Depuis l’arrivée des Nordiques sur le territoire des Freelanders, Vassago était resté bien silencieux et en retrait de tout ce qui se passait. Pour une raison qu’il ignorait, toute cette situation le rendait particulièrement agacé. Il n’avait rien dit quant à l’histoire de Rukkia, pas poussé plus de protestations que ça après le sermon de Chakam et n’avait pas émis plus d’avis sur les Freelanders que ça. Mais il n’en pensait pas moins et rongeait son frein depuis quelques temps. Les lionceaux devaient se faire discrets mais Vassago bouillonnait à l’intérieur. Pour qui se prenaient-ils tous ? Chakam en donneur de leçon, c’était la meilleure. Il n’était pas capable d’identifier un bon élément quand il en avait un sous le nez et avait fait cet affront aux jumeaux devant la royauté. Et quelle royauté. Pas de prestance, pas de charisme, pas de présence, rien du tout. Un beau discours et encore. Vassago s’attendait à beaucoup plus que ça, de la part des deux clans. On ne pouvait pas dire que le lionceau considérait le guide du clan comme un exemple rayonnant. Il s’attendait à bien mieux, il aspirait à bien mieux.

Du haut de sa petite année, les prémices d’une crise d’adolescence particulièrement importante se profilait à l’horizon. Cela faisait plus d’une heure qu’il fixait les allées et venues de chaque lion vivant ici – Nordiques ou Freelanders. À cette surveillance s’accompagnait un mouvement répétitif, creusant le sol de ses griffes comme pour passer sa frustration sur quelque chose. Sa queue fouettait l’air de temps à autre nerveusement. Finalement le peu de patience qui lui restait s’effrita lorsqu’il aperçu un lion s’étaler de tout son long en baillant allégrement alors qu’il n’avait rien fait de la journée.

Agacé, Vassago claqua ses griffes contre le sol en protestant :

« J’en ai marre. »

Il dû surprendre sa sœur, lui qui était silencieux depuis si longtemps. Il avait le visage sévère, colérique même, les traits tirés et ses yeux lançait des éclairs. Il continua sur sa lancée, laissant exploser sa frustration :

« Ce sont tous des loques, des incapables et des idiots, j’en ai assez. »

Et ensuite ? Il en avait assez et c’était très bien de le dire mais que pouvait-il y faire ? Vassago n’était rien de plus qu’un enfant et rien que cela, ça l’agaçait. Il ne grandissait pas assez vite. Finalement boudeur il reprit son activité, griffant de nouveau le sol en marmonnant :

« Ils mériteraient tous qu’on traîne leur museau dans la boue jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus respirer. Qu’est-ce que tu en dis ? Surtout l’autre tâche sur pattes là. »

Bien évidemment il parlait de cette chose qui avait osé menacer sa sœur. Et dire qu’elle se baladait tranquillement après ce qui était arrivé. Vassago vivait cela comme une véritable offense.

Ce n'était pas dans les habitudes de Vassago d'être calme et de rongé son frein, Rukkia le savait. Pourtant, c'était ce que son frère s'acharnait à faire depuis leur arrivée sur Freeland. Et ça se voyait. Le jeune lion labourait la terre comme si elle l'avait insulté lui et toute sa famille. Rukkia aussi était peu satisfaite de ce voyage : la créature tacheté qui avait menacé de la kidnapper était toujours libre, la Reine Ysera était une déception, Chakam les avait humilié elle et son frère. Bref. Rien n'allait. Mais l'enfant évacuait sa frustration d'une manière différente de son frère : allongée, la queue battant la mesure et portant un intérêt tout particulier à ses griffes qu'elle nettoyait avec minutie. Soudain, sa toilette fut interrompus par la voix de Vassago visiblement incapable de se retenir davantage. Rukkia jeta un coup d’œil aux alentours, leur parents bien que pas très loin, n'étaient pas à porté d'oreilles et aucun adulte n'avait l'air de porté attention à eux. Bien. Ils pouvaient donc avoir une discussion sérieuse sans risquer d'être interrompus. Depuis leur entrevue avec Chakam, Rukkia préférait faire preuve de prudence, pas que le Guide lui faisait peur ou même représentait une quelconque autorité à ses yeux, mais ils avaient les mieux avoir les adultes avec soit que contre soit.

Écoutant calmement son frère, la petite Nordique sentit son poil se hérisser lorsqu'il mentionna "la Bête". Rukkia feula presque en lui répondant.

- M'en parle pas. Elle a de la chance que personne veuille me croire parce que je suis petite, mais elle verra quand je serais grande et qu'on m'écoutera ! Je ferais en sorte que son propre clan lui fasse avaler sa queue.

Quoi ? Elle n'allait quand même pas le faire elle-même, c'était beaucoup trop salissant. En toute honnêteté, il n'était pas non plus certain que personne ne croyait Rukkia. Leur mère n'avait certes pas fait de scène lors de la rencontre avec les Freelanders mais elle n'était pas ressortie de son entrevue avec Koliya parfaitement rassurée.

- Quoi que je suis même pas sûre que son clan soit capable de ça, y a qu'à voir leur Reine. Elle est nulle et molle, ça se voit tout de suite. D'un autre côté, elle s'accorde bien avec Chakam, lui il est nul, mou et aveugle en plus.

Décidément, Rukkia ne s'était remise ni de la déception qu'avait été "Ysera" ni de l'insulte que Chakam leur avait faite à son frère et elle. Un jour, ça se paierai...

- Je me demande pourquoi Papa et Maman il l'écoute, ils feraient de bien meilleurs chefs !

Voilà qui dépassait la compréhension de Rukkia. Selon elle, c'était au plus compétent de diriger. Pas à la majorité : la majorité est pleine d'idiots. Il n'y avait qu'à voir le clan des Nordiques. Des lâches, des fainéants et des idiots. Ils iraient loin comme ça, tiens !

En dépit de sa propre frustration, la petite lionne était désireuse de remonter le moral de son frère. Avec un sourire amical au lève, Rukkia s'approcha de Vassago.

- Ceci dit, je les étoufferais pas tous si j'étais toi, c'est peut être des loques et des idiots, mais c'est pour ça qu'on peut les mener par le bouts du museau.

Fit-elle en donnant un coup de coude amical à son frère.

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La réaction de sa sœur fut immédiate – elle feula tout de suite et son poil se hérissa à la simple mention du personnage affable qui lui avait fait vivre une si mauvaise expérience. Vassago la croyait et il jugea que pour le moment c’était le plus important. Sa sœur avait eu de la chance de s’en être sortie sans pépin – maintenant elle savait qu’il fallait redoubler de prudence avec ces individus.

« Ce clan est un ramassis de chiffes molles, il n’y en a vraiment pas un pour rattraper l’autre. »

À la question de Rukkia, Vassago se contenta de hausser les épaules avant de rétorquer :

« Maman et Papa ne veulent pas de problème. Ils ont assez à gérer avec nous et le fait que les autres adultes soient incapables de nous tenir tête ou de nous supporter sans cafter à M’sieur l’guide. »

Vassago cracha presque la fin de sa phrase – oui Chakam l’avait énervé et il n’était pas près de s’en remettre. La fierté du petit mâle était blessée et il en faudrait beaucoup pour que ce dernier soit apte à pardonner. Pour le reste, Vassago ne se plaçait pas en responsable du mutisme de ses parents mais il considérait qu’ils avaient mieux à faire que de s’occuper d’un clan qui n’avait aucune ambition. Le fait de devoir gérer les plaintes des uns et des autres au sujet des lionceaux étaient déjà une épreuve en soi. Imaginer un défilé d’adulte chouinant à tout va, rien que ça donnait la nausée à Vassago.

Sa sœur réussit tout de même à lui arracher un sourire – mauvais – mais un sourire quand même lorsqu’elle balança sa réplique. Ils avaient beau ne pas toujours traîner ensemble, bien que cela soit très rare, ils ne pouvaient décemment pas se passer l’un de l’autre. Vassago ne l’admettrait probablement pas mais il ne serait pas aussi déterminé sans sa sœur à ses côtés.

« Ah ! Tu as raison. Faut bien que certains puissent servir à quelque chose bien que suivant les individus, je ne vois pas trop l’intérêt qu’ils pourraient avoir pour nous. »

Bien évidemment une liste de nom défilait déjà dans son esprit – des éléments bons à jeter comme à garder bien qu’il y en ait plus à balancer aux oubliettes. Vassago se demandait comment c’était possible – en tant que prédateur au sommet de la chaîne alimentaire – de se laisser autant aller et porter par le vent. Que cela concerne les Freelanders ou les Nordiques, c’était le même combat. Et encore, les Nordiques étaient dans un cas où ils étaient juste nomades, sans territoire propre à gouverner qui ne soit pas hostile envers eux, environnementalement parlant.

Il se mura à nouveau dans un silence contemplatif qui dura quelques minutes avant de tourner le regard vers sa sœur, plus déterminé que jamais :

« On vaut mieux que tout ça, Rukkia. Il nous faut un plan, immédiat mais aussi sur la durée. »

Vassago espérait que l’ambition de Rukkia serait aussi dévorante que la sienne.

Devant la réponse de Vassago concernant leurs parents, Rukkia pris une mine songeuse. Effectivement, vu comme ça... La petite Nordique plaqua ses oreilles en arrière, cette bande de larve poilus était incapable de gérer des enfants et pourtant, ils se disaient adultes et plus responsable que le duo. Pa-thé-ti-que. Tout simplement, pathétique. Mais bon, au moins l'enfant avait réussis à remonter le moral de son frère et c'était une victoire en soit. Vassago reprit la parole et sa sœur l'écouta sans dire un mot. Elle partageait l'avis de Vassago sur beaucoup de choses mais pas son point de vue sur le fait que certains individus ne leur servirait à rien. N'importe qui peut servir à quelque chose, pour peu qu'on sache comme l'utiliser, un peu comme un outils. Ceci dit, elle pouvait comprendre où voulait en venir son frère, aussi ne l'interrompis ou ne le repris-t-elle pas. Au leu de ça, elle laissa son camarade d'infortune aller au bout de sa pensée.

Un plan, hein ? Un sourire mauvais se dessiner sur les babines de Rukkia. Évidemment que le duo valait mieux que tous ces bons à rien sans ambition. Mais voilà, le duo avait un problème : leur jeunesse. Personne ne les prenait au sérieux à cause de leur jeune âge, au plus grand malheur de la petite Nordique.

- Je pense...

Fit-elle après plusieurs secondes de silence.

- Je pense que si "ce clan est un ramassis de chiffes molles" c'est parce que les lions qui le guides ne le font pas comme il faut. Ils ne savent pas où ils vont ou pourquoi, ils n'ont aucun objectif et se laissent porter. Ils sont même incapable de différencier un bon élément d'un mauvais !

Leur parents leur avaient raconté mainte et mainte fois les légendes du Nord, à quel point leur clan était autrefois peuplé de lion aussi sages que puissants. Mais ça... Ça, c'était avant. Lorsque le clan avait un vrai chef et suivait une vraie autorité. Quand il n'était pas encore peuplé de chiffes molles qui préféraient vagabonder les esprits seuls savaient où, sans chercher à se réapproprier leur héritage ou leur propre terre. Rukkia n'avait rien contre l'idée d'être ouverte aux autres clans, mais elle n'aimait pas le l'idée d'en dépendre. Car pour le moment, c'était ce que faisait les Nordiques, ils se baladaient sans but, en s'inclinant devant tous les clan qu'ils croisaient dans l'espoir d'être accepter sur leur terre. Ils s'inclinaient tant et tant que leur fourrure censé être aussi blanche que la neige des sommet finirait souillé par toutes les saleté environnante !

- Ils ont besoin d'un chef. D'un vrai chef.

Et Chakam n'en était pas un, se répétait Rukkia en fixant ses pattes.

- Ou peut être...

Le lionceau releva la tête vers son frère. Puisque ni leur père, ni leur mère ne pouvait prendre la place de chef, pour la raison que Vassago avant déjà évoquée, il ne restait pas beaucoup de solution.

- De deux.

Rukkia n'était pas partageuse de nature, mais avec Vassago, c'était une toute autre histoire. Sans doute parce que son ambition nourrissait la sienne et inversement. Bien entendu, la petite lionne était consciente que son idée ne pouvait pas aboutir, pas tout de suite du moins... Mais son frère n'avait-il par parler de plan sur la durée ?

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Il était évident que le guide du clan des Nordiques était un incapable et qu’il était en partie responsable de la déchéance du clan mais pouvait-on réellement porter le blâme uniquement sur Chakam ? Les Nordiques se complaisaient de leur situation depuis trop longtemps et même si les histoires racontaient de merveilleux passages sur les lions du Nord, peuple sage et fier, gardien de la montagne, ils n’étaient rien de plus que des fantômes. Exclus au fin fond de leur montagne. Chouette. Néanmoins, à la suite du discours de Rukkia, les oreilles de Vassago s’agitèrent avec intérêt. Un petit sourire malveillant se dessina au coin de ses babines et son regard sanglant se figea sur sa sœur :

« Continue. »

La suite n’en fut qu’autrement plus palpitante et le sourire de Vassago ne put que s’élargir davantage. Sa sœur savait parfaitement comment lui parler et elle savait aussi quelle était la flamme qui animait Vassago. Une flamme partagée et l’idée ne lui déplaisait pas. Sa sœur et lui étaient suffisamment différents pour pouvoir se tailler la part du butin chacun à leur façon et en étant tous les deux satisfaits. Parfaitement complémentaires, voilà ce qu’ils étaient. Il ne se priva pas de valoriser sa sœur :

« J’aime toujours autant tes idées. »

Mais ce n’était pas suffisant. Sa sœur faisant dans le politique – le politiquement correct même ou du moins le politiquement vicieux. Vassago était vicieux aussi mais avez beaucoup moins de tact et de délicatesse que sa sœur. Il suffisait de voir ce que l’entrevue avec Chakam avait donné. Celui là alors, il ne perdait rien pour attendre. Quand Vassago sera en âge de lui parler en le regardant droit dans les yeux, on verra lequel des deux se fera dessus. Il fallait absolument redorer le blason des Nordiques – hors de question de continuer à passer pour … ça.

« Ils ont besoin plus que d’un chef, ou même deux. Ils ont besoin d’ambition eux aussi. Pas assez pour nous écraser mais suffisamment pour faire des Nordiques un véritable clan. »

Vassago continua dans ses divagations, faisant part ouvertement de ses rêves de gloire, de pouvoir et de grandeur à sa sœur. Son ambition le dévorait de l’intérieur mais cela lui donnait une grande force vitale aussi, cela l’animait, c’était comme voir une flamme s’agiter dans ses yeux à chaque fois qu’il évoquait le sujet. Il avait beau être jeune, il était sérieux et comptait bien aller au bout de ses envies qui en feraient cauchemarder plus d’un.

« Nous étions tellement plus autrefois. Et même là ce n’était pas encore assez. Des lions sages cloîtrés dans leurs montagnes, ça ne fait rêver qu’à moitié. Les Nordiques devraient être une puissance à part entière. »

Avec un mouvement ferme, Vassago écrasa sa patte sur le sol comme pour illustrer ses propos :
« Nous devrions tous les écraser. »

Et par tous, il entendait tous les clans bien entendu. Il se ferait une joie de maîtriser les arts du combat et de la guerre. La manipulation et tout ce qui s’en suivrait également, la politique de fond pour épauler sa sœur, mais il lui laisserait en très grande partie. Les jeux où on tourne pendant quinze ans autour du pot, ce n’était pas son fort. S’ils avaient un plan tous les deux sur la durée, il fallait pouvoir commencer maintenant en connaissant les faiblesses de leurs ennemis. Parce que oui, les Nordiques n'avaient pas d’alliés – on leur faisait simplement la charité et c’est une notion vraiment dégradante aux yeux de Vassago. Plissant les yeux, il se pencha vers sa sœur afin de pouvoir parler avec plus d’intimité :

« Pour les Freelanders, on pourrait essayer de semer la discorde de l’intérieur ? T’as déjà commencé avec l’autre pistache. Je suis sûr qu’on peut continuer. Autant les fragiliser tant que nous sommes là. »

Apparemment, l'idée plaisait à son frère. Rukkia releva fièrement la tête, charmée de voir sa proposition ainsi valorisé. Rien de tel pour la brosser dans le sens du poil, les compliment. Vassago reprit la parole rapidement et sa sœur ne put qu'opiner du chef. Pour le coup, elle ne pouvait contredire son frère, elle partageait son avis. Et lui non plus ne manquait pas d'ambition.

- Un empire au lieu d'un simple Royaume... Tu sais comment me parler toi !

L'enfant eu un rire qui, malheureusement, s'éteignit rapidement à son grand désarroi lorsque Vassago proposa de rependre le chaos dans les rangs des Freelanders.

- On peut essayer mais ça n'a pas donné grand chose la dernière fois. Toi, Papa et Maman vous me croyez mais les autres... C'est toujours la même rengaine, tu n'es qu'un lionceau, tu ne comprend rien blablablaaaaaa. Comme s'ils savaient mieux que moi ce qui c'était passé !

C'était blessant de ne pas être prise au sérieux par des adultes sous prétexte qu'elle était jeune. Ce n'est pas parce qu'elle n'était qu'un lionceau qu'elle était stupide, bien au contraire ! C'était eux qui ne comprenaient rien...

- Je peux continuer de prévenir le clan du danger que représente les Freelander mais... J'ai promis à Maman de ne plus causer de problème alors je ne peux pas non plus le hurler sur tous les toits. Je ne veux pas que qui que ce soit lui reparle comme ils l'ont fait quand on a rencontré les Freelanders.

Et le prochain qui oserais agir de la sorte verrait toutes les foudre du Nord s'abattre sur lui. Rukkia était jeune et avant encore la taille d'un moustique, mais elle était teigneuse, très teigneuse, et surtout rancunière. Le visage de la liarde qui avait faillit l'enlever et du bon toutou qui était venu à sa rescousse était graver dans son esprit. Ces deux là seraient les premier à payer. Lorsque le moment viendra de les écraser, Rukkia sera au première loge pour les voir s’effondrer devant la réalisation que leur vie n'avait été qu'un gâchis inutile et que tout ce qu'ils avaient essayé de bâtir tombait en poussière. Tout ceux qu'ils avaient aimer ne se souviendrait d'eux que comme des erreurs, la petite Nordique s'assurerait de ça personnellement.

- Ils ont l'air de se faire confiance aveuglement. Ça leur ferait d'autant plus mal de briser cette confiance...

Fit Rukkia dont l'envie de revanche envahissait tout le corps. Elle planta ses griffes fermement dans le sol, rêvant de les planter autre part.

- Mais on peut pas pour l'instant. Personne nous croirait. Pour arriver à faire ça, il nous faudrait quelque chose de gros et je ne sais pas encore quoi. Mais je sais que Maman dit toujours qu'il faut connaitre sa proie pour l'abattre. On ne sait pas encore assez de chose sur les Freelanders... Il faut changer ça et pour ça, il faut faire profil bas, se montrer poli et curieux. Faire ami-ami jusqu'à ce qu'on apprenne tout ce qu'il pourrait nous cacher. S'ils sont suffisamment idiots pour ignorer le danger qui se cache dans leur propre clan, ils ne pourront pas nous soupçonner de préparer le chute.

Prendre son mal en patience, accumuler les informations pour les ressortir au moment opportun, se faire des alliés pour leur planter les griffes dans le dos dès qu'ils montreront un moment de faiblesse... Ce plan ne plairait peut-être pas à Vassago mais Rukkia n'y voyait que des avantages. La petite Nordique ne s'en rendait pas encore compte mais doucement, s'enracinait une manière penser qui allait la guider toute sa vie. Tout le monde à ses secrets, découvrez ceux d'un lion et il deviendra un pantin facile à manipuler.

- Ils ont dit qu'ils ne contrôlaient pas les gorilles.

Marmonna la petite lionne, repensant à leur aventure dans la Jungle et à la discussion lors de la rencontre avec Ysera. Voilà la première information sur les faiblesses du clan qu'elle avait récupérer, un jour, cette information causerait peut-être la perte des lions des terres libres.

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« Hm ? … Nan, j’te parle pas d’utiliser la même histoire, je te parle de trouver le linge sale de quelqu’un d’autre à déballer devant tout ce ramassis d’insectes. Une réputation ça se ruine. Pourquoi se contenter simplement de l’autre hybride ? »

Et cette remarque était un poil raciste. Dix points pour les Nordiques. Non ? Mauvais jeu ? Peu importe. Vassago trouvait que toutes les excuses étaient bonnes pour dénigrer cet animal et ne se priverait pas, peu importe à quel point la remarque pourrait être blessante. Cette chose s’en était prise à sa famille. Sa sœur. Sa mère. Il fallait être complètement inconscient pour se mettre à dos les jumeaux, mais impliquer l’un des parents ? Une pure envie suicidaire.

La suite du discours de Rukkia manqua d’envoyer Vassago chez les Grands Esprits plus tôt que prévu.

« Poli et curieux ? Faire ami-ami ?! »

Il s’étrangla presque en répétant les paroles de sa sœur. Elle l’avait bien regardé ? Ses yeux ronds et son air abasourdi devait bien lui faire comprendre qu’il était hors de question pour le petit mâle de se laisser aller de cette façon. Il respectait la patience et la méthode de sa sœur mais était parfaitement incapable de faire de même. Il se racla la gorge avant de se reprendre :

« Écoute, j’comprends tu veux pas attirer d’ennuis à Maman et je t’assure que moi non plus. Mais je te laisse la grande diplomatie. J’ai d’autres choses en tête. »

Rien que d’imaginer devoir se montrer mielleux et sympathiser, nouer des liens avec ces lions dont il détestait chaque particule. Un frisson de dégoût le parcouru, ça le dégoûtait sincèrement. Vassago savait qu’il faudrait en passer par là, mais pour le moment et avec les récents événements, il n’en avait pas envie. Un jour il se reprendrait pour le bien commun – qui se résumait à sa sœur et lui – mais pour le moment il fallait juste le laisser tranquille.

Il fronça les sourcils en entendant sa sœur marmonner. Elle avait déjà des informations juteuses pour leur plan ? Quand il réussit à entendre ce qu’elle prononça, un souvenir lui revint en tête. Les gorilles, c’était vraiment des créatures particulières :

« Comment tu veux contrôler des monstres pareils ? Même nous, nous sommes plus tenables que ça. »

Et c’était peu dire ! Néanmoins, la remarque de Rukkia entama de faire réfléchir Vassago. Son cerveau fusait dans tous les sens, il se régalait du chaos qu’il pourrait semer et adorait élaborer des plans tous plus tordus les uns que les autres, germant d’idées noires et cruelles. Il tourna de nouveau la tête vers Rukkia pour lui demander :

« Tu crois que les gorilles sont contents de la situation ? » - conscient qu’il ne s’exprimait pas avec clarté, il enchaîna rapidement pour compléter ses propos - « J’veux dire, c’est quoi, un accord silencieux entre les lions et les singes, un truc comme ça ? Ou ils sont juste arrivés comme ça en posant leurs grosses fesses et en ne laissant pas le choix aux gorilles ? »

En vérité, cela ne surprendrait pas Vassago mais c’était un sujet de discorde qui pourrait être amené, à supposer qu’une entrevue avec les primates soit seulement possible. À supposer qu’ils maîtrisent seulement l’art du langage.

Vassago laissa en suspens ce sujet pour en amener un autre sur le tapis – toutes les possibilités devaient être envisager et il était impatient de pouvoir en évoquer un maximum avec sa jumelle.

« T’en penses quoi de la reine d’ailleurs ? J’adorerais faire flancher la royauté avec une sale rumeur. »

Comme Rukkia s'y attendait, son frère n'était pas très fan de l'idée "pacifique" de sa sœur. Rien d'étonnant. Des deux, Vassago était le plus rentre dedans. Rukkia, bien qu'elle ait encore beaucoup de chose à apprendre, n'aimait pas se salir les pattes et préférait donc les mots. Devant la réaction de son double aux yeux de sang, la petite Nordique ne put se retenir de rire.

- Ça me va. C'est moi qui ait promis à Maman, pas toi. Tu pourras toujours compter sur mon soutien, juste... Pas aussi visiblement que d'habitude.

Conclut-elle avec un clin d’œil. Si elle voulait se faire passer pour une gentille petite fille innocente, mieux valait commencer le plus tôt possible. Et ça signifiait ne plus être associé avec les problèmes qui pouvaient subvenir dans le clan, même si ces problèmes venaient de son frère. Ça ne l'empêcherait bien sûr pas de le couvrir ou le défendre, mais elle ne participerait plus à ses plans. Plus directement en tout cas.

Vassago revint rapidement sur le sujet des gorilles, se demandant comment pouvait fonctionner l'accord entre les lions et les grands singes. Rukkia siffla entre ses crocs, il n'aurait pas été improbable que les lions se soient simplement installés mais au vue de la mollesse des Freelanders, les gorilles n'avaient pas dû beaucoup résister. Qui sait, peut-être que la jungle leur suffisait ? Mais même si c'était le cas, vu la réaction de ceux qu'ils avaient croisés avec Aniu, il ne devait pas particulièrement aimé la présence de félin dans leur jungle. Sans doute y avait-il moyen de jouet là dessus... En faisant remarquer que les Freelanders ne les respectait pas ? Après tout, à les entendre, la jungle des gorilles étaient à eux, ils lassaient gracieusement les grand singe y vivre.

- Je sais pas. C'est pour ça qu'on doit apprendre à les connaitre.

Puis revint le sujet d'Ysera.

- Tu dis ça comme si elle méritait ce titre. Ça à l'air d'être une loque. Mais une loque avec des sujet loyaux. Je ne sais pas si une rumeur suffirait à entacher son règne... Les Freelanders ont l'air trop stupides pour penser par eux même. Ils laissent le soin de réfléchir à leurs supérieurs et se contentent d'être de bon petit soldat.

Comme les Nordiques, ils manquaient cruellement d'ambition. Sans doute était-ce pour ça qu'Ysera avait pu obtenir et conserver son titre de Reine.

- Les seuls auprès desquels ont pourrait salir sa réputation, ce sont les autres clans mais je suis pas sûr que ce soit très ut...

Rukkia s'interrompit dans sa phrase. Au contraire. Avec une réputation suffisamment salie auprès des autres clan, Freeland se retrouverait isolé, affaibli. Cela valait pour n'importe quel clan d'ailleurs. Si chacun se mettait à dos ses voisins pour X ou Y raison... Et bien, qui sait ce que cela pourrait donner. La petite Nordique porta une griffe à son menton. Difficile de dire s'il était possible d'ouvrir les yeux au clan des Montagne concernant leurs hôtes... Tous semblaient bien trop tenir à cette pseudo alliance entre les Nordiques et les Freelanders. Les poils de Rukkia se hérissèrent. Une alliance ? Tu parles. Les lions libres faisaient simplement la charité à un clan sur le déclin qui n'avait rien à offrir en retour. Ils voulaient se donner une bonne conscience, c'était évident.

- Tu as une idée du genre de rumeurs qui pourrait marcher ?

Demanda Rukkia à son frère, le regard plongé dans le vide.

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« Eh bien, elle n’a de reine que le nom, ce n’est pas bien difficile de se faire affubler d’un titre sans en avoir l’étoffe. Regarde Chakam. Lui et la reine de Freeland semble être taillés dans le même bois. Un bois pourri. » cracha le lionceau avec véhémence.

Le lionceau ne mâchait pas ses mots, sa sœur était bien placée pour le savoir – il n’aimait pas déguiser ses paroles et allait toujours droit au but. Il avait son opinion bien tranchée, ne demandait pas à ce que les autres y adhèrent, mais simplement à ce que l’on ne cherche pas à le faire changer d’avis. De toute façon il se savait bien supérieur aux autres, il réfléchissait plus et ne se contentait pas de regarder ces insectes passer sans la moindre réaction.

Un élan de fierté le traversa quand Rukkia s’arrêta dans ses propos, reconsidérant la proposition de Vassago. De véritables démons en puissance, bien que Rukkia soit pour l’instant en retrait de tout ceci, l’idée ne semblait pas lui déplaire. Cela attisa l’impatience du lionceau mâle qui avait terriblement hâte de semer la zizanie dans ce clan de dégénérés mentaux. Des idées ? Bien sûr qu’il en avait, mais il en fallait une qui pourrait impliquer sa sœur, tout en prenant en compte les contraintes auxquelles elle devrait faire face. Vassago se savait assoiffé de chaos, il en était de même pour sa sœur mais c’était une soif qui ne pouvait pas se satisfaire de la même façon.

« Les manquements diplomatiques sont les rumeurs les plus susceptibles de faire flancher un clan. Je suis certain que la "reine" de Freeland n’est pas blanche comme neige. » Il marqua une pause avant de lâcher en raillant, fier de sa propre blague : « Pas autant que nous en tout cas ! »

« Si les gorilles ne trouvent pas leur compte dans cette cohabitation, cela peut tourner à notre avantage. J’ai entendu une vague histoire de hyènes dans le coin aussi. La question est à creuser, autant que la discorde est à semer. Déclencher un conflit sanglant me ferait grandement plaisir. Ce serait une juste vengeance. » déclara le lionceau d’un air mauvais.

Nul doute que Vassago aurait de quoi s’occuper pendant leur séjour sur les terres libres. Quant à cette histoire de vengeance, eh bien il fallait l’avouer : le lionceau vivait mal la punition de sa sœur. Oui, être obligé de se faire discret était une punition. Elle n’aurait pas l’occasion de participer à toutes les machinations de son frère et cela le désolait grandement. Quant à la volonté de voir le sang couler, il fallait être rassuré tout de suite, le lionceau ne réclamait pas que la Mort vienne rendre visite aux Freelanders. Seulement des blessures graves qui entraîneraient de lourdes conséquences pour la monarchie en place dans ce stupide patelin.

Ah ! Quel joie de constater que Vassago n'était jamais à court d'idée pour semer le chaos ! Malheureusement, il leur faudrait attendre. Rukkia n'avait pas encore l'influence nécessaire pour que ses mots aient l'impact qu'ils désiraient et son frère n'était pas encore suffisamment fort physiquement pour mener les combats épiques dont il rêvait. Mais il le serait un jour... Et plus tôt que beaucoup de leurs semblables, la lionne aux yeux cyan n'en doutait pas une seule seconde. Son seul regret était qu'à présent, elle ne pourrait plus se tenir au côté de son frère et devrait de contenter d'observer le chaos se répandre de loin. ... Ou presque. A bien y réfléchir, c'était un mal pour un bien. Elle n'avait plus à se salir les pattes et pourrait contempler les évènements depuis son trône de glace. Et puis, quelqu'un devrait couvrir ce cher Vassago pour qu'il puisse vaquer à ses occupations sans risque. Rukkia ne disparaitrait pas de la scène, elle la maitriserait différemment, c'était tout.

Non loin du trône de la Dame du Nord, se tiendrait toujours fièrement son Chevalier.

- Une juste vengeance, oui.

Fit Rukkia, un léger sourire sur les babines. Que le Freelanders, leur Reine et leur kidnappeuse de lionceaux profitent de leurs instants de paix car ceux-ci étaient comptés. Bientôt, les beaux jours laisseraient place à une tempête déchainées digne de la furie du Grand Nord.

Un soupir s'échappa des lèvre de Rukkia alors qu'elle levait son regard cyan vers le ciel. Ils parlaient, parlaient, et le temps passait. La petite lionne se remis sur ses pattes.

- J'ai promis à Maman de faire une leçon de chasse avec elle aujourd'hui. Je devrais y aller...

Évidemment, Mara n'avait l'intention de placer sa fille face à une proie. Mais elle pouvait déjà s'entrainer à pister, reconnaitre les animaux ou encore se faire discrète. D'un pas lent, la petite vint doucement frotter sa tête contre celle de son frère en ronronnant. Cette conversation lui avait fait du bien et elle espérait que c'était réciproque. Alors qu'elle mettait fin à son geste d'affection et s'apprêtait à repartir, Rukkia demanda à son frère :

- Tu rentres avec moi ?

Un sourire, sincère pour une fois, accompagnait son invitation.

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