« Arrêtez ça, c'est ridicule. Mes blessures ont parfaitement cicatrisé, vous l'avez dit vous-même. – Depuis quand avez-vous peur du ridicule, vous ? – Vous m'ennuyez, gronda Namiri. – Ah, mais vous pouvez me menacer avec vos grandes canines ! fit le Calao en lui chatouillant la truffe du bout de sa rémige. Il était juché sur son nez et la lionne devait presque loucher pour le voir distinctement. Sachez cependant, ma Dame, que quelles que soient les âneries que vous me raconterez cette fois pour me faire peur, j'en démordrai pas ! Je suis le premier à le regretter, croyez-moi, mais ces soins vous sont encore indispensables, et vous voyez, si vous vous montriez un tant soit peu plus agréable, je dirais même juste presque polie – et pas forcément polie toute entière parce que vous semblez tellement abhorrer la politesse que ça finirait probablement par vous donner de terribles crises d'urticaire – eh bien cela rendrai ma manœuvre plus facile, efficace et nettement, nettement plus rapide !
La lionne roula des yeux et laissa la gravité aplatir tout son corps au sol, renonçant à opposer davantage de résistance à son garde-malade. La pétulance matinale de cet oiseau était infrangible. C'était lui qui état chargé d'appliquer sur les cicatrices de ses brûlures une sorte de cataplasme dont Namiri n'avait cure de connaître la composition. Elle ne savait même pas exactement ce que cette vilaine bouillie malodorante était supposée faire et se considérait guérie depuis longtemps.
– Vous êtes toujours là ? – Hm ? – Ah, ouf. Vous ne bougiez plus et n'émettiez plus aucun son, j'ai cru un instant que vous vous étiez endormie. – Vous avez bientôt fini ? grogna-t-elle. – Encore un petit chouilla, là... Et voilà ! À peine eut-il prononcé ces derniers mots que, sans prévenir, Namiri se releva, le faisant dégringoler du son nez qui lui avait servi de perchoir. – Mais, je vous en prie ! Ce fut un plaisir ! tança-t-il pour souligner son ingratitude. Namiri, qui malgré son grand respect pour le cycle de la vie adorait effrayer les animaux plus petits qu'elle, donna un coup de croc à raz de son bec. Le calao s'arracha un cri de surprise et de crainte mêlées et exécuta un spectaculaire bond en arrière qui amusa beaucoup la lionne. – Merci bien, Zimwi ! Passez le bonjour à votre famille de ma part ! ricana Namiri tandis que l'oiseau s'envolait à toute hâte en jurant au mépris de toute pudeur sémantique. Évidemment, c'était loin d'être la première fois que ce genre de choses arrivait et ils savaient l'un et l'autre que leurs petites prises de bec relevaient uniquement du jeu, et qu'au fond, sincèrement, ils s'appréciaient.
Namiri se reconcentra sur son petit espace. Elle s'était allongée à l'entrée de l'abri où se reposaient les blessés, sous l'acacia à l'ombre duquel elle faisait toujours ses siestes et où se diffusait une tranquillité qui s'écoutait. Elle ne l'avait jusqu'alors pas remarqué, mais maintenant qu'elle n'était plus distraite et qu'elle observait plus attentivement autour d'elle, Namiri remarqua le petit lion à demi dissimulé par la pénombre de la caverne. Plus précisément, elle distinguait la lumière bleue de ses prunelles qui l'observaient et le bout de ses pattes et de son museau. La couleur fruitée de son pelage et de sa crinière – qui au hasard lui rappela la chaire rougeoyante de la pastèque – la fit tiquer.
– Alfajiri, je présume ? »
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Tehura
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Mar 31 Mar - 13:30
Tehura te gèle de son regard en #D9DFDF.
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Mar 31 Mar - 20:35
« Bonjour Namiri, comment vous portez-vous aujourd'hui ?
La lionne le dévisagea quelques secondes avant de longuement cligner des yeux en hochant la tête, se laissant fendre d'un sourire pudique. Elle n'avait jamais parlé à ce jeune lion, pourtant, elle l'avait souvent croisé lorsqu'il était lionceau. Peut-être ne s'en souvenait-il pas, puisque Namiri avait jusqu'alors arboré un physique tout à fait ordinaire et une attitude discrète. En remarquant ses prémices de crinière rougeoyante, elle songea qu'elle ne l'avait pas revu depuis longtemps, et que sa mère l'avait bien éduqué. Les garnements de son âge était souvent si malpolis... Mais lui avait la décence de ne pas lui sauter dessus en s'écriant et parlait à son aïeule comme on se doit de parler à un aïeul : en commençant par "bonjour" et en s'enquérant de sa santé ! Après tout Namiri était de la vieille école, et les politesses, pour elle, c'était sacré.
– Bonjour. Je me porte comme un charme, merci. Tu as bien grandi, Alfajiri. La dernière fois que je t'ai vu, tu m'arrivais à peine au menton.
Puis, voyant bien le trajet erratique de son regard qui évitait pudiquement de trop fixer ses blessures, elle déclara :
– Tu peux les regarder autant que tu veux, cela ne me dérange pas. J'ai l'habitude, maintenant. Je t'aurais bien autoriser à les toucher, même, mais ce fichu cataplasme doit sécher d'abord. Mais quel bon vent te porte jusqu'à cette vieille carcasse qu'est la mienne, dis-moi ? »
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Tehura
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Jeu 7 Mai - 14:42
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Dim 7 Juin - 17:57
Namiri suivait lentement l’adolescent du regard. Il était encore jeune et plein d’énergie et ses émotions débordaient de ses yeux et de ses gestes. En comparaison avec la lionne, cette dernière paraissait complètement immobile, comme figé par sa maturité. C’est ainsi : en vieillissant, les émotions se résorbent et l’on devient moins expressif, ce qui explique pourquoi les adultes sont si difficiles à déchiffrer. Elle l’écouta attentivement, étudiant avec délicatesse et minutie chacun des mots qu’il prononçait.
« Ça va, répondit humblement Namiri en clignant des yeux. Ses blessures étaient effectivement douloureuses, mais elle avait la chance d’avoir le corps et l’esprit robustes. Ah, alors comme ça tu voudrais être un héros ? Tu rêves de balafres comme celles que je porte ? Namiri gloussa. C’était malgré elle, mais quand on la connaissait peu, son rire paraissait toujours un peu sinistre. Les cicatrices ne sont pas l’apanage des héros Alfajiiri. Les cicatrices, ce sont avant tout des fragments de notre mémoire. La plupart, cependant, demeurent invisibles.
Namiri l’admettait seulement à demi-mots, mais elle adorait dispenser ses enseignement aux plus jeunes. Il était aisé de comprendre ce qu’ils pensaient et ce qu’ils ressentaient et d’agir en conséquence. Sans bouger, la lionne invita Alfajiiri à prendre place en face d’elle, assez près.
– En vérité, très peu de cicatrices valent qu’on en soit fiers. Une blessure n’est pas une chose qui se réclame. Tôt ou tard, nous finissons tous par en avoir. Il n’y a pas d’exception. Cela arrive malgré nous, au moment où nous nous y attendons le moins ; et à ce moment là, la seule chose que l’on ressent, c’est la douleur. Pas la fierté.
Namiri pencha sa lourde tête vers celle du jeune lion et murmura :
– Tu es peut-être encore un peu vert pour t’en rendre compte, mais toi aussi, des blessures, tu en portes déjà. Et elles sont purielles. »