plus loin que ma pensée et pourtant, rien ne semblait pouvoir arrêter ce flot de paroles. Il n'avait plus besoin de moi, il avait cette lionne désormais... Je me sentais remplacée, comme abandonnée. Plus que le pilier de ma vie, Samekh était mon père, mon frère, mon mentor, mon créateur. Comment avait-il pu me cacher une telle chose... La déception se lisait dans mon regard. Je me sentais trahie, trahie par celui en qui j'avais le plus confiance. Oui, c'était bel et bien le regard d'une lionne blessée. J'avais perdu mon aimé après m'être aventuré chez les Nyeusis, on m'avait tabassé jusqu'au sang et forcer à porter l'enfant d'un monstre et alors que je retournais enfin à ses côtés, on allait me l'enlever ? Il avait le double de son âge, c'était insensé...

J'avais toujours eu un côté possessif et protecteur avec mes amis mais avec Samekh, cela atteignait son paroxysme. Si je le perdais... J'ignorais si c'était les hormones de grossesse ou non mais une panique me prenait. Tournant le dos au mâle, je m'éloigna de quelques pas. J'étais bouleversée.

« Tu vas partir la rejoindre sur Outland ? » demandais-je finalement la voix aussi calme que distante.

Je ne voulais pas lui faire face, je ne voulais pas le regarder... Si cela avait été possible, j'aurais aimé garder Samekh pour moi seule et ce pour toujours. Je ne l'aimais pas d'un amour romantique comme pouvait l'aimer la princesse, notre lien était bien plus fort tout en étant indéfinissable. Ma plus grande peur était qu'il m'abandonne et je craignais de voir finalement ce jour arriver.

Il n'y avait rien de plus amer que la jalousie et je détestais cet aspect de ma personne. Pourtant, l'idée de partager Samekh m'était insupportable. Mon amour ne lui suffisait pas ? Tête baissée, j'écoutais les paroles de mon mentor et j'oscillais entre colère et raison. Il visait juste... comment le blâmer d'avoir voulu goûter une dernière fois à l'amour ? Je n'aimais pas quand Samekh se rabaissait à un tel point, ne voyant en lui que le mal sans en percevoir le bien. Ne pouvait-il pas se voir de la même manière que moi je le voyais ? Cela aurait été tellement plus simple. Malgré ces mots dont il me gratifier, je n'en étais pas pour autant apaiser. Qu'importe la manière dont se terminerait cette histoire, il en serait tous les deux blessés.

« C'est juste que j'ai peur de te perdre. »

Cette histoire que nous avions construit ensemble faisait parti de nous, elle nous définissait en tant que personne. Tout ce chemin que j'avais parcouru n'avait été rendu possible que par Samekh et l'idée de le perdre m'était insupportable. Mais plus fort encore que la jalousie, une crainte s'annonçait. Samekh n'était pas éternel à mon grand désarroi et bien que j'en avais parlé si naturellement dans ma colère, je réalisais le poids de nos mots. La mort... quand frapperait-elle ? Je la craignais furieusement, non pas pour moi mais pour Samekh. Quand bien même ma peine, je pourrais supporter d'être séparée de lui par l'amour mais jamais par la mort. Il était mon monde.

« Que se passera-t-il lorsque tu fonderas une famille avec elle ? » demandais-je le ton moins sur la défensive mais plutôt à la recherche de réponse.

Nous formions certes une famille recomposé original et prospère avec sa sœur et ses enfants mais, le jour viendra où Tahani donnera naissance aux enfants du vieux lion et lorsque ce jour viendra, les choses risquaient fort de changer. Un enfant... ça changeait toute une vie.

[C'est tout riquiqui ]

Ma colère passée, le calme était revenu dans mon esprit. Je devais cesse d'agir comme une enfant qui apprenait que son père se remarier avec une belle-mère qu'elle n'acceptait pas. Étouffant un soupir, je me redressa sur mes quatre pattes pour finalement revenir m'asseoir aux côtés du vieux lion. Le regard interdit, je l'observais silencieusement. Je n'avais plus à douter, je savais qu'il ne m'abandonnerait pas et c'était tout ce dont j'avais besoin.

« C'est nous contre le monde entier, depuis le commencement et jusqu'à la fin. » murmurais-je, un demi sourire aux babines.

Je tentais d'imaginer Samekh en tant père. Il serait strict envers ses enfants mais nul doute qui les aimerait de tout son cœur. Mis de coté mes désirs égoïste, je réalisais que c'était peut-être ce dont il avait besoin : des cœurs innocents qui l'aimeraient d'un amour pur et sincère. Samekh avait le droit au bonheur de la paternité, je ne pouvais pas l'en priver. Moi-même allait bientôt connaître ce qu'être une mère signifiait et une certaine excitation me prenait à cette idée. Un enfant, mon enfant. Les temps s'annonceront dur pour lui mais je le protégerais coûte que coûte. J'étais préparée à cela.

« On a changé, pas vrai ? » susurrais-je finalement, le regard vers les étoiles. « On était aigris et haineux du monde et regarde où cela nous a mené... Nous avons fini par prendre part à un combat qui n'était pas le notre, j'ai su accepté mon passé et me tourner vers l'avenir et toi, tu as de nouveau une personne qui fait battre ton cœur. »

Délaissant le ciel nocture, mon regard se déposa dans les yeux de mon mentor. Notre rencontre semblait si lointaine et pourtant, je me rappelais de chaque détail. J'étais née deux fois : lorsque ma mère m'avait mise au monde et lorsque j'avais rencontré Samekh. C'était un jour saint qui jamais ne s'effacerait de ma mémoire.

« Toutes ces choses que l'on s'est dites, ces promesses que l'on s'est faites, je n'oublie rien. Quand bien même les événements passés et ceux à venir, je resterais toujours auprès de toi. Je te l'ai promis, je t'accompagnerais jusqu'à la mort. »

Je savais que ma place était aux côtés de Samekh, je n'avais jamais eu un seul doute à ce sujet. Quand bien je n’approuvais pas certains de ces choix, cela ne changeait rien entre nous. Longtemps, j'avais marché dans son ombre, m'accrochant à son dos en espérant un jour pouvoir le rattraper et pouvoir marcher dignement à ses côtés. Plus qu'un but à atteindre, il était mon pilier, mon Créateur et je ne laisserai une pareille broutille gâchait cela.

La brise nocturne soufflait avec douceur sur nos deux pelages et je m'allongea de nouveau aux côtés du lion, flanc contre flanc. Il restait encore un sujet houleux à aborder et cette fois-ci, c'était Samekh qui risquait bien de se laisser gagner par la colère.

« Je sais que cela ne t'enchante pas mais bientôt, notre famille accueillera un nouveau membre. Les choses seront difficiles pour cet enfant aussi j'aimerais que nous puissions être son havre de paix, ceux avec qui il pourra être lui-même sans crainte de jugement et qui lui donneront l'amour dont il aura besoin. » Je marqua une courte pause, le regard posé sur le lion rouge avant de continuer : « Je devine que tu ne le portes pas dans ton cœur, quand bien même il grandit encore dans mon ventre mais sache qu'il n'est pas responsable de ce qu'il m'est arrivé. Lui aussi est une victime des Nyeusis. »

J'ignorais encore comment gérer les choses à sa naissance et surtout que lui dire quant à son père absent. J'espérais ne pas mettre au monde un lionceau curieux, cela éviterait bien des préoccupations mais je ne pouvais me cacher derrière des hypothèses faciles. Avant qu'il ne découvre ses gênes obscures, je tâcherai de lui donner un amour si doux et fort que la Lumière gardera à l'écart les Ténèbres. La suite, je l'optimiserais en temps voulu.

Je ne pouvais réellement placé de mot juste sur l'importance de Samekh dans mon cœur tant il était un tout. Un père, un frère, un mentor, un ami... Il était toutes ces choses à la fois et bien plus. Certains qualifiaient son existence de blasphème mais à mes yeux, il était mon héros, celui qui m'avait sauvé de l'errance et ma vie lui était dédiée. Mourir pour lui n'était pas mourir. J'avais rencontré divers lions et lionnes, liée des amitiés et des personnes étaient devenus chères à mon cœur mais quand bien même tout cela, ma loyauté serait toujours pour lui. A jamais.

« C'est grâce à toi que je suis devenue cette lionne, ma force je la tire de toi. Peu importe l'image que tu veux donné ou celle que tu perçois de toi, tu seras toujours mon héros. »

Si je n'aimais pas certains de ses choix comme celui d'aimer la princesse d'Outland, je les respecterais toujours. Avions-nous tous constamment fait les bons choix ? Non, l'erreur était humaine et qui n'avait pas ses défauts n'était pas réel. Se contentait-il de rester dans l'ombre en me sachant dans la lumière ? Je ne pouvais accepter de tels honneurs qu'avec lui à mes côtés. Il était mon unique guide et seul son enseignement avait rendu tout cela possible. Des années durant j'avais marché dans son ombre, admirant son dos comme un but à atteindre. Je l'admirais comme personne et j'avais toujours souhaité le rendre fier de cette lionne perdue qu'il avait recueilli. Voir dans ses yeux l'étincelle brûlante de la fierté, celle que mon père n'avait jamais daigné me donner. Je me fichais bien du regard des Pridelanders, seul le sien m'importait.

Concédant à mon souhait, le vieux lion m'affirmait qu'il accepterait et protégerait cet enfant quand bien même il ne pouvait être garant d'un amour. Un triste sourire assombrit mon visage, c'était suffisant. Les temps à venir s'annonçaient difficiles et l'avenir incertain mais du moment qu'il était à mes côtés, j'étais persuadée que le malheur ne pourrait plus venir me frapper.

« Je ne veux pas de tes excuses. Tu étais toujours avec moi, présent dans mon cœur. »

C'étaient leurs souvenirs qui m'avait permis de ne pas devenir folle dans cette sombre caverne. Je n'avais eu de cesse de penser à eux et leurs amours m'avaient donner la force de revenir. Se redressant de toute sa hauteur, le vieux lion frôla mon corps du sien et je fermais doucement les yeux, savourant ce contact. Être de nouveau à ses côtés était ma plus belle récompense car où se trouvait le lion se trouvait également mon foyer. Pour le bon comme le mauvais, j'étais devenue dépendante de lui mais ça, Samekh s'en doutait depuis bien longtemps déjà...

Un doux sourire étirait mes babines, heureuse d'avoir pu échangés ces quelques mots avec le mâle. Je me redressais à mon tour pour venir marcher à ses côtés, cette discussion avait permis d'éclairer certains points mais aussi de nous retrouver. Abaissant un regard vers mon ventre, je souris à la germe qui grandissait en moi. Ce cadeau empoisonné deviendrait un être merveilleux, il suffisait de le croire. Si j'en venais à haïr ce lionceau autant que son père, cela signifiait la victoire de Mopanga. Ma plus belle revanche sur lui serait d'aimer cet enfant comme jamais je ne l'aurais aimé. Il verrait alors l’étendu de l'amour dont j'étais capable, cet amour que je ne lui avais pas offert quand bien même il l'avait désiré. Marchant aux côtés de mon mentor le cœur un peu plus léger, je savais que cette nuit, je trouverais enfin le sommeil.

Citation :

Fin pour moi, merci Sam <3