Cela faisait quelques jours maintenant que j'avais rencontré Wahidan. Bien des choses s'étaient passées depuis mais alors que j'étais assise au sommet d'une colline surplombant le Don, cette rencontre me revenait en mémoire.

Si je m'étais involontairement rendue près de la frontière du Désert, trop absorbée par mes pensées pour remarquer où j'allais, j'avais eu de la chance de tomber sur lui. En effet, le jeune s'était montré sympathique et je ne sais pas si j'aurais pu en dire autant si j'avais rencontré un lion ou une lionne plus âgé.

Si j'avais toujours un peu peur des jangowas, au moins le fait de rencontrer Wahidan m'avait permis de voir que tous les jangowas n'étaient pas hostiles à la simple vue d'un étranger. Il me serait à l'avenir plus facile de retourner près de la terre des sables même si je devais avouer que je n'irais quand même pas jusqu'à y aller tous les jours !

Observant les différents troupeaux sans toutefois avoir l'intention de chasser, je cherchais juste à savoir si tout allait bien pour ces animaux également. En tant que chasseresse, il était de mon devoir de veiller sur ce point, d'autant qu'il s'agissait d'un ordre direct de Safi. Elle ne pouvait s'en occuper elle-même puisqu'elle était retenue par autre chose, aussi avait elle fait appel à moi.

C'est ainsi que, alors que mon regard passait d'un troupeau de gazelles à un troupeau de zèbres, je remarquais le pelage d'un félin. Dépourvu de crinière, il devait s'agir d'une lionne. Quittant mon poste, je me dirigeais vers elle et pendant le chemin, je distinguais quelques tâches claires sur l'arrière de ses pattes. Affichant un sourire, j'avais reconnu de qui il s'agissait. Annonçant mon arrivée en ne minimisant pas le bruit que je faisais, c'est lorsque je me trouvais à quelques mètres que je la saluais. Bonjour Anga ! Comment vas-tu ?

J'avais déjà croisé la lionne à plusieurs reprises et notamment lorsque celle-ci nous rejoignait pour chasser. J'avais noté qu'elle semblait avoir du mal à s'intégrer et je me disais que si elle partageait plus de moments avec ses camarades de chasse, peut être que cela pourrait lui être bénéfique.

Bien que je pensais avoir fait suffisamment de bruit pour ne pas surprendre ma camarade, celle-ci sursauta tout de même. Apparemment, ma nature de chasseuse était intervenue et je m'étais montrée plus discrète que je ne l'aurais voulu. Ou alors, Anga était tellement plongée dans ses pensées qu'elle ne m'avait pas entendu, en dépit de mes efforts pour l'être.

Alors qu'elle avait fait volte face d'un seul bond, je remarquais son poil hérissé. Eh bien, la peur que j'avais dû lui faire devait vraiment être importante pour qu'elle ait une telle réaction. Toutefois, après m'avoir reconnue et saluée, ses poils retombèrent contre son échine. Ma camarade m'expliqua ensuite ce qu'elle était en train de faire. Ou en tout cas, elle essaya car elle ne put que balbutier quelques mots avant de s'interrompre. Je levais les sourcils, affichant un air interrogateur et attendant la suite.

Mais cette suite n'arriva pas. Anga se contenta simplement de répondre à ma question avant de me la retourner. Je vais bien, merci. La féline d'à peu près mon âge me sourit légèrement et je lui rendis son sourire, contente qu'elle continue la conversation.

Elle indiqua que j'étais bien une chasseresse car elle ne m'avait pas entendue. Une expression de surprise s'afficha sur mon visage avant que je n'adopte un air désolé. Pardon, je ne pensais pas te surprendre. Je pensais avoir fait suffisamment de bruit pour éviter cette situation mais... eh bien, il faut croire que j'ai raté mon coup, dis je en rigolant de façon légère mais en affichant un air penaud. Safi m'a chargée de surveiller les troupeaux et de voir si tout allait bien pour eux. Aurais tu remarqué quelque chose de notable ?

Bien que je rechignais pas à effectuer la tâche que l'on m'avait confiée, rien ne m'interdisais de recueillir des informations auprès d'une personne qui se trouvait dans la zone avant moi et qui avait donc eu plus de temps pour observer les troupeaux. Cela me ferait gagner du temps et j'en aurais alors plus pour discuter avec ma camarade. Attendant sa réponse, je fixais mon regard dans le sien, la regardant comme toute personne normale et faisant fi de la brulure qui la défigurait.