J'étais euphorique ! Tous les signes ne pouvaient avoir qu'une seule signification. Cela m'avait d'abord étonnée avant de me remplir d'une joie immense. J'avais gardé cela pour moi avant d'en être complétement certaine et, dès lors que ce fut le cas, je l'avais annoncé à Wakiza. Sa réaction fut bien plus importante que ce que j'avais imaginé : il avait bondit de joie, me serrant contre lui à m'en couper le souffle. Sa joie était à l'image de la mienne : sans limite.

Et maintenant que mon compagnon était au courant, il y avait une autre personne à qui je voulais l'annoncer avant que la rumeur ne se propage à travers le clan. Une lionne qui, au fil de nos discutions, était devenue une amie très proche. Je savais qu'une ombre pesait sur son cœur parce qu'elle ne parvenait pas à avoir de lionceau avec Alhef. Mais je savais aussi qu'elle ne m'en voudrait pas d'avoir réussi après seulement quelques mois de relation alors que ça faisait des années qu'elle essayait de son côté. Au contraire, je pensais qu'elle serait contente pour moi car cela annonçait le renouveau du clan.

Après un dernier geste tendre pour mon compagnon, je le laissais pour partir à la recherche de mon amie aux jolies marques. Il me fallu presque une heure pour la trouver mais je fini par tomber sur un Nordique qui venait de la voir s'éloigner. J'entrepris de la suivre après avoir demandé quelle direction elle avait prise et accélérais le pas, sans courir pour autant.

Je ne tardais pas à apercevoir sa silhouette et, après avoir pressé le pas encore un peu, je fini par être à une distance convenable pour pouvoir la héler.

Bonjour Taygha ! Comment vas-tu ?

Le tutoiement était venu naturellement. Je l'avais certes vouvoyée jusqu'à maintenant mais, étant donné que notre amitié avait grandie, je gageais que je pouvais laisser tomber le vouvoiement, bien que je la respectais toujours autant. De plus, j'étais persuadée que si cela la dérangeait, elle me le ferait remarquer.

Lorsqu'elle entendit ma voix, Taygha s'arrêta. Un sourire illumine son visage dès lors qu'elle me voit et je ne peux m'empêcher de sourire à mon tour. Alors que mon amie me demande la raison de ma joie, je me demande de quelle façon elle réagira. Elle qui essayait d'avoir une descendance depuis plusieurs mois voire années avec Alhef, elle n'y était toujours pas parvenu. Comment prendrait elle donc le fait que, de mon côté, j'étais déjà gestante après seulement quelques mois de vie commune avec Wakiza et seulement quelques essais ? Je balayais bien vite mes craintes, persuadée que, même si elle éprouverait sans doute une légère jalousie - chose dont je ne l'accablerait pas car j'aurais sans doute réagis ainsi si les situations avaient été inversées - elle serait tout de même heureuse pour moi et pour le Nord en général.

Ne laissant pas le silence planer plus longtemps, j'entrepris de lui répondre alors que je m'asseyais face à elle après avoir réduit la distance qui nous séparait encore.

J'ai une très heureuse nouvelle à te confier ! Le Nord entier va connaitre un nouveau souffle car Wakiza et moi allons être parents !

Le bonheur faisait vibrer ma voix et des perles salés vinrent humidifier mes yeux. Depuis la tragédie qui nous avait tous assaillie, très peu de lionceaux avaient vus le jour. Aussi, quelques uns d'entre nous pensaient que les Nordiques étaient voués à l'extinction pure et dure si une nouvelle génération ne voyait pas le jour. Nous avions eu du mal à nous remettre de ce que nous avons dû endurer mais les quelques couples qui existaient n'avaient pas tous eu la chance d'avoir une descendance. C'est pourquoi, au-delà de mon propre bonheur de devenir mère, j'étais aussi extrêmement heureuse pour le clan et fière de savoir que je participerai à son renouveau.

J'observais les réactions de Taygha face à mon annonce. Je ne savais pas combien il y aurait de petits mais rien qu'un seul était déjà une très grande bénédiction. Cependant, Wakiza étant pragmatique et les conditions étant ce qu'elles étaient dans le Nord, il m'avait soufflé une idée que j'avais très vite approuvée. Ne restait plus qu'à poser la question à la concernée, ce que je fis donc sans plus tarder.

Je sais ton désir de devenir mère toi aussi et je ne doute pas que tu le seras un jour, Taygha. Tu seras même une excellente mère, j'en suis convaincue. Cependant, comme il peut nous arriver quelque chose du jour au lendemain à Wakiza et moi, nous aimerions te demander une faveur... Je m'arrêtais quelques instants afin d'avoir sa plein attention mais aussi pour rassembler tout le sérieux que j'avais pour imprégner mes mots de solenité. Voudrais-tu devenir la marraine de cet ou ces lionceaux ? Se serait un honneur pour nous que de savoir qu'ils seront bien entourés par tes soins si jamais il nous arrivait malheur...

Le sujet était peut être vite abordé mais ni mon compagnon ni moi n'avions de famille rescapée de la famine. Et si nous savions que le clan prendrait soin de nos enfants, il était toujours plus rassurant de savoir qu'une personne proche se sentirait plus impliquée que les autres. Je pouvais essuyer un refus, j'en avais conscience. Je comptais cependant sur notre amitié pour faire pencher la balance de façon positive.

Suite à mon annonce, la réaction de mon amie ne se fit pas attendre une seconde. Il ne lui fallu que le temps d'assimiler l'information pour que ses yeux pétillent de joie tandis que sa queue fouettait vivement l'air, signe qu'elle se contenait pour ne pas sautiller partout comme une enfant à qui l'on annonce une excellente nouvelle.

Je suis heureuse pour vous, c’est un nouveau souffle pour notre clan et une renaissance pour toi ! Toutes mes félicitations ma chère, tu viens d’égayer ma journée.

Elle avait parfaitement raison. Après avoir perdu mes parents et mon frère de portée, le fait de savoir que j'allais créer ma propre famille était un pur bonheur. J'étais également très fière de participer à la création d'une nouvelle génération de Nordiques, et j'espérais qu'ils ne connaitraient pas les mêmes temps sombres que nous.

Merci, Taygha. Tes paroles me vont droit au cœur.

Sans lui laisser plus de temps, j'enchainais sur une demande avant de ne plus en avoir le courage. Ainsi, je lui demandais de devenir la marraine de notre progéniture. Sa réaction fut telle que je ne pu la définir que par un seul mot : le choc. Elle ne devait sans doute pas s'attendre à cela et c'était compréhensible. Nous étions amies depuis peu mais le lien que je ressentais avec elle était puissant et je ne me voyais pas demander cette faveur à une autre.

En voyant une larme rouler sur sa joue, je me demandais si je n'étais pas allée trop loin mais ces mots balayèrent bien vite mes doutes.

J’en serais honorée, Neva… C’est…La plus belle chose qu’on m’ait demandée… Je n'ajoutais rien, laissant le temps à Taygha de reprendre le contrôle de ses émotions. Je suis sincèrement heureuse pour toi et ton compagnon, et je suis plus qu’heureuse que tu aies pensée à moi pour ce rôle si important.

Quand elle se fut écartée de moi après avoir posé son front sur le mien, ce fut à mon tour de sourire à mon amie et, tandis que je lui répondais, la joie était clairement perceptible dans ma voix.

C'est nous qui te remercions, Taygha. Nous ne voyions personne d'autre que toi pour remplir ce rôle et nous sommes certains que notre descendance sera en de très bonnes pattes s'il devait nous arriver quelque chose.

Mes paroles étaient on ne peut plus sincères. Taygha était vraiment la personne parfaite, nous en étions convaincus. Mon amie aux yeux violets laissa de côté cette partie pour se concentrer sur une toute autre.

Maintenant, que tu vas devenir mère, je veux que tu me raconte absolument tout ! Et j’ai bien dit tout ! Comment tu as su ? Comment il a réagi ? Je t’écoute mon enfant.

Son attitude ainsi que son ton me rappelait la façon dont nous avions parlé lorsque je lui avais avoué mon béguin pour Wakiza. Me sentant de nouveau adolescente en train de discuter avec ma meilleure amie, je me laissais prendre au jeu de la confidence.

Eh bien, un matin, je me suis tout simplement sentie... différente. Quelque chose avait changé sans que je n'arrive à mettre la griffe dessus. Je me suis alors convaincue que ce n'était que mon imagination et j'ai laissé ça de côté. Cependant, au fil des jours, ce sentiment ne disparaissait pas et, au contraire, il s'amplifiait. Je me suis aussi retrouvée à ne plus supporter la nourriture le matin et, il y a quelques jours, j'ai eu des sensations comme des crampes dans le ventre. Tout ceci additionné à mon couple avec Wakiza m'a fait penser que j'étais peut être gestante et, à l'instant où cette pensée à vu le jour dans mon esprit, la lumière s'est faite, comme si tout se mettait en place et cette certitude s'est alors ancrée en moi. Il était difficile de mettre en mots ce que j'avais ressenti mais il me semblait que je m'en étais plutôt bien sortie. N'ayant répondu qu'à l'une de ses questions, je m'attelais à répondre à la suivante. Quant à Wakiza, il a tout simplement été super. Lorsque je le lui ai annoncé, il a bondi de joie et m'a serré contre lui à m'en couper le souffle. Et, tu ne sais pas ce qu'il m'a dit ? Il m'a interdit de courir le moindre risque alors il a dit qu'il allait prendre ma place et me remplacer à la chasse. N'est-ce pas prévenant et mignon de sa part ?

Je lui avais d'abord tenu tête en lui rétorquant que ma condition ne m'empêcherais pas de chasser pour le clan mais, dès lors que j'avais vu l'inquiétude dans son regard, je m'étais rangée à sa décision. Je ne pourrais de toute manière pas lui faire changer d'avis et, notre ou nos enfants étant trop précieux, je ne voulais pas les perdre parce que j'avais été trop téméraire pour écouter le conseil avisé de mon compagnon.

Tandis que j’expliquais à mon amie comment j’en étais arrivée à la conclusion que j’étais gestante, je la voyais qui m’écoutais très attentivement. Elle semblait rayonner de bonheur pour moi face à la nouvelle que je venais de lui annoncer et j’espérais du plus profond de mon cœur qu’elle aussi ressentirait un jour ces sensations.

Tu as trouvé ta moitié Neva, vous êtes merveilleux ensemble et je vous souhaite tout le bonheur du monde. Il a raison de prendre soin de toi, et je chasserais aussi pour vous aider.

Tout comme pour mon compagnon, je savais que je ne pourrais faire changer Taygha d’avis. Et je me doutais aussi que, dès lors que le clan serait au courant, plusieurs membres agirait également de la sorte pour protéger ces futurs petits être qui signifiait un renouveau pour le clan après tant de dures épreuves. Je ne pouvais donc qu’accepter en acquiesçant d’un signe de tête.

Je ne trouve plus les mots, tant mon cœur est rempli de joie. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis ravie de cette nouvelle. Voici une journée qui restera à tout jamais gravée dans mon esprit.

S’il était certain que je ne pouvais saisir l’ampleur de la joie de mon amie puisque je ne pouvais être dans sa tête, je pouvais au moins imaginer que oui, elle était vraiment très heureuse pour moi. Je savais à quel point elle souhaitait être mère et combien cela pouvait la chagriner de ne pas y parvenir. Aussi, vivre au travers de mon bonheur lui semblait une bonne chose. Toutefois, j’espérais qu’elle vivrai ce bonheur pour elle-même tant elle le méritait.

Je te remercie, Taygha. Tu es vraiment une amie hors pair. Je te souhaite sincèrement de pouvoir vivre ce qu’il m’arrive. C’est tellement… magique. J’ai l’impression de flotter sur un petit nuage !

S’il était en mon pouvoir de lui offrir ce bonheur, il était certain que je le ferai dans l’instant. Ce n’était cependant pas le cas mais je pouvais au moins la faire participer, d’où le rôle de marraine que nous lui offrions Wakiza et moi.

J’espérais que mes paroles ne lui causeraient pas de tourments et apparemment, cela ne semblait pas être le cas. Le ou les petits que j’allais mettre au monde seraient peut-être les seuls dont elle pourrait un peu s’occuper et je ne voulais pas que cela lui cause du tort.

Le temps nous le dira ma belle, pour l’heure occupons nous plutôt de toi !

Honnêtement, je le lui souhaitais sincèrement car elle aussi méritait ce bonheur. Cependant, pour l’heure, je laissais cela de côté, préférant éviter de lui causer trop de peine en pensant qu’elle ne parvenait toujours pas à être mère et ce, depuis le temps qu’elle était en couple avec Alhef.

Si tu as besoin de quoi que ce soit, n’hésite pas à me demander, peu importe l’heure, je serais toujours présente pour toi et ta famille Neva.

Je reconnaissais bien là mon amie. Elle était toujours prête à apporter son aide à ceux qu’elle aimait et je pouvais me sentir privilégiée d’en faire partie.

Je n’y manquerais pas, merci.

Je ne savais pas encore à quelle occasion je pourrais solliciter son aide mais je notais sa proposition et je savais que, lorsque j’en aurais besoin, elle serait présente.

Soudain, une envie se manifesta en moi. Non pas que j’avais froid mais je souhaitais passer un moment de détente aux Sources Chaudes. Et je profitais de la présence de Taygha pour lui demander si elle souhaitait venir avec moi.

J’ai entendu dire que les sources chaudes étaient bénéfiques dans mon état et il est encore tôt. Si nous partons maintenant, nous pourrions en profiter un moment avant de devoir rentrer, annonçais-je. Tu souhaites m’y accompagner ? Quoi de meilleur pour moi que de passer du temps en excellente compagnie ?

Je ne savais pas si elle avait prévu un programme pour aujourd’hui mais, qu’elle me réponde par l’affirmative ou non, je comptais bien aller me détendre près des Sources Chaudes. Cela faisait un moment que je ne m’y étais pas rendue et, à cet instant précis, j’en avais très envie. Ne restait qu’à savoir si je serai accompagnée ou non.