Nul doute que cette terre cachait encore bien des secrets... Et bien des beaux mâles. Allongé sur la branche d'un arbre, je me mis à sourire à cette pensée. Ah la la laaaa... Dire que ces pauvres bougres ignoraient encore à quel point leur vie était triste et morne pour le moment. Heureusement que j'allais bientôt y pénétrer pour y ajouter un grains de folie. Hihihi ! Les petits veinards ! Mais pour le moment... C'était le calme plat. Pas âme qui vives ! Pas un seul petit minois pour me rincer l’œil ! C'était inadmissible ! A quoi cela servait-il que je me pomponne s'il n'y avait personne pour m'admirer ?! ... Oh, suis je bête, cela servait toujours. Après tout, une beauté comme la mienne, il fallait l'entretenir. Aaah... Et dire que certain ne s'attardait même pas sur ce genre de chose. Comment faisaient-ils ? Tant de magnifique pelage gâché par manque de soin... Cette pensée me mit presque la larme à l’œil. Aaah ! Ô désespoir, tant de beautés sur lesquels je ne pourrais jamais posé les yeux. Quelle vie injuste !

Dans mon agonie, je sentis quelque chose me tomber dans la crinière. Oh. Ma. Nyumba. Ma crinière ! Ma pauvre et magnifique crinière ! Qu'est-ce qui avait osé effleurer sa magnificence ?! Je passais une patte sur ma mèche. Une brindille et des feuilles.

- .... AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH !

Mon cri de détresse face à une telle infamie résonna dans tout les environs. Non mais ! Là d'où je venais les arbres savaient se tenir ! Ils ne faisaient pas tomber des brindilles sur les honnêtes léopards ! Inadmissible ! Un point d'eau ! Vite, il me fallait un point d'eau ! Hors de question que je reste avec la crinière dans un état si... oh. Mon pauvre cœur. Je l'entendais se briser rien qu'en pensant à mon malheur...

Fort heureusement, Nyumba dans sa grande bonté, et son gout pour les belles choses, était de mon côté. Une rivière traversait cette terre pleine de vie. Je me mis donc à m'admirer et.. Ooooh ! Même avec la crinière dans cet état je restais magnifique. Quelle chanceux je faisais ! Hihihihi ! Je me mis néanmoins à corriger l'affront qui m'avait été fait. Un petit coup de patte par là, un petit coup de patte par-ci et... Aaah ! Voilà ! C'était bien mieux ! J'étais irrésistible... Comme toujours !

Alors que je m'admirais dans l'eau - car après tout me direz-vous, qui ne m’admirerai pas ? - je fus interrompus par une voix. Féminine, pour ma plus grande tristesse. Mais cela faisais si longtemps que je n'avais pas eu de compagnie, hormis la mienne, mais aussi délicieuse soit-elle ce n'était pas assez. Je me retournais donc vers mon interlocutrice, un léger sourire sur les babines, quelque peu amusé par ce que je venais d'entendre. Avec un léger rire, je lâchais :

- J'espère que ce n'est pas vous qu'on envoie en cas d'urgence, Cariña... Cela fait un moment que j'ai cessé de crier, vous êtes en retard. Pero, je me dois de vous contredire, cet endroit n'est pas sécuritaire... Pas pour ma sublime crinière en tout cas.

Et sur ces mots, je passais une patte dans ma mèche soyeuse pour la faire virevolté au vent, pleine de grâce et de majesté. Aaah... C'était si beau. J'en aurais presque la larme à l’œil... Tant de perfection... Mmh ? En parlant de beauté, je me mis à observé la lionne en face de moi avec insistance n'écoutant qu'à moitié ce qu'elle pouvait continuer de dire. Mmh... Pas mal... Un pelage brun, plutôt chaud, ce n'était pas désagréable à regarder. Juste trop... banal ? Peut être qu'avec plus de soin et une attention particulière... Plongé dans mes pensées je me mis à tourner autours de la lionne. Moui. Elle n'était pas laide mais ne sortait pas de l'ordinaire non plus. Cependant... Il devait bien y avoir quelque chose à faire avec ça ! Après tout, rien n'était impossible pour le Grand Aludani, envoyé de Nyumba, porte parole de la Perfection ! Oh non, suis-je bête ! La Perfection, Incarné !

- Dit moi Cariña, comment t'occupes-tu de tu pelage ? Il n'est pas désagréable à regarder mais je suis certains que nous pourrions le rendre plus beau encore... Quizás en le rendant más soyeux y más brillante ?

Je m'assis, tapotant mes lèvres d'une de mes griffes. Nyumba en soit témoin, je ferais de cette lionne banal une œuvre d'art ! Bon, pas à mon niveau, soyons lucide, elle ne l'atteindra jamais, mais un peu au dessus de son niveau actuel en tout cas. Mais... Mais quel impoli il faisait ! Ne lui avait-elle pas posé des questions ? Oh la la la ! Il s'en serait presque baffé... Si ça ne risquait pas d'abimer son faciès.

- Oulah, pardonne moi Cariña ! ¡Tengo la cabeza en otra parte! Soy Aludani ! Pero, tu peux m'appeler la Perfección.

Ah... Quel beau surnom. Et elle ? Son nom ? J'étais certain de l'avoir entendu mais trop perdu dans mes pensées il n'était guère resté...

- Soy un Liard ! Ma madre est une léopard pero mi padre est un lion. Je suis el perfecto équilibre entre los dos. Y... Je ne sais pas por qué je suis ici en particulier... C'est là que Nyumba a guidé mes pas, tout simplement. Nul doute que j'ai une mission à accomplir en este lugar, por elle.

A ces mots, je me mis à regarder les alentours avec un grand sourire, les yeux fermés. Nyumba était ici, je le savais, partout autours de nous. Dans chaque arbre, chaque brin d'herbe, chaque goutte d'eau, chaque bourrasque de vent. Il y avait une raison à ma présence ici... Je ne la connaissais juste pas.

- Pero, pouvons-nous revenir sur un sujet bien plus important pour le moment Cariña ? Como... ton pelage ?

Ah non ! Je n'allais pas en démordre !

Les premières paroles de la lionne me laissèrent pantois, la mine déconfite. Mais je repris bien vite le dessus sur mes émotions, me contentant de la toiser les yeux mis-clos, n'écoutant que d'une oreilles son flux de parole. Comment ?! Comment ne pouvait-elle pas voir que ma sublime beauté était trop nécessaire à ce monde pour risquer de la perdre sur un chant de bataille ?! Et puis, quel était cette mentalité de... de... de sauvage ?! Les mâles à la guerre et les femelles à la chasse et aux bébés ? Voilà qui était bien rétrograde ! Autant pour les uns que pour les autre d'ailleurs.

- Ah ? C'est donc à cela que tu réduis les mâle ? Des brutes qui doivent se battre ? Muy bien. Tienes razón, je ne toucherai pas à ton pelage. Tu ne le mérite pas ! Hmppf ! Et puis si c'est aux mâles de se battre, por qué devrais-je me sentir menacé par les propos d'une lionne ? Ne te prend pas para una guerrera, es el rôle des mâle, pas des femelles. Par Nyumba ! ¡Eres loca !

Je tournais vivement la tête avec dédains avant de répondre à sa question sur les voyageurs.

- Ce que ça fait d'être voyageur ? Et bien on rencontre des lionnes cerrando d'esprit qui te disent que tu dois te battre parce que tu es un mâle, voilà ce ça fait. Imagine un peu, c'est comme si moi je te disais qu'en tant que femelle, tu devrais être en train de chercher un mâle pour porter ses enfants et dédier ta vie à ça. Tsss !

Puis, elle me proposa de la suivre. Mais pour aller où d'abord ? Quand à respecter ce cycle... Nyumba nous l'enseignait également. Pour qui cette lionne me prenait-elle ? Un inculte ? Quelle infamie !

- Te suivre ? Por qué ? Je ne devrais pas plutôt aller me b.... Oooooh....

Je fis une courte pause. Il m'avait semblé... Non, ce serait trop beau.

- Esperas un minuto, tu as bien parlé d'un cousin, mmh ? Cela te dérangerait de me le présenter ?

Mais qui ne tente rien n'a rien après tout. Et puis, il fallait bien que cette rencontre serve à quelque chose... Autre que me vexer, bien sur.

Mes moustaches se frisèrent presque en entendant parler la lionne. Et que dire de ma crinière ! Rien qu'avec le venin sortant de sa gueule de vipère, elle allait réussir à me décoiffer ! Et plus elle parlait, plus j'avais envie de lui enfoncer la tête dans le sol ! ... Mais je risquais de me casser une griffe... Et puis au vue de ses paroles, je préférais ne pas la toucher, pas même avec un bâton. Qui sait ! Son impolitesse était peut être contagieuse ! Yurk ! Non mais ! Déjà me traiter de chochotte n'était guère appréciable, mais si ce n'était que ça ! Alors comme ça, Madame pensait connaitre les dessins de Nyumba ? Quelle lionne pompeuse ! Elle ne la connaissait même pas, j'en étais certain ! Et puis, à part les Enfants de Nyumba, dont je faisais parti, personne ne pouvait ne serait-ce que comprendre un dixième de la volonté de notre Mère. Tsss. Mais le pire était à venir ! Non contente d'insulter Nyumba, elle en était presque à insulter ma...

- ¡Cállate! Ma mama n'était peut être pas une lionne mais au moins, elle a su m'élever correctement contrairement à la tienne qui a miserablemente fracasado à t'apprendre la politesse, pánfila !

Non mais ! En quoi ma Mama valait moins qu'une lionne ? En quoi être un léopard était un mal, ou bien était-ce pire qu'être un lion ? En quoi mon père avait eu tort de suivre ses envies ? En quoi être un liard, fier et digne tel que moi était plus honteux qu'être une lionne insupportable et pourrie jusqu'à la moelle ?!

- ¡Es suficiente! No estoy aqui para oír una leona estupida hablar a me como a un menos que nada.

Les mots allaient plus vite que ma pensée. Mais j'étais énervé et passablement vexé. Je me mis à feuler et ma fourrure se hérissa. Ohlalala ! Dire que je me mettais dans tout mes états pour cette, cette... !

- No lo se como los otros leons te soportan con un carácter así.

Sans réfléchir davantage, je levais une patte pour l'abattre au sol, soulevant une motte de terre que je lançais tout droit en direction du visage de la lionne. Et sans attendre de représailles, je tournais les talons, déguerpissant en fulminant.

- ¡Adios! Y espero nunca te ver de nuevo.

A vrai dire, même pour son propre bien, il était préférable qu'elle en recroise pas mon chemin. Je pouvais me montrer rancunier parfois... Et lorsque c'était le cas, je pouvais devenir une vraie plaie. La lionne ignorait dans quelle jungle de lianes elle avait mit les pattes en me vexant de la sorte.

Pendant plusieurs minutes, je garais un rythme constant, m'éloignant aussi vite et que je le pouvais de la lionne. Je ne ralenti le pas que lorsque je fus certain d'être tranquille. Le tout pour observer l'horizon avec une moue vexée. Et bien, si toutes les femelles de ce pays étaient comme ça, j'avais une excuse en plus pour préférer les mâles !