Après plusieurs jours de chaleur soutenue, le ciel avait changé de couleur. D'un bleu sans nuage, il était devenu beaucoup plus gris. De lourds nuages sombres avait recouvert le territoire en l'espace de quelques heures et la pluie était tombée. Celle-ci avait eu pour effet de faire baisser la température et la fraicheur apportée était bienvenue.

De ce fait, et malgré les nuages toujours amassés dans le ciel, la journée était plutôt belle. Si toutefois cela pouvait avoir un rapport avec le temps, nul doute que la victoire contre les Rebelles y était aussi pour quelque chose.

Le clan avait appris uniquement aux retours des guerriers qu'un raid contre le camp Rebelle avait eu lieu. Les vainqueurs étaient pridelanders et apparemment, seules deux pertes étaient à déplorer. Du côté des adversaires, leur chef était mort et, aux dires des guerriers, plus aucun Rebelles ne subsistaient car tous étaient décédés ou avaient pris la fuite pour les quelques rares survivants.

Bien que les Rebelles n'avaient pas fait parler d'eux depuis un moment, rien ne pouvait assurer qu'ils ne tenteraient pas quelque chose contre Prideland. Alors savoir que cette menace était désormais de l'histoire ancienne, cela avait de quoi vous soulager d'un poids. Et si les guerriers avaient été en première ligne, il y avait une personne que je souhaitais remercier particulièrement.

Je n'eus pas à le chercher pendant très longtemps et puisqu'il était seul, je profitais de l'occasion pour m'approcher de lui.

Bonjour Roi Kupendwa, commençais-je avec mon éternel sourire plaqué sur mon visage. Auriez-vous quelques instants à m'accorder ?

Bien que nous ayons sensiblement le même âge, je ne pouvais m'empêcher de le vouvoyer de par la fonction qu'il occupait. C'était pour moi une marque de respect que je ne me voyais pas outrepasser, quand bien même il me le demanderait.

Il ne se passa que quelques secondes avant que le suzerain du glorieux royaume ne réagisse après que je l'ai interpellé. Tandis qu'il tournait son regard dans ma direction, le Roi me rendit ma salutation. Un sourire se dessina sur son visage et il se tourna complétement vers moi, m'accordant ainsi toute son attention.

Ne souhaitant pas abuser de son temps que j'imaginais sans mal précieux, je ne perdis pas une seconde pour expliquer les raisons de ma présence.

Merci pour votre temps, je n'en abuserai pas, je vous le promets, assurais-je. Bien que, à l'instant même, je me rendais compte que je lui en faisais perdre du temps, en n'allant pas droit au but. Je me reprenais rapidement et expliquais ce pour quoi je souhaitais lui parler.

J'ai appris qu'il y avait eu un raid sur le camp des Rebelles, commençais-je. Comme tout le monde sur Prideland à vrai dire mais je me retins d'ajouter cette précision et me contentais simplement de reprendre ma respiration avant de faire à nouveau entendre ma voix. Grâce à vous, nous avons désormais la certitude qu'ils ne seront plus une menace pour Prideland. Vous avez mis fin à cette affaire et nous pouvons enfin vivre dans la certitude qu'aucun danger ne nous guette les concernant. C'est pourquoi je tenais simplement à vous remercier, concluais-je avec un sourire sincère.

Cela faisait de nombreuses années que les Rebelles causaient du tort à Prideland et Kupendwa resterait à jamais le Roi qui aura mis fin à cette histoire. Il avait ramené la paix dans son royaume et je pensais qu'il s'agissait de ce qu'il y avait de plus noble pour un souverain et que c'était ce qui faisait sa grandeur.

A peine avais-je promis à Kupendwa que je ne le retiendrais pas trop longtemps que celui-ci me répondit avec calme que cela lui faisait plaisir d'avoir de la visite. Et ce qu'il ajouta ensuite me fit rougir instantanément. Bien qu'il s'agissait d'un simple compliment, il fallait avouer que je n'en recevais pas tant que ça de la part des mâles. Je ne pouvais cacher l'effet que cela avait sur moi et qui constituait apparemment à rougir comme une midinette.

Je tâchais de ne pas me focaliser là-dessus et reprenais mes esprits pour expliquer la raison de cet "entretien" que je souhaitais avoir avec le Roi. Tandis que je parlais, je remarquais qu'il avait perdu son sourire mais son air sérieux disparu lui aussi lorsque j'eu terminé. De ce que je pouvais en supposer, il ne devait pas s'attendre à être remercier et c'était exactement la teneur des propos qu'il tint par la suite.

Il accepta mes remerciements tout en appuyant sur le fait que c'était ceux qui avaient combattu qui méritaient réellement d'être félicités. Insistant sur la bravoure des guerriers, le souverain du glorieux royaume termina en disant que certes, Prideland avait connu des moments sombres mais que ceux-ci faisaient désormais partie du passé et que nous pouvions nous concentrer sur l'avenir.

Je ne savais pas vraiment ce que je comptais faire de mon futur si ce n'est continuer ce que je faisais déjà pour le clan mais je savais ce que je voulais faire à présent. Et cela constituait à dire à Kupendwa que j'étais bien consciente de la situation.

Vous avez raison en ce qui concerne les guerriers et ils ont toute ma gratitude, commençais-je pour assurer à sa majesté que je n'étais pas ingrate au point d'oublier ceux qui avait été sur le champ de bataille. Il ne semblait néanmoins pas avoir compris pourquoi c'était lui que je venais voir et je m'attelais à le lui expliquer avec une douceur qui était inné chez moi. Cependant, je tiens réellement à vous remercier vous aussi. Peu importe que vous ayez participé aux combats ou non. C'est vous qui avez pris la décision de mettre ce plan à exécution et je ne doute pas que vous ayez également participé à la mise en place de la stratégie et tout ce qui tourne autour de l'élaboration d'un raid, continuais-je. Je laissais alors quelques secondes au Roi pour assimiler ce que je venais de dire avant de conclure avec un grand sourire. C'est pour ça que je souhaite vous remercier. Parce que vous vous souciez du bien-être de vos sujets et que vous avez fait ce qu'il faut pour qu'ils puissent avoir un avenir meilleur.

Personne ne savait de quoi demain serait fait mais ce dont les pridelanders pouvaient être sûrs désormais, c'est que les Rebelles ne faisaient pas partie de l'histoire. Et tout ceci était du fait des guerriers, de leur cheffe et des hautes sphères du royaume, dont Kupendwa était indéniablement le chef de file.

Après que j'eus fini de parler, quelques secondes s'écoulèrent avant que quoi que ce soit ne se passe. Cela aurait pu être pesant mais le Roi reprit vite contenance ainsi que la parole pour me dire que mes paroles lui allaient droit au coeur. Pour lui, il semblait normal de se soucier de son royaume et il me demanda même ce qu'il serait sans nous tous.

Bien que j'assimilais que cette question était purement rhétorique et qu'elle n'attendais donc pas une réponse de ma part, je ne pu m'empêcher de penser qu'il serait sans doute la même personne bienveillante, juste et fidèle à son clan. Je me gardais cependant d'avouer cela, ne souhaitant plonger mon souverain dans une gène qui n'avait pas sa place dans cette conversation.

Le Chef des pridelanders s'intéressa ensuite à ma personne en me demandant comment j'allais. Il continua en me confiant qu'il avait entendu dire que j'étais une chasseuse d'exception. Ce qui me fit de nouveau rougir. Le Roi venait de me faire un second compliment et c'était au moins un de trop en si peu de temps. Je ne savais plus ce que je devais répondre mais je tentais tout de même de construire une phrase compréhensible.

Eh bien, je... Merci. Ce n'était pas très constructif comme phrase... Je toussais donc légèrement afin de reprendre contenance avant de reprendre. Je vais très bien, merci de vous en soucier. Je suis heureuse de pouvoir vivre sur un territoire tel que Prideland et je profite de chaque jour qui passe pour n'avoir aucun regret. Voilà qui était beaucoup mieux en terme de phrase constructive. Je revenais ensuite sur ce qui m'avait une nouvelle fois fait rougir en essayant de ne pas m'empourprer encore. Je ne sais pas si l'on peut dire que je suis une chasseuse d'exception mais je pense pouvoir affirmer sans me vanter que je suis assez douée. Je laissais quelques secondes s'écouler avant d'enchainer. Cependant, si j'ai pu atteindre un tel niveau, c'est uniquement grâce à celles qui m'ont formé et aussi grâce à mes camarades qui m'accompagnent lors des chasses. Seule, je ne serais pas aussi performante.

Je n'étais pas une personne qui avait des œillères et j'étais parfaitement consciente que si j'en étais là, ce n'était pas uniquement grâce à mes efforts. Oui, je m'étais donné les moyens d'arriver là où j'en étais mais je n'aurais jamais réussi à affuter mes capacités si personne ne m'avait montré la voie.

Bien que les compliments de Kupendwa me faisait rougir, j'appréciais la conversation que nous étions en train d'avoir. Je me permettais donc de prendre à mon tour connaissance de l'état de Kupendwa en lui retournant la question qu'il m'avait posé quelques minutes plus tôt.

Et vous, comment vous portez vous ?

Le Roi m'écouta sans jamais m'interrompre une seule fois. Non pas que je faisais un monologue qui aurait nécessité d'être stoppé mais il aurait très bien pu réagir à l'une de mes phrases sans me laisser continuer. Il n'en fit toutefois rien, ce qui prouvait si cela devait l'être, qu'il était une oreille attentive. Une qualité indispensable selon moi pour être un bon monarque.

Lorsque j'eu fini de parler, Kupendwa ne répondit pas immédiatement à ma question. Avant cela, il fit une remarque sur la qualité des troupes de chasse et cela me chauffa le coeur. J'étais fière de voir que mes compétences, liées à celles de mes camarades, étaient louées et reconnues. Il était bon de se savoir utile et pour la première fois de la conversation, j'avais réussi à entendre ce compliment sans rougir, ce qui, semble t-il, était un exploit !

Le souverain des pridelanders répondit ensuite à ma question en commençant par une petite plaisanterie qui eut le don de m'arracher un rire bref. Je ne m'attendais pas à une réponse aussi légère et l'inattendu m'amusa. Reprenant de son sérieux, le Roi m'expliqua que, comme tous, il était soulagé de savoir que le conflit avec les Rebelles était de l'histoire ancienne, bien qu'il aurait préféré que le sang ne soit pas versé.

Je compatissais à ce qu'il disait. Je ne faisais pas partie de la famille des deux défunts mais elles avaient tout mon soutien. Tout comme ceux qui devraient se remettre des blessures physiques ainsi que celles de l'âme. Ces dernières pouvaient être les plus pernicieuses et j'espérais sincèrement que tous sauraient se remettre et se reconstruire afin de vraiment laisser toute cette histoire derrière nous.

Pour conclure, le mâle ajouta qu'il était ravi que je sois venu discuter avec lui. Le fait qu'il emploie les mots "conversation normale" m'étonna un peu mais je comprenais rapidement ce qu'il voulait dire. Ses conversations habituelles devaient être beaucoup moins légère que celle qu'il avait avec une lionne qui était simplement venu le remercier... Il me demanda ensuite si tout allait bien pour moi et je n'eu pas besoin de réfléchir pour répondre à cette question.

Tout se passe on ne peut mieux pour moi, merci. Mes parents vieillissent mais ils ont encore de belles années devant eux. Ils sont là l'un pour l'autre et pour moi lorsqu'il le faut. J'ai tout ce dont j'ai besoin, des amis sur qui je peux compter et un territoire en paix. Alors vraiment, tout va parfaitement bien, assurais-je avec un sourire sincère et chaleureux.

J'étais consciente de la chance que j'avais d'avoir la vie que je menais. Avec la menace Rebelles éliminée, il n'y avait plus aucune ombre à l'horizon et j'étais optimiste au point de penser que de belles années nous attendaient désormais sur Prideland.

Revenant finalement sur la dernière phrase prononcée par mon interlocuteur, je ne pouvais faire autrement que de le remercier. Ce que je décidais d'ailleurs de faire immédiatement. Je me dois de vous remercier une nouvelle fois, Majesté, dis-je en inclinant légèrement la tête face à ce nouvelles paroles que je prenais comme un compliment. Relevant la tête, je fixais à nouveau mon regard bleuté dans les prunelles orangées de Kupendwa et je repris. Je préfère vivre ma vie à fond et ne rien regretter plutôt que de me torturer l'esprit avec des "Et si ?". Rien de bon ne peut ressortir de ce genre de pensées car quoi qu'il arrive, on ne peut changer ce qui a été fait. S'il s'agit d'une erreur ou d'une mauvaise chose, tout ce que l'on peut faire c'est essayer d'arranger la situation. Et dans la majorité des cas, il suffit d'avoir une discussion honnête, de faire des excuses sincères et d'être présent pour que le temps finisse par faire son œuvre dans la bonne direction.

Suite à cela, je me tus quelques instants et je détournais le regard. Je pensais réellement tout ce que j'avais dit car j'avais parlé avec mon cœur. Celui-ci me dictait aussi de reprendre la parole et c'est pourquoi je regardais à nouveau Kupendwa.

Et si je puis me permettre, si vous avez envie d'avoir une discussion normale, vous pouvez venir me voir quand vous voulez, reprenais-je. Ou demander à ce que je vienne, ajoutais-je rapidement en me disant que le Roi ne pouvait quitter le Rocher à n'importe quel moment à cause de ses responsabilités. Dans ces cas-là, il n'aurait qu'à me faire demander et j'arriverais au plus vite. Je serais toujours libre pour vous, concluais-je avec un léger sourire.

Il n'y avait pas grand chose que je pouvais faire directement pour le Roi alors si cela consistait à passer du temps en sa compagnie pour discuter sur des sujets plus légers que ceux auxquels il pouvait être habitué, eh bien j'étais ravie de pouvoir être cette personne.