Depuis un certain temps, mes songes ne s’étaient assimilés à Uhucha, le lion crème qui m’avait proposé de porter son enfant grâce à de cajoleries et d’approches intimes. Malgré mon esprit incommode, ses propos concernant Tahani avaient sensibilisé mon âme en la livrant plus manœuvrable. Malgré la lèche râpeuse qu’il avait déposée sur ma joue après avoir disparu dans la pénombre, mon avis le concernant se retrouvait tiré entre deux côtés et je ne savais pas ce que je pensais de lui. La rencontre fut brève mais son sens paraissait dominant sur la demande. Cependant, en ayant agréé à sa quête, la récompense serait partagée car non seulement il aura l’enfant ô combien désiré mais j’aurai également gagné le combat que je menais depuis fort longtemps.

D’un pas léger, j’accédai rapidement sur Prideland malgré le règne tyrannique des Nyeusis sur ces terres. Je nourrissais l’espoir de trouver une proie lambda sur ces terres malgré le fait de la migration des troupeaux vers le Nord, mais la présence des hyènes ne révélait pas la présence de gibier dans les parages. Sous peine d’être prise dans les filets des hyénidés, mes pattes s’étaient rendues à un endroit plus éloigné du Rocher et le calme ponctuait l’absence d’un prédateur. Basculant le regard vers les côtés, mes yeux s’assuraient de la pénurie et la sérénité m’avait amplement conseillé à rester sur mes gardes.

Finalement, après déduction, je m’étais finement faufilée dans les hautes herbes brunâtres. Mon pelage s’accordait parfaitement bien avec les tiges et mes marques foncées ne me trompaient point, et je considérais cela comme un atout. Le temps orageux affaissait ma toison brune, et le camouflage n’était pas plus qu’adéquat. Après ma longue scrutation des endroits, ma chasse commençait à débuter. Le désir de trouver un gibier pour nourrir un pilier persistait encore et s’enflammait de plus en plus belle dans mon corps et j’étais décidée à ne pas rentrer bredouille. Après avoir rodé sur le site, l’attrait à discerner un butin s’affaiblissait peu à peu. Alors qu’en abandonnant ma convoitise, un bruit vers les hautes-plates attira mon attention et mes oreilles en un déclic se dirigèrent vers le devant pour cerner le fracas. Mes oreilles s’orientèrent vers la direction du geste brusque et mon museau s’était pris peine de se faire guider en se perchant vers le vent. Un autre chahut s’était ponctué par des cornes croissantes aux abords épais qui perçaient l’horizon, et des sabots frottaient le sol. Me tapissant vers le sol, la lueur de mes yeux remerciait cette aubaine. Apparemment, une antilope s’était égarée de son cheptel et certainement, cette péripétie lui coutera la vie. Clopinant à pas de loups, je m’approchais au fur et à mesure du gibier qui broutait sans doute à cause de la fatigue.

En jaillissant les ergots, je me dissimulais dans la flore fauve. J’insistais mon approche vers l’antilope à pattes de velours et je me réjouissais de goûter ce festin et de le partager avec mes semblables, et voir leur estomacs rassasiés ne sera que la récompense la plus souhaitée de ma traque. Cependant, j'avais l'impression d'être observée et ce détail troubla ma partie de chasse et ainsi ma concentration. La gazelle, alertée par un mouvement, avait relevé sa tête dotée de cornes arquées, et regardait de ses yeux les environs. Je m'étais pourtant assurée d'avoir pratiqué les étapes requises...

Ayant été alertée par le mouvement de la gazelle, ma tête commençait à pivoter d’un sens à l’autre pour délecter le fracas qui avait provoqué l’alerte de la gazelle. Malgré avoir beau scellé les environs de mes prunelles, aucune silhouette ne se trouvait en mon champ de vision avant qu’un lion crème ne surgisse des fourrées et ne provoque la fuite du gibier. Regardant la gazelle prise par la peur détaler les plaines, mon regard se crispa quant à mon espérance pour la nourriture. Le mystérieux inconnu se serait bien attiré mes foudres concernant la déroute de la gazelle mais en s’immobilisant sur la cicatrice divisant son regard, un seul nom était perché à ma langue et aussitôt le devisais-je :

« Uhucha… »

Qu’était-il venu faire ici, en pleine nuit et en lieux si hostiles ? Ma présence ici fut uniquement passagère, au risque de mettre en péril ma vie si je me faisais visible aux yeux des Nyeusis ou des hyènes qui commençaient à surveiller les frontières étroitement. Sans doute était-il venu en suivant mes effluves pour chercher son butin. Mon ventre. Le mot m’horrifiait et je tiquais à son entente, mais on m’avait vu jurer de lui donner l’enfant, le sang de mon sang et rien ne pourra éviter cette promesse. Quant à Uhucha, ce dernier portait une importance réfléchie relativement à ce serment, et aussi m’avait-il déjà imposé le choix.

Le lion crème où un sourire s’était peint sur ses babines avait eu la décence d’emboîter le pas. Mes pattes pendant l’instant où Uhucha se rapprochait s’étaient immobilisées, et je regardais le lion se frotter à ma fourrure terreuse avant de tourner dangereusement à mes côtés, en accompagnant ses gestes par un rictus vicieux et avides de désir. Comme le fut pendant notre rencontre passagère au cimetière, il passait sa langue âpre sur mes joues sans doute pour apaiser mon anxiété et ma tension. Ses tourbillonnements se faisaient de plus en plus violents et rapides, et le but de cette danse freinée pour lui n’était que pour me celer et me basculer. En un coup féroce, le borgne me renversa en me faisant perdre l’équilibre et profita de ce moment pour se placer sur mon dos. Je laissais échapper un gémissement muet hors de ma gueule quant à son poids sur mon échine, mais je demeurais patiente. Les lèches suivantes essayaient de calmer mon amertume face à ses griffes lacérant ma chair aussitôt m’habituais-je à ses gestes tantôt mielleux répondants doucereux et tantôt voraces, réclamant l’objet de ses désirs. Un râle de plaisir m’arracha un léger sursaut et instantanément, mon corps essayait en vain de trouver une position confortable.

Pendant le vent d'un instant, Kalahani s'était blâmée pour avoir accepté la proposition d'Uhucha... Mais elle n'avait pas vraiment le choix. Sa bienveillance l'avait rendu manipulable, et le borgne l'avait tout de suite remarqué et ce dernier avait réussi avec brio à tourmenter son esprit pour qu'elle puisse répondre à ses faveurs. Le lion crème semblait voir en elle la mère parfaite pour porter son enfant, et la voir renoncer mettrait le borgne dans une colère noire où il n'hésitera pas à ôter la vie de la femelle. Mais allait-il vraiment prendre le risque ?

Dans l'incommodité de son corps, Kalahani avait su se montrer patiente face à cette inconfortable position, mais allait-elle l'être avec que qui allait se passer ? Le voyageur n'allait pas se montrer doux cette fois-ci, surtout quand il s'agissait de l'être qu'il chérirait le plus au monde. Parfois, une seule fois ne suffisait pas et cela requiert plusieurs essais, mais Uhucha ne souhaitait pas cela. Une seule fois suffirait pour lui.

Ancrant ses griffes dans la chair de Kalahani, Uhucha se fraya un chemin avec brusquerie en elle. La femelle était vidée de toute force, si ce n'était que son corps frêle qui tressaillait au rythme des coups de reins douloureux du borgne au-dessus d'elle. Uhucha ne semblait pas vraiment se soucier du fait que la lionne souffrait de ses mouvements de hanches rapides et douloureux dont il mêlait violence et plaisir : seul le petit l'importait. A l'opposé de Massempo qui maniait ses actes avec tendresse et délicatesse pour ne pas la brusquer, Uhucha ne semblait pas vraiment être prévenant et l'affabilité ne s'était laissé paraître dans ses actions.

Haletante, Kala n'attendait plus que le moment fatidique où le mâle se détachera de son étreinte. Son poids l'écrasait presque, mais il ne fallait pas se débattre : il fallait encore attendre. Mais attendre une fois de plus était l'une des dernières choses que Kalahani souhaitait faire...