Levant la tête, j'offrais mon visage au soleil. Je pouvais alors savourer la douce caresse des rayons de l'astre solaire sur mon pelage.

Même s'il s'avérait que la chaleur était plus importante sur Prideland depuis plusieurs années, cela ne m'affectait pas autant que certains autres félins. Avec mon pelage doré, je pouvais être soulagée de ne pas avoir à trop souffrir de la chaleur et c'était une très bonne chose car j'appréciais cela.

Peu de félins sur Prideland arboraient des couleurs telles que les miennes. La mixité ne me dérangeait en rien, bien au contraire, mais j'étais plutôt heureuse d'avoir hérité de ces teintes car cela m'offrait un atout de taille pour la chasse. Il était bien connu que c'était un avantage non négligeable lorsqu'il s'agissait d'être invisible et de ne faire qu'un avec le paysage.

Et cela était d'autant plus vrai en ce lieu que partout ailleurs sur le territoire. Mes pas m'ayant dirigés vers la Colline du Peponi, mon pelage se fondait parfaitement avec l'herbe dorée qui recouvrait l'endroit.

Bonjour Alaya !

Tournant la tête vers la personne qui venait de m'interpeller, je découvrais une scène pour le moins plutôt amusante : la féline qui m'avais abordé se trouvait être Aya. Reconnaissable entre toutes car elle était la seule liarde arborant ces couleurs sur Prideland, ce qui m'amusait était de voir que, puisque elle aussi avait des teintes semblables à celle de l'herbe environnante, seule sa tête semblait s'avancer vers moi. Admettons que cela avait quelque chose de comique et un sourire amusé étira mes babines.

J'ai eu de la chance de t'apercevoir, ton pelage se marie parfaitement au décor !

Si je souriais déjà, celui-ci se fit beaucoup plus franc car Aya devait être confrontée à la même scène que moi : une simple tête au-dessus des herbes.

Que fais tu ici ?

Elle avait entamé la discussion d'un ton aimable et c'est naturellement sur ce ton que je prenais la parole à mon tour.

Bonjour Aya ! commençais-je pour lui rendre la politesse. Bien que nous n'ayons jamais vraiment discuté toutes les deux en dehors des politesses échangées par ci par là, je pouvais dire que j'appréciais la jeune femelle. Elle semblait toujours enjouée et de bonne humeur, cela ne pouvait que me plaire.

Et moi alors, j'ai beau ne pas t'avoir aperçue, je pourrais en dire autant. Il semblerait que tu nages dans les herbes ! avouais-je en riant. Cela n'était en rien moqueur, il s'agissait simplement d'une constatation amusante et mon ton ne pouvait tromper : je n'étais absolument pas en train de rire aux dépends d'Aya. Cela ne me serait même pas venu à l'esprit.

Calmant mon rire mais ne me défaisant pas de mon sourire pour autant, je m'attelais à répondre à sa question.

A vrai dire, je ne fais rien. Je profite simplement du lieu et de la chaleur. Et toi, qu'est-ce qui t'a mené jusqu'ici ?

Il fallait dire que la Colline du Peponi n'était le lieu le plus proche du Rocher et il fallait une bonne raison pour venir si loin. Enfin, je disais ça mais après ce que je venais d'avouer à Aya... fallait il vraiment une raison ?

La jeune hybride accueillit ma salutation ainsi que ma plaisanterie avec le même état d'esprit que le mien. Elle avait l'air enthousiaste et de bonne humeur et cela ne pouvait qu'amener du positif. De ce fait, je ne pensais pas trop me tromper en me disant que cette féline et moi allions très bien nous entendre.

Eh bien à vrai dire, je suis ici pour les mêmes raisons que toi, c'est à dire aucune en particulier ! m'avoua t-elle sur le même ton de plaisanterie utilisé quelques instants plus tôt. J'aime cet endroit, il est si reposant, et peu d'animaux viennent ici en général, surtout avec cette chaleur ! Ils préfèrent rester au frais.

Je ne pouvais qu'être d'accord avec Aya sur ces points ! Autant en ce qui concernait la paix qui se dégageait de cet endroit que sur la solitude qui y régnait, solitude qui semblait augmenter en même temps que la chaleur.

Nous n'avons jamais vraiment eu l'occasion de passer un moment ensembles, que dirais tu d'apprendre à mieux nous connaitre ?

Une fois encore, j'étais d'accord avec elle. Comme elle venait de le souligner, les seules mots échangées entre nous n'avaient pas vraiment permis que nous nous connaissions vraiment. Des brefs échanges passés et des échos que j'avais eu, la liarde était une personne gentille, aimable et possédait un cœur aussi doré que son pelage. Elle avait une personnalité qui ressemblait à la mienne et sa proposition ne pouvait que me plaire.

J'en dis que je suis on ne peut plus d'accord, lui répondis-je d'un ton plus qu'enjouée. J'avais hâte de pouvoir faire plus ample connaissance avec celle qui aurait pu être une sœur tant nous semblions nous ressembler, autant physiquement que mentalement.

Mais par où commencer ? fis-je, pensive. Il me fallut quelques secondes pour trouver une idée de ce que je voulais poser comme question à mon interlocutrice. Oh, je sais ! Ce n'est pas quelque chose que l'on demande souvent mais... eh bien, ça aura au moins le mérite d'être original ! dis-je en m'amusant déjà de ce que j'allais demander à Aya.

Si, pour une journée, tu étais un mâle, qu'est-ce que tu ferais ?

Je ne savais pas vraiment d'où m'étais venue cette idée mais, en plus de trouver cela drôle, je me disais que l'on pouvait en apprendre pas mal sur ce que l'autre désirait. Et pas forcément en tant que membre du sexe opposé. Je pouvais aussi avoir l'occasion de savoir ce qu'elle appréciais en tant que femelle.

Pour une question originale, celle que j'avais posée rentrait incontestablement dans cette catégorie. Elle rentrait aussi dans la catégorie des questions un peu gênante si j'en jugeais par la réaction adoptée par Aya.

Je ne m'étais pas rendue compte que cela pouvait être gênant et maintenant, je regrettais d'avoir eu cette idée et je m'en mordais la lèvre inférieure. J'allais dire à Aya qu'elle n'était pas obligée de répondre et que j'allais lui demander autre chose mais elle se mit à me répondre.

J'écoutais attentivement ce que me disait ma camarde de clan mais je devais avouer que je ne m'attendais pas à cela. Autant je me doutais qu'elle allait me retourner la question, autant j'étais loin de saisir le sens de ses paroles. Avant de prendre le temps de réfléchir, je repris rapidement la parole pour tenter de comprendre ce qu'elle venait de dire.

Comment ça ? Pourquoi il faudrait que tu sois un mâle pour conquérir un cœur ?

Je ne voyais pas en quoi le fait d'être une femelle empêchait forcément de prendre les choses en pattes. Notre statut de femelle ne devait pas nous cantonner à attendre qu'un mâle daigne nous remarquer et nous courtise. A mon sens, nous étions parfaitement capable d'être celle qui ferait le premier pas et initie la relation qui deviendrait potentiellement une histoire intéressante.

Pour ma part, je me suis toujours demandé ce que cela faisait d'avoir une crinière. J'imagine que cela apporte une certaine chaleur mais à voir certains membres du clan, ils n'ont pas l'air d'en souffrir plus que ça... De fait, je crois que je passerai une partie de mon temps à analyser cette particularité. Il était vrai que puisqu'il s'agissait de l'une des grandes différences entre mâle et femelle, je m'étais souvent demandé ce que l'on ressentait avec une crinière. Oh, et j'en profiterai sans doute pour voir ce que ça donne d'être un guerrier ! Je sais que je pourrais le faire en étant une femelle mais je n'ai pas les capacités pour...

La nature ne m'avait pas dotée des aptitudes nécessaires pour devenir une guerrière et elle avait plutôt décidé que ce qu'il me fallait, c'était les compétences d'une chasseuse. Et à vrai dire, cela me convenait plutôt bien !

Au vu des paroles d'Aya, cette dernière sembla m'imaginer avec une crinière et l'image devait être plutôt amusante puisque la femelle se moqua ouvertement de mon possible moi en tant que mâle. Cela restait bon enfant et je me mis à rire avec ma camarade de clan.

Celle-ci continua d'ailleurs en ajoutant qu'elle n'aimerait pas être un mâle et que les capacités physiques offertes par le fait d'être une femelle étaient trop précieuses à son goût. De par les arguments qu'elle avançait, je comprenais parfaitement. Bien qu'il était difficile de s'imaginer avec le corps d'un mâle, le physique que l'on possédait elle comme moi, nous convenait parfaitement.

La féline tachetée avait dû remarquer mon incompréhension car elle m'expliqua plus clairement ce qu'elle avait voulu me dire précédemment. Un simple Oh ! m'échappa suite à cette révélation. Je n'avais pas envisagé cette possibilité et, à y réfléchir, je pouvais supposer que c'était là ce qui avait sans doute gêné Aya lorsque je lui avais posé ma question en premier lieu.

Je n'étais pas dégoûtée le moins du monde par le fait qu'une femelle en aime une autre. C'était troublant certes car cela n'était pas commun mais après tout, chacun avait le droit d'écouter son cœur et d'aimer celui ou celle qui le faisait battre, peu importe qu'il soit ou non du même genre. Faisant fi de la note d'humour par laquelle avait terminé Aya, je lui dévoilait ce que je pensais.

Je réitère ce que j'ai dit : je ne vois pas pourquoi il faudrait que tu sois un mâle pour conquérir son coeur, commençais-je avec un sourire encourageant. Tu dis que tu imagines qu'elle est intéressée par les mâles mais en es-tu certaine ? Peut être est elle dans le même cas que toi et qu'elle n'ose pas te l'avouer ? Ou ne se rend t-elle tout simplement pas compte de ce qu'elle ressent. Comment agit elle envers toi ? Se pourrait-il que tu sois plus qu'une amie à ses yeux ?

Par mon ton et mon attitude, je tentais de mettre la jeune liarde en confiance. Ou en tout cas, si elle ne l'était pas assez pour me répondre, j'espérais qu'elle réfléchisse au moins à ces questions. Qui sait, peut être que cela pourrait faire évoluer leur relation à toutes les deux !

Après que j'ai énoncé mes pensées à la jeune liarde, celle-ci sembla réfléchir un instant. La féline aux yeux verts m'expliqua alors le comportement qu'avait celle qui faisait battre son cœur envers elle. Et la première phrase, bien que dite sur le ton de la plaisanterie était incroyable. Pluisqu'Aya en riait, je n'arrivais pas à savoir si ce n'était qu'une plaisanterie ou si elle était vraiment sérieuse. Finalement, je ne cherchais pas à en apprendre plus et me contentais de me dire que cela devait être une blague entre elles.

La suite fut des plus intéressantes. Voir les étoiles, hmm ? Cela sonnait comme un rendez-vous romantique selon moi. Pour Aya aussi apparemment puisque c'était lors de cette soirée qu'elle avait avoué ce qu'elle ressentait. Toutefois, la destinataire de cet aveu n'avait pas retourné ses propres sentiments et n'en avait même jamais reparlé depuis. Cela pouvait signifier plusieurs choses. Soit elle avait été choquée, ne ressentait pas la même chose mais ne voulait pas froisser son amie et ne disait donc rien. Soit elle avait été choquée, ne savait pas ce qu'elle ressentait, ne voulait pas froisser son amie en étant maladroite et ne disait donc rien.

L'hybride ajouta qu'elle pensait que ses sentiments n'étaient pas réciproques et qu'elle devrait s'en contenter. Que c'était triste, elle méritait tellement plus ! Je ne pouvais la laisser penser que tout était fini et je parlais sans prendre le temps de réfléchir.

Je ne sais pas ce que celle que tu aimes peut ressentir mais il se peut qu'elle n'en sache rien elle-même. Continue de passer du temps en sa compagnie et peut être se rendra t-elle compte qu'elle partage tes sentiments. Après tout, rien n'était jamais perdu, n'est-ce pas ?

Aya évoqua ensuite mon ouverture d'esprit avant de me dire que je lui faisais penser à elle. Elle plaisanta ensuite en me demandant si je n'étais pas à moitié liarde. Riant tout d'abord avec elle à cette plaisanterie, je ne pu m'empêcher de répondre en tentant de reprendre un semblant de sérieux.

Et bien, je suis à peu près certaine que mes deux parents sont des lions, fis-je, pensive. Ou alors, il y a quelque chose que j'ignore, ajoutais-je en riant, ne pouvant contenir plus longtemps mon sérieux.

Mon rire quelque peu calmé, je n'oubliais pas la dernière question d'Aya. Personne n'avait fait fondre mon coeur comme elle le disait mais cela ne m'empêchait pas de trouver certains physiques attirants.

J'admets que certains lions pridelanders, et pas que, ajoutais-je en pensant aux lions blancs qui avaient séjournés quelques temps sur Prideland, sont plutôt pas mal à regarder... Toutefois, aucun d'entre eux n'a réussi à me faire tomber amoureuse. Pour le moment, concluais-je avec un clin d'œil. Je n'avais pas l'intention de finir ma vie en tant que vieille fille et je comptais bien fonder ma propre famille un jour. Toutefois, je n'avais pas encore trouvé celui avec qui je le ferai.