De toute évidence, revenir sur Prideland était l'un des meilleur choix que j'avais fait dans ma vie. Même si Haramu me manquait un peu, j'étais très heureux de pouvoir voyager comme bon me semblait. Et puis j'avais eu la chance de faire une bonne rencontre dès mon arrivée sur cette terre grâce au petit Sisko. Il n'en fallait pas plus pour me convaincre de rester là bas encore un peu.
Un soir, alors que je dormais presque debout, je me heurtais à un arbre. Je secouai la tête violement avant de lever les yeux vers la cime de l'arbre en question. C'était un baobab. Un grand baobab. Je regardais derrière moi, il faisais déjà nuit noire. Poussant un long bâillement je me dis que je ne trouverai sans doute pas meilleur endroit pour dormir. Recroquevillé près des racine, il ne fallut pas longtemps pour que le sommeil s'empare de moi.
Le lendemain matin, ce fut les raillons d'un soleil de plomb qui me réveillèrent. Toujours allongé, je me mis sur le dos, étirant lentement chacune de mes longues pattes. Soudain, j'entendis une voix de l'autre côté du baobab :

"Wapenzi ! Tu es là ?"

Je tournai la tête vers la voix. Non, il n'y avait pas de Wapenzi ici. D'ailleurs je me demandais de qui il pouvait bien s'agir. Mais bon ce n'était pas mes affaires et qui que soit l'animal dont j'avais entendu la voix, je n'avais pas spécialement envie de bouger. Je préférais de loin rester allonger. Refermant les yeux, j'entendis encore le lion marmonner puis il se remis à appeler son heu... ami supposais-je, avec un ton inquiet. Enfin, sa voix se fit calme mais dure lorsqu'il demanda :

"Eh bien, qu'attends-tu pour sortir de ta cachette ?"

Je poussais un petit grognement de mécontentement, apparemment j'allais être obliger de me lever. Ce que je fis, non sans difficulté. Il faut croire que j'étais en train de devenir de plus en plus fainéant. D'un bond un peu maladroit, je me retrouvais sur l'une des racines du baobab. Là, je pouvais voir le lion et il pouvait me voir. Ce lion me semblait un peu tendu, inquiet. Je remarquai alors qu'il portait une fleur au niveau de son oreille droite. Pourquoi ? Bonne question. Je m'allongeai calmement et lui répondit avec un sourire assuré :

- Mais je ne me cachais pas.

J'ajoutai avec un bâillement :

- Je dormais.

Je penchait la tête sur le côté, intrigué par le lion. Mon naturel curieux revint bien vite au galop et je me mis à questionner le grand félin.

- Je m'appelle Fleck et toi, qui es-tu ? Tu viens d'où ? Et puis c'est qui Wapenzi ?

Prepare for trouble, make it double !


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En m'apercevant le lion sembla rassuré, ce qui me fit sourire. Il est toujours plus agréable de parler avec quelqu'un de détendu qu'avec quelqu'un d'inquiet. Surtout lorsqu'il s'agit d'un lion car une fois inquiets, certains se montrent agressifs. En tout cas, agressif mon interlocuteur ne l'était pas le moins du monde, ce qui était assez rassurant. Le lion se présenta :

"Enchanté, jeune canidé, je me nomme Alois. Pardonne cet excès de dureté de ma part, ça n'est pas mon habitude..."

Je ne fis aucune remarque, me contentant de pencher la tête sur le côté. Bah, il n'avait pas à s'excuser pour ça. Je savais très bien que l'inquiétude pouvait nous rendre plus dur que nous ne le sommes réellement. Et puis il s'inquiétait pour quelqu'un apparemment, c'était louable. Le lion continua de répondre à mes questions :

"Je suis d'ici, des Pridelands. Et toi, alors, tu es seul ici ?"

Je plissais les yeux. Je notais qu'il n'avait pas répondu à ma dernière question. Pourquoi ? Bah, après tout, cela ne me regardais pas. En grandissant, j'avais appris à respecter la vie privée des gens, à ne pas insister lorsque ceux-ci ne répondait pas à mes questions. Aussi je ne fis aucune remarque sur l'absence de sa réponse et je répondis simplement :

- Yep.

Je laissais planer le silence un petit instant. Juste le temps que je bondisse de la racine jusqu'au sol, en face du lion. Ce second bond fut plus agile que le précédent, c'était la preuve que peu à peu la torpeur me quittait. Finalement, j'ajoutais :

- Je suis un voyageur, je suis partis de chez moi pour explorer le monde.

Je m'assis calmement et me remis à le questionner :

- Alors tu appartiens à un clan, hein ? Dis moi, pourrais-tu m'expliquer comment fonctionne un clan de lion ? Je suis très curieux.

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Alois prit le temps de me répondre et de m'expliquer le fonctionnement des clans de lions, pour mon plus grand plaisir.

"Comment fonctionne un clan ? C'est assez simple ; nous vivons sous le pouvoir d'un roi et d'une reine... Enfin, seulement d'une reine depuis quelques lunes, le jeune prince s'impatiente d'ailleurs, je crois. Enfin bref, nous sommes autorisés à bien des choses, interdits à peu. Les seules choses vraiment primordiales : nous ne chassons pas près de l'étang. Et nous ne devons pas attaquer ou tuer un autre membre du clan... Chose que certains ont parfois du mal à assimiler..."

Comme je pouvais m'y attendre, les lions vivaient à peu près comme les lycaons. A l'exception du fait que, bien sur, nous n'étions pas gouverné ni par un Roi ni par une Reine mais par un couple d'Alpha. En revanche, je me demandais pourquoi il n'y avait plus qu'une reine pour gouverner le royaume. Qu'était devenu le Roi ? Je n’eus pas le temps de le demander à Alois car le lion continua après une courte pause :

"Sinon, ceux qui peuvent chasser le font pour ceux qui ne peuvent pas encore ou plus... Les lionceaux sont entrainés à se battre et à chasser assez tôt. Pour ma part, j'ai appris à me défendre dès mes douze lunes et j'ai fait ma première vrai chasse lorsque j'en avais vingt-huit, mais j'avais déjà appris les bases avant."

Tout d'un coup, le lion se mit à secouer la tête violemment, comme si il voulait se débarrasser d'un mauvais souvenir. J'en déduisis que cette chasse ne c'était pas bien passée... C'est alors que la fleur que portait Alois tomba au sol, à deux pas de moi. Je la suivis du regard et dès qu'elle toucha le sol, je relevais la tête vers le lion. C'est alors que j'aperçus la balafre qui arborait son visage. Elle avait, jusqu'alors, était caché par la fleur mais elle était maintenant clairement visible. Je ne bougeais pas d'un poil. Les cicatrices ne m'avaient jamais intimidé, plus depuis que j'avais vu des lycaons rentré en sang au camp après avoir été attaqué. Si la situation ne me dérangea pas, ça ne semblait pas être le cas d'Alois. Il se précipita sur la fleur et la remis en place le plus vite possible.
Après quelque seconde de silence, je me décidais à parler :

- C'est une sacrée blessure que tu as là... Comment l'as tu eus ? Un combat ou un accident ?

Je laissais quelques secondes s'écouler puis me rendant compte que ma question était déplacée, je me repris :

- Cette question était très déplacée. Pardonne-moi, ma curiosité et parfois l'un de mes plus grand défauts...

Je me raclais la gorge, nerveux. J'espérais ne pas avoir trop offensé Alois avec cette question. Il était plus que compréhensif qu'il ne veuille pas y répondre. Aussi je me dépêchais de changer de sujet.

- Au fait, comment ce fait-il que seul votre Reine gouverne ? Qu'est-il advenu de votre Roi ?

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J'entendis le lion soupirer et je relevai la tête. Au final, ma deuxième question ne semblait pas non plus l'arranger. Alois me regarda un moment, il semblait songeur. Finalement, après quelques secondes, le lion répondit :

"Notre Roi a été assassiné..."

Mal à l'aise, je me mis à piétiner sur place. Mouais... Décidément, je ne faisais que poser des questions sensibles ce jour-là ! Alois enchaina :

"Nous ne savons pas ce qu'il s'est passé précisément, à vrai dire, une poignée de lions dise qu'il a été tué par un clan de lions noirs appelé les Nyeusis. Mais ces lions n'existent que dans nos anciennes légendes, il n'a jamais été prouvé qu'ils existaient réellement..."

Le lion souffla. Quelle étrange histoire... Un Roi réel tué par des lions de légende. Oui, c'était vraiment très étrange... Etrange et louche ! Je savais pertinemment que chaque légende avait un fond de vérité mais dans cette histoire je pensais que si ces Nyeusis existaient réellement ils ne pouvaient pas être passé inaperçus aux yeux de tous... Enfin, ce n'étais pas mais affaires après tout... Mais je dois bien avouer que ce meurtre attirait ma curiosité.
Alois revint finalement à ma première question, il dit en pointant la fleur sur son oreille :

"Tu m'as demandé comment je m'étais fait cette blessure. A vrai dire, si je pouvais te le dire, je l'aurais fait."

Tien donc ? Il l'ignorait ? Je me demandais comment cela était possible. Ce genre d'événement devait pourtant laisser des marques, autant physique que mental. Décidemment, les choses étranges s'enchainaient. Alois continua en souriant :

"Je ne m'en souviens plus, mais il doit s'agir d'un combat puisque c'est un griffure de lion... Je n'aime juste pas la montrer parce qu'elle me rend asymétrique, ce n'est pas joli pour plaire aux filles, si tu vois ce que je veux dire..."

Il fit alors un sourire charmeur qui m'amusa. Ainsi monsieur aimait bien tourner autour des lionnes. Bien, ça devait être un passe-temps comme un autre. Moi ? Oh non... Je n'étais pas du tout comme ça... Mais alors pas du tout. Disons que, vous voyez, j'étais assez mal à l'aise dans la position de dragueur et puis de toute façon les filles ne m'avaient jamais intéressées. Parait-il que c'est surtout une question d'âge. Bah, après tout, question d'âge ou pas, ce n'était pas très important. Du moins pour moi, car Alois semblait plutôt à l'aise sur le sujet. Sujet qu'il avait l'air d'apprécier. Je me permis d'ailleurs de le lui faire remarquer :

- Oh... Alors Monsieur Alois aime bien courtiser les lionnes, n'est-ce pas ? Dis moi tu as eu beaucoup de conquêtes ?

Bien que peu à l'aise avec ce sujet, je décidais de rester un peu dessus. Après tout, j'avais suffisamment embêté Alois avec des questions sensibles. A présent mieux valait parler d'un sujet qui lui plaisait.

- Tu sais, tu n'es pas le premier dragueur que je vois dans ma vie. Bien que tu sois le premier à être un lion, les autres étaient des lycaons comme tu peux t'en douter. Mais je me suis toujours demandé comment vous faisiez pour être aussi à l'aise avec les filles vous autres.

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Alois émit un petit rire. Ce sujet lui plaisait, sans aucun doute. Il se calma le temps de s'allonger puis repris de plus bel. Je me demandais ce qui pouvait bien le faire rire. Mon inexpérience sans doute. Penchant la tête sur le côté, le lion m'expliqua sa "technique" :

"Il te suffit d'ouvrir les yeux ! L'important est d'être naturel, c'est ça qui leur plait. Moi, je suis le charmeur et ça, ça leur plait !"

Je reniflais. Etre naturel ? Oui cela devait être une idée comme une autre. Mais il devait bien arriver que les lionnes, ou les femelles en général, n'apprécie pas le "naturel". Non ? Bah, au moins je pourrais essayé ça le jour où ce sera utile. Autant dire que j'avais encore du temps devant moi. Avec un grand sourire sur les babine Alois ajouta :

"Mais, dis-moi ? Pourquoi limiter mes "conquêtes" aux lionnes ? Les belles dames de ce monde ne sont pas que félines ! J'ai, un jour, rencontré une antilope magnifique, elle avait des yeux, mais des yeux ! Ahh, qu'elle était belle, cette Malika..."

Surpris je penchais la tête. Un lion qui disait d'une antilope qu'elle était magnifique ? C'était assez inhabituel. Si bien que je ne parvins pas à m'empêcher de pousser un petit rire. Je me repris bien vite et je me raclais la gorge. Avec un regard amusée j'ajoutai :

- Et bien si toute les belle demoiselle de cette savane t'intéresse, rappelle-moi de te tenir à l'écart le jour où je rencontrerai une jolie lycaonne.

Sur ce je me mis à sourire. Soudain, un gargouillement ce fit entendre. Je baissais les yeux fixant mon ventre. Il était temps que je me mette quelque chose sous la dent. Je relevai les yeux vers Alois. Aussi dommage que cela pouvait l'être, j'allais devoir le laisser pour partir en quête de nourriture. Je soupirais, un peu déçu, j'avais espéré pouvoir discuter un peu plus longtemps mais... Avec le sourire, je dit :

- Navré, Alois mais je vais devoir te laisser.

Un autre gargouillis se fit entendre. Je continuai, posant ma patte sur mon ventre :

- J'ai faim et comme tu le vois mon estomac est loin d'être patient.

Avant de lui faire un clin d'œil et d'ajouter :

- Néanmoins, compte sur moi pour me rappeler de tes conseils le moment venu. Au revoir.

Puis je repartis en trottinant. Content d'avoir pu discuter avec un lion si sympathiques.

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