Aujourd'hui, je n'avais pas de but précis. La chasse avait eu lieu tôt ce matin et avait été un succès. Cette mission remplie, nous avions rapporté notre butin au Rocher. J'y avais croisé le regard de Kupendwa et avais souri malgré moi. A sa simple vue, la conversion de l'autre nuit me revenait et je ne pouvais m'empêcher de sourire. Après tout, il m'aimait plus qu'une simple amie et il en était de même de mon côté...

Notre relation évoluait dans un sens qui me convenait parfaitement et j'avais hâte de pouvoir à nouveau passer un moment seule en sa compagnie. Toutefois, il semblait être occupé alors je l'avais laissé tranquille et j'avais fait demi-tour afin de retourner dans la Savane.

Je ne savais pas ce que je comptais y faire mais pour le moment, me balader rien qu'en profitant de cette belle journée me paraissait la meilleure chose à faire. C'est donc d'un pas relativement lent que je déambulais de-ci, de-là lorsqu'il me sembla entendre mon nom. Je ne voyais personne dans mon champ de vision et aucune odeur de félin s'approchant ne me parvenait alors je repris ma route.

Toutefois, un "attends" crié plutôt fort me stoppa pour de bon. La voix venait de derrière moi et c'est en me retournant que j'aperçu un pelage doré et parsemé de tâche qui s'approchait à grandes foulées, bien que sur trois pattes. Horrifiée de l'avoir forcée à me rejoindre d'une telle façon, j'allais me porter à sa rencontre mais Aya avait déjà réduit la distance qui nous séparait et voilà qu'elle s'asseyait à mes côtés.

L'imitant afin d'être plus à l'aise pour une conversation, je commençais par répondre à ses remerciements. Il n'y a vraiment pas de quoi. J'admet que les faits tels qu'ils m'ont été exposés semblaient te désigner coupable mais je te connais assez pour être convaincue que jamais tu n'aurais pu faire ce que l'on te reprochait. Je lui adressais un sourire sincère avant de reprendre. Cela ne te ressemblait pas du tout et c'est pour ça que je t'ai défendue auprès de Kupendwa. Et puis, je suis certaine que si les rôles avaient été inversés, tu aurais agi de même.

Après tout, en plus des qualités de la liarde que j'avais exposées au souverain de Prideland : j'étais sûre qu'Aya était une personne juste. Ainsi, j'étais on ne peut plus sincère avec mon amie. Amie pour laquelle je m'inquiétais toujours bien qu'elle était désormais de retour. Je vais bien mais honnêtement, je ne pense pas que c'est à moi qu'il faut poser la question ! la taquinais je légèrement. J'ai l'impression que tes mésaventures ne se sont pas arrêtées à la frontière de Prideland, dis-je en pointant de la queue la patte sur laquelle elle ne s'était pas appuyée lorsqu'elle m'avait rejoint quelques instants plus tôt.

Aya ne tarda pas à confirmer mes propos sur le fait qu'elle aurait agit de la même façon si nos situations avaient été inversées. Et à vrai dire, j'étais persuadée qu'elle l'aurait fait avec n'importe quel membre du clan, voire même des animaux de clans extérieurs tellement son cœur était bon.

Mon amie liarde m'expliqua ensuite ce qui lui était arrivé pour que sa patte finisse dans cet état. Elle avait reçu un coup de sabot lors d'une chasse avec Kuvira lorsque les deux félines se trouvaient sur la Lande. Je m'inquiétais déjà pour mon amie mais celle-ci tenta bien vite de me rassurer en me disant qu'Isha la soignait. Cette dernière lui aurait dit que la chasseresse pourrait bientôt reprendre son activité.

Je n'étais pas très convaincue par ce que me disait Aya. D'autant plus lorsque me revenait en tête la façon dont elle avait couru pour me rejoindre il y avait quelques minutes de ça. Si elle n'avait su courir sur ses quatre pattes sur une courte distance, inutile de dire combien cela serait compliqué si elle devait courir plus... Je gardais toutefois mes inquiétudes pour moi, laissant le bénéfice du doute à mon amie ainsi qu'à la guérisseuse du clan.

Mon interlocutrice fit ensuite dévier la conversation et évoqua un sujet de discussion qu'elle avait justement eu avec la guérisseuse. Isha avait laissé entendre que j'allais possiblement remplacer Itawuma le temps qu'elle se repose et Aya me demandait ce que j'avais choisi. Kupendwa m'a effectivement proposé d'être sa nouvelle Conseillère il y a de ça quelques nuits. Si Aya pouvait penser qu'il s'agissait seulement d'une rumeur, je venais de confirmer sa véracité. Et oui, j'ai accepté sa demande.

Je souriais. Dit comme ça et dans un autre contexte, cela aurait pu être la réponse que j'aurais pu donner si mon amie m'avait demandé si j'avais accepté la demande de Kupendwa pour être sa compagne. Enfin, en y réfléchissant bien... C'était peut être également un peu le cas. Rien n'avait été dit de façon officielle et nous gardions cela pour nous mais... Puisque nous avions des sentiments l'un pour l'autre et que nous nous l'étions avoué, est-ce que je pouvais me considérer comme la compagne de Kupendwa ?

Je n'en savais rien et cela me troublait quelque peu. Toutefois, j'essayais de mettre ça de côté en me disant que j'en parlerais plus tard avec le concerné.

Pour le moment, je me concentrais sur mon amie hybride et reprit la parole, me confiant sur mon ressenti par rapport à mon nouveau rôle. J'avoue que je ne m'attendais pas à une telle proposition de la part du Roi et les responsabilités de ce rôle de Conseillère m'angoissent un peu... C'était un grand bouleversement pour moi qui n'était qu'une simple chasseuse et j'étais honnête avec mon amie au pelage doré et tacheté. Kupendwa m'a dit qu'il serait là pour m'aider et je sais qu'il le fera si je le lui demande mais avec tout ce qu'il fait déjà, j'aimerais qu'il n'ait pas à s'occuper de moi en plus. Au contraire, j'aimerais pouvoir le suppléer comme il se doit afin que Prideland n'en subisse pas les frais. J'avais accepté ce rôle autant pour aider Kupendwa que pour rendre service à Prideland et j'espérais vraiment que je serais à la hauteur du rôle que l'on me confiait.

Mon amie usa de mots qui eurent pour effet de me rassurer. Ce pour quoi je la remerciais instantanément. Merci, tes mots me font chaud au cœur.

La liarde parla ensuite de notre "relation" à Kupendwa et moi. Elle ignorait que nous étions amis. Je tentais de ne rien laisser transparaitre mais ce n'était pas facile. Si elle savait... Depuis quelques nuits, nous étions bien plus que des amis le Roi et moi. Si ma nomination en tant que remplaçante d'Itawuma s'était ébruitée, je pouvais au moins être rassurée que ceci soit resté secret. Et comme je comptais bien que ça continue, je parlais simplement de notre amitié et de comment celle-ci s'était créée. Et bien, cela s'est fait très rapidement. Je suis allée le remercier après l'élimination de la menace Rebelles et on s'est aperçu que l'on avait aimé discuté l'un avec l'autre. On s'est revu plusieurs fois et notre amitié est née très vite.

En pensant au lion que j'aimais, mon cœur battait légèrement plus vite. Nous avions convenu d'un commun accord de prendre notre temps et de garder notre relation amoureuse secrète. Et je devais avouer que pour le moment, cela me plaisait comme c'était. Même mes parents n'étaient pas au courant, c'était dire ! Heureusement, Aya ne sembla rien remarquer car on revint ensuite sur le sujet "Conseillère Royale" en parlant d'Itawuma. La liarde demandait comment la lionne orangée avait réagit. Pas terrible. D'après ce que m'a dit Kupendwa, elle a accepté sa punition mais puisqu'elle a été formée pour ce rôle depuis sa jeunesse, c'est comme si on lui retirait une grande partie de sa vie.

Ce n'était pas comparable mais je me demandais comment je réagirai si l'on me retirait la possibilité de chasser... Oh ! Je n'avais pas pensé à cela mais puisque j'allais occuper le rôle de Conseillère, cela voulait il dire que je ne devais plus participer aux chasses ? Je n'y avais pas réfléchi plus tôt et cela me troublait. Il faudrait que j'en parle avec Kupendwa mais, même si je n'avais jamais vu Itawuma parmi les chasseuses, cela ne voulait pas nécessairement dire que les deux fonctions étaient incompatibles. Enfin, cela serait vu en temps voulu et pour le moment, il y avait quelque chose que je voulais demander à mon amie. Maintenant dis-moi : je sais que c'est Kuvira qui est partie à ta recherche et qui t'a ramenée. Les choses ont elles avancées entre vous ?

Oui cela pouvait paraitre pour de la curiosité mais cela touchait au bonheur de mon amie et je voulais qu'elle puisse ressentir la même joie que celle qui était la mienne depuis que Kupendwa et moi étions ensemble.

J'écoutais Aya évoquer le fait qu'il était important d'avoir des amis, surtout pour une personne comme Kupendwa vu les responsabilités qu'il avait. Heureusement pour lui, le Souverain avait des amis fidèles et désormais, je pouvais me compter parmi eux. Même si j'étais devenue plus qu'une simple amie.

La suite de la conversation porta sur Itawuma. Aya l'avait évoquée la première et je lui avais indiqué qu'elle avait accepté sa punition même si cela était dur pour l'ancienne Conseillère. La liarde accueillit mes propos avec désinvolture, comme si elle n'avait parlé de la lionne orangée uniquement pour la forme. Je ne pouvais pas lui en vouloir de réagir ainsi. Après tout, l'hybride était passé à un crin d'être exilée de son territoire et, si je me mettais à sa place un instant, j'imaginais qu'il devait être difficile de passer à autre chose et qu'elle devait toujours avoir cette affaire en travers de la gorge.

Soucieuse d'aborder un sujet plus léger, je ne rebondis pas, laissant cette partie de la conversation se terminer. Je passais alors à quelque chose de complétement différent, à savoir la vie amoureuse d'Aya. J'espérais qu'elle me dise que Kuvira était passée aux aveux et que désormais, les deux félines formaient un couple. Mais mon espoir tomba bien vite lorsque mon amie avoua que rien n'avait changé. J'étais un peu déçue et si Aya semblait se convaincre qu'elle pouvait se contenter de l'amitié de la Cheffe des Guerriers, je savais que ça ne pouvait pas se produire. Pour avoir vécu quelque chose de similaire avec Kupendwa, il viendrait un moment où Aya en voudrait plus et où l'amitié ne suffirait plus. C'est ce que j'allais lui dire lorsqu'elle reprit la parole et je bloquais complétement.

Si le début avait plutôt bien commencé avec de l'optimisme de la part de la liarde, la suite m'avait totalement figée. Il ne s'agissait pourtant que d'une simple possibilité dans son esprit mais si elle savait à quel point elle était dans le vrai... Intérieurement, j'étais mortifiée. Si j'aurais pu me douter qu'elle profiterait de l'occasion que l'on parle de couple pour m'interroger - ce pour quoi je m'insultait mentalement - je ne savais pas comment réagir. Est-ce que je devais le lui dire ? Non... Même mes parents n'étaient pas au courant, je ne pouvais pas l'informée avant eux. Et comme je voulais garder ça secret encore un moment...

Eh bien... Je dois dire que depuis notre dernière conversation, il y a eu une évolution... Je dandinais d'une patte sur l'autre, ne parvenant pas à me contenir. Je ne souhaitais pas lui mentir, ni même lui cacher une partie de la vérité mais ce secret, je ne pouvais lui révéler. C'est pourquoi j'optais pour une demi vérité car après tout, les meilleurs mensonges contenaient bien souvent une partie de vérité. Je ne dis pas qu'il y aura quoi que ce soit entre nous mais oui, je dois avouer que Kupendwa me plait beaucoup. Il me plaisait vraiment plus que ce que j'admettais devant Aya mais je ne pouvais le lui dire. Mais bon, nous ne sommes qu'amis depuis peu donc si quelque chose doit se développer, cela viendra avec le temps. Je concluais par un sourire avenant, me voulant aussi rassurante pour sa propre histoire avec Kuvira.

La féline tachetée ne reprit pas immédiatement la parole mais le large sourire qui illuminait son visage en disait long. Elle était sincèrement contente pour moi et une vague de culpabilité m'envahit. Je m'en voulais tellement de ne pas pouvoir lui dire la vérité ! C'est pourquoi je me jurais que, lorsque Kupendwa et moi aurions décidé de rendre notre relation publique, Aya serait la première personne après mes parents que je chercherai pour lui annoncer la nouvelle.

Les mots jaillirent enfin de la bouche d'Aya et le moins que l'on puisse dire, c'était que son exclamation fit beaucoup de bruit. J'en sursautais même légèrement avant de vérifier autour de nous si quelqu'un nous regardait mais il ne semblait pas y avoir eu le moindre dérangement. Mon amie continua en chuchotant, m'avouant que Kupendwa ne devait pas être insensible à mes charmes. Si je savais que c'était bel et bien le cas, j'étais étonnée que cela se voit autant et je notais dans un coin de ma tête qu'il allait falloir que j'en parle avec le concerné. La liarde sembla prendre mon étonnement pour une question silencieuse car elle s'empressa d'ajouter avec un petit rire que notre Roi me regardait avec insistance.

Je souriais face à cette révélation. Je savais qu'il avait des sentiments pour moi puisqu'il me l'avait dit et s'il me regardait avec tendresse lorsque nous n'étions que tout les deux, je n'avais pas remarqué qu'il agissait aussi de la sorte lorsque nous étions en public. Si cela me touchait, il faudrait peut être que nous fassions plus attention à l'avenir.

La suite des questions d'Aya me forcèrent à mentir de nouveau, ce que je n'aimais pas du tout. Non, je ne lui ai rien dit et pour le moment, je ne compte pas le faire. Ca ne fait que très peu de temps que nous sommes devenus amis et que je me suis rendu compte qu'il m'attirait... Je ne peux pas lui dire tout de suite ce que je ressens, j'estime que ce serait beaucoup trop rapide comme évolution. Bien qu'étant en train de mentir, je n'avais pas trop de mal à trouver les mots car il me suffisait de me remettre dans la peau de la Alaya d'il y a un mois seulement. Mais je ne compte pas non plus me taire à jamais, repris-je avec un petit rire. Je vais continuer à discuter et passer du temps avec lui et si je me rend compte que mon attirance se transforme en quelque chose de plus fort, je le lui avouerai, concluais-je avec un clin d'oeil. Et puis qui sait, peut être que lorsque je pourrais avouer à Aya que cette histoire entre le Roi et moi était plus qu'une possibilité, elle-même aurait la joie d'être en couple avec une certaine lionne brune commandant les guerriers de Prideland.

Mon amie hybride continua d'argumenter, me disant que je ne devais pas trop attendre car je risquais de voir Kupendwa s'intéresser à une autre femelle. Rien qu'à cette pensée et bien que je savais que le Roi m'aimait, un frisson parcourut mon échine. Je repensais à cette discussion que j'avais eu avec le meneur de Prideland au sujet de la déclaration d'Itawuma et à ce que j'avais ressenti à ce moment. Je n'avais pas aimé savoir qu'il y avait potentiellement une autre femelle que moi dans le cœur de Kupendwa et heureusement pour moi, ça n'avait pas été le cas. Aussi, je n'eu aucun mal à acquiescer face aux dires de mon amie.

Cette dernière m'indiqua alors qu'elle devait partir car elle avait promis à son père de l'aider à chasser. Elle se permit même un trait d'humour sur leurs capacités physique et c'est pourquoi je riais presque lorsque je pris la parole. Vous allez y arriver, j'en suis certaine ! Et si jamais ce n'est pas le cas, n'hésite pas. Jarriverais en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire !

Ma proposition était plus que sincère. Après tout, est-ce que je pouvais me considérer comme une bonne chasseuse si mon amie et son père n'avaient pas de quoi se nourrir aujourd'hui ? Non. Et puis, ça me ferait plaisir de les aider s'ils en avaient besoin. La liarde accepta d'un simple signe de tête avant de conclure la conversation en me faisant promettre de la tenir informée de l'évolution de la situation entre Kupendwa et moi. Je ne pouvais le lui refuser et c'est là-dessus qu'elle s'en alla rejoindre son paternel. Pour ma part, je retournais à mes propres occupations, à savoir profiter du beau temps et déambuler tranquillement dans la savane.