La discussion que j’avais eu avec maman au sujet de ma timidité remontait à plusieurs semaines. En y repensant, il fallait admettre que même si je voulais changer, je ne m’y étais pas mise tout de suite. Il m’avait fallu de longs jours pour me décider à tenter le coup. Et une fois décidée, il m’avait encore fallu plusieurs jours pour tout mettre en place. Et aujourd’hui, c’était le grand jour. Il était temps que la petite Huriya toute timide prenne de l’assurance pour parler aux autres et se faire des amis. En plus, j’avais un plan, impossible que ça ne réussisse pas !

Avant de tomber au hasard sur quelqu’un et de devoir improviser, j’avais tout planifié dans ma tête : j’avais choisi avec soin la féline avec laquelle j’allais m'entraîner à discuter, ce que j’allais dire pour commencer, mes réactions face au stress qui monterait assurément et même une excuse pour partir si besoin.

Tout était prêt pour que je réussisse ! Stressée, je faisais les exercices de respiration que l’on m’avait conseillés et lorsque mon cœur cessa de battre la chamade, je m’avançais. Enfin, j’allais me lancer et aborder la lionne du même âge que moi quand une autre petite lionne arriva de nulle part. Je stoppais mon mouvement et reposais ma patte. Allez, ce n’est rien. Respire. Il y aura juste deux personnes au lieu d’une. C’est bien, non ? Si tu y arrives, ça te fera deux amies. Deux, c'est beaucoup mieux que zéro ! Allez Huriya, tu peux le faire ! Je me remotivais mentalement et avant que je ne pense à tout ce qui pourrait mal se passer, j’avançais vers les filles.

J’y avais mis tellement d’entrain que j’arrivais plus rapidement que ce que j’avais prévu et les deux félines ne tardèrent pas à me remarquer. Deux paires d’yeux me regardaient et je sentais déjà une boule se former dans ma gorge. Il fallait que je la combatte mais c’était bien plus dur à dire qu’à faire... Je tentais malgré tout de les saluer et, à ma grande surprise, mes paroles franchirent la barrière de mes lèvres ! Elles répondirent à mon salut et je parvenais à parler pendant quelques minutes jusqu’à ce qu’elles me proposent de venir jouer avec elles. J’aurais pu dire oui mais elles m’avaient dit qu’elles allaient rejoindre d’autres lionceaux et ça, c’était trop pour moi.

Je refusais donc, prétextant que j’étais attendue par mon père. Les filles étaient déçues mais elles m’avaient fait promettre que l’on jouerait ensemble une autre fois. Je ne sais pas comment j’allais réussir cet exploit mais en tout cas, en ce moment, j’étais vraiment très fière de moi ! J’avais suivi les conseils de maman et j’étais parvenu à passer quelques minutes en compagnie d’autres personnes qui n’étaient pas des membres de ma famille ou des amis proches de la famille comme la famille de Kairi et celle de la Reine Ysera.

Contente de mes propres exploits et désireuse de tout raconter à ma mère, je partais à sa recherche. Je savais qu’elle se trouvait ??? aujourd’hui et c’est après avoir repéré son odeur que je me mettais à courir après elle. L’odeur était présente mais elle avait dû passer par ici il y avait un moment déjà car elle n’était pas très forte. D’autres odeurs venaient se mêler à celle que je souhaitais suivre et bientôt, je perdais ma piste. Avisant un arbre proche, j’y grimpais pour tenter d’apercevoir un pelage. J’en apercevais un pas très loin et même si j’avais bien vu par l’absence de tâches qu’il ne s’agissait pas de celui de ma mère, peut être que cette personne l’aurait vu et pourrait me dire par où je pouvais aller.

Je descendais donc de mon arbre pour me diriger vers le félin que j’avais vu. Pleine de courage face à ma réussite précédente, je me sentais capable de demander ma route à cette personne. Ça ne durerait pas longtemps alors je ne voyais pas comment je pourrais ne pas y arriver. Et ça ferait deux discussions que je pourrais mettre du côté des victoires.

Je me rapprochais de plus en plus de mon camarade freelander et j’étais bien visible à quelques mètres de lui quand je compris que quelque chose n’allait pas : je ne l’avais jamais vu, son odeur n’avait rien à voir avec celles des freelanders, il n’avait pas beaucoup de crinière et avait le pelage clair. Grande amatrice d’histoires en tout genre, je savais à qui j’avais affaire et je m’arrêtais dans mon approche. Instinctivement, je baissais les oreilles. J’allais faire demi-tour quand je croisais son regard. J’avais déjà vu des yeux vairons chez Kairi et Kutawala donc je n’étais pas effrayée par le sien. Non, j’étais plutôt captivée et j’en oubliais de partir. Je restais donc plantée là, incapable de bouger ou de faire quoi que ce soit.