Ce matin là, l'aube se leva doucement sur le jour que Daren avait attendu toute sa vie. Il s'y était durement préparé, chaque jour, chaque heure. S'il n'était à cause de son handicap pas particulièrement doué pour la chasse, il avait réfléchi à comment subvenir à ses moyens. Il avait trouvé une solution plutôt simple et facile à appliquer. De plus, Daren ne comptait pas s'enfermer dans le grand et vaste Désert, il avait tant de choses à voir, de modes de vies à étudier, de lions à rencontrer. Ceux qui restaient enfermé une année complète dans le Désert ne savaient juste pas ce qu'ils manquaient. Le jeune adolescent ne comptait pas faire cette erreur. Hana, sa mère avait bien du mal à voir son petit dernier, un faiblard au grand coeur, devenu adolescent. Daren le savait, elle redoutait son départ en exil, sans doute d'ailleurs qu'une partie non négligeable du Clan le comptait comme déjà mort. Et qui sait s'il faisait des rencontres intéressantes, peut-être qu'il en serrait mieux ainsi. Daren n'avait besoin d'aucun d'eux, pas un seul d'entre eux ne s'était un jour montré neutre ou courtois en vers lui. Le lion ne pouvait pas indéfiniment cacher qui il était. Peut-être qu'il était temps qu'il prenne un envol définitif. L'ado était parti rejoindre le petit groupe de mâle qui se préparaient à partir en exil. Son regard las et déterminé passa de Jehara, le gamin chanceux, l'adolescence l'avait rendu tellement maigre, il continua son chemin vers Dyami, le colosse barbu, son tyran favori, et il finit sa route sur Helaku, qui tremblotait comme une feuille morte. Daren ne lui donnait pas 3 jours. Même si lui même n'était pas hyper rassuré de partir seul, il n'en montrait rien, conservant une expression décidée et neutre.

C'est alors que ses proches vinrent à lui. Sa mère pleurait, son frère lui fit une accolade et un sourire, il était confiant. Quant à son macho de père il avait al même expression que d'ordinaire, sévère et ronchon. Il ne le ménageait jamais, pour lui c'était lui rendre service. Même si tout au fond de lui même il était fier de voir ce que son fils était devenu. Grand, mince, mais musclé. Pour Ekene il était certain qu'il survivrait à l'exil, il l'avait durement entraîné, mais il y a quelque jours Daren s'était confié à lui, et il n'aimait guère cette révélation. Il n'en avait pas avertir leur mère, encore moins leur père. "Fais attention à toi mon fils, reviens nous, je suis sûre que tu le peux !" murmura maman à son oreille. Ekene lui ne rajouta pas un mot, mais lança un regard tacite à son frère. Quant à Kamau, il ne dit rien lui non plus. Sans un mot de plus, Daren se positionna à côté de Dyami, il était un peu plus petit que lui, et moins musclé, mais tout de même plus que Helaku, et laissa son regard vagabonder sur le Mochanga, qui en cette saison était aussi sec que le sable du Désert. Attendant alors qu'une sourde impatience montait en lui, il commença à labourer les rives du Mochanga des es griffes aiguisées.

Quand tous furent prêts, les adolescents s’élancèrent d'un même mouvement vers leur Avenir. Hana fit son possible pour enregistrer la dernière image qu'elle pouvait avoir de son fils, la crinière en bataille en arrière, par la course, ce corps svelte et musclé, ce moignon, ces grandes prunelles violettes déterminées, le petit bouc. Il était superbe en cet instant, la vieille mère en était très fière. Avant leur départ, Daren avait lancé un dernier regard aux siens, si Hana était persuadée que celui-ci lui était adressé, il n'en était en fait rien, Daren avait en fait lancé une dernière œillade aux deux seules jangowas de son âge qui s'étaient montrées agréables, Huzuni et Hiari. Ce fut ces deux visages agréables, qu'il décida de garder gravés dans l'Esprit, il espérait les revoir. Une nouvelle vie commençait. Un léger sourire se dessina sur son visage.