Cela faisait maintenant quelques temps que nous nous étions posés sur la Lande Tan Diel et moi. Nous n'étions pas censés y rester aussi longtemps mais depuis les "retrouvailles" avec son frère jumeau, Tan n'était plus le même. Lui d'ordinaire si bavard s'était replié sur lui-même et il me fallait trouver des trésors d'imagination pour qu'il veuille bien bouger un peu. Mais malgré mes efforts de la matinée, il était resté allongé, surement perdu dans ses pensées. J'avais donc déserté pour aller chasser et lorsque j'étais revenue en début d'après midi, il avait à peine bougé. Je poussais un soupir avant d'entreprendre de me nourrir. Je laissais le reste de ma proie à portée de mon ami avant de partir une nouvelle fois. J'avais besoin d'une conversation au lieu d'une énième journée morose et je savais exactement qui aller voir : ma sœur. Je pris donc la direction de Prideland non sans un dernier regard et un conseil à mon ami :

Essaie de manger quelque chose au moins, ça pourrait te faire du bien.

Sans attendre de réponse de sa part, je m'élançais. Une bonne course me ferait du bien et ça me permettrait de revoir ma jumelle bien plus rapidement. Cela faisait à peu près neuf mois que j'avais quitté mon clan pour entamer ce voyage et je n'avais jamais été séparée de ma sœur aussi longtemps. Elle me manquait et j'avais hâte de la revoir. J'espérais juste qu'elle avait réussi à me comprendre et qu'elle ne m'en voulait pas d'être partie après la mort de notre père.

Le paysage défilait assez vite et il restait encore quelques belles heures avant que le soleil ne se couche lorsque j'arrivais au pied du Rocher de la fierté. Je commençais l'escalade, espérant trouver ma sœur là où on me l'avait indiqué. Un dernier bond et voilà que j'étais arrivée. Je balayais l'endroit du regard tout en marchant, ne faisant pas vraiment attention où je posais les pattes. Ce n'est que lorsque ma patte percuta un corps chaud que je baissais les yeux. Il s'agissait d'un lycaon, une femelle à en juger par l'odeur et pas très grande, ce qui expliquais un peu pourquoi je ne l'avais pas vue.

Excuse moi, je ne t'avais pas vue... Je ne t'ai pas fait mal au moins ?

Vraiment pas terrible comme excuse même si c'était la vérité. J'avais au moins essayé de rattraper le coup en m'enquérant de son état de santé.

La petite femelle bougea doucement tous ses membres puis se leva avant de finir par s'ébrouer. Elle avait l'air d'aller bien et cela me rassurait.

Ba oui. Je me cogne toute seule souvent, alors je vois pas pourquoi ça irait pas.

Sa réaction me fit sourire. C'est vrai qu'à bien y regarder elle était assez petite, même pour un lycaon. Elle devait être encore jeune, ce qui expliquait sa réaction ... et ses paroles suivantes.

Pourquoi tu m'as pas vue ? Je ressemble pas à un caillou pourtant.

J'étais tellement surprise que je ne sus pas quoi répondre. Et même si j'avais su, je n'en eu pas le temps.

Oh tu regardais aussi le jolie paysage ? Le mieux c'est d'attendre quand le soleil est parti se coucher. Y'a plein de jolie luciole qui s'accroche au ciel.

Des lucioles qui s'accrochent au ciel, c'était une très jolie image pour parler des étoiles. Mais elle avait raison, le spectacle était très beau à regarder. Encore plus quand on partageait ce moment avec une personne que l'on aimait. Mes pensées me ramenèrent alors quelques jours avant mon départ, la nuit où Tan avait décidé de m'accompagner. Il n'était plus le même depuis qu'il avait revu son frère et je ne savais pas quoi faire pour l'aider. Je ne savais pas non plus comment je devais le définir. Il était mon ami et je l'avais même identifié comme étant mon meilleur ami mais ... Depuis quelques jours, je me rendais compte qu'il y avait quelque chose de différent, que le Tan Diel habituel me manquait et je n'arrivais pas à savoir pourquoi.
Je soupirais alors que la voix de la jeune lycaon s'éleva de nouveau :

Dis, tu es qui ? Je t'ai jamais vue ici en faites. Tu es nouvelle ?

Sa voix me ramena à la réalité. Cela faisait maintenant neuf mois que j'avais quitté Prideland et maintenant qu'elle en parlait, c'est vrai que je ne l'avais jamais vu non plus. Le sourire aux babines, je commençais à satisfaire sa curiosité :

Pas tout à fait, je suis née et j'ai grandi ici. Tu es sûrement née après mon départ.

C'était l'explication la plus logique que je trouvais. Je n'avais pas vu beaucoup de lycaons dans ma vie à part Fleck est sa famille, aussi je me demandais si elle avait un lien de parenté avec eux. Quoi qu'avant de satisfaire ma curiosité, je tâchais de répondre aux questions de la petite lycaon.

Je m'excuse encore de t'être rentrée dedans. Et rassures-toi, tu ne ressembles pas à un caillou, fis-je avec une pointe d'amusement dans la voix. En fait je ne regardais pas vraiment le paysage, je cherchais ma sœur. Elle n'a pas l'air d'être là ceci dit, elle doit sûrement être en vadrouille.

Je balayais l'endroit du regard mais de toutes les lionnes présentes, aucune n'était ma sœur. J'en étais un peu déçue mais en même temps, c'était rassurant : elle n'aurait pas été elle-même si j'avais pu prédire ses mouvements. Reposant les yeux sur la petite, je finissais de me présenter :

Je m'appelle Ukarimu, mais tu peux m'appeler Uka si tu préfères. Et toi, quelle est ton nom ?

Se serait en effet bien plus pratique de connaître son prénom que de continuer à l'appeler "la petite lycaon".

La petite avait souri à mes mots, avant de me répondre qu’elle s’appelait Yetsa et qu’elle vivait ici avec « Papy Fleck ». J’avais donc bien raison, elle faisait partie de la famille de Fleck. Ce n’était pas si étonnant que ça au final, les lycaons se mêlant aux lions étaient très peu nombreux au final.

Puis elle continua, disant qu’elle n’était pas née sur Prideland et qu’elle avait une meute loin d’ici. Elle me raconta qu’une hyène avait voulu la manger avant que Temaba – que je ne connaissais absolument pas – ne fasse fuir la rieuse et ne ramène Yetsa au Rocher.

Il semblerait que j’avais tord finalement. Elle ne faisait pas partie de la famille du lycaon le plus connu de Prideland mais c’était tout comme apparemment. J’étais étonnée par son histoire. Elle était si jeune et avait été coupée de sa famille entière pour atterrir dans un endroit qui lui était totalement inconnu et rempli de lions.

Je connaissais la réputation de Fleck et je me doutais qu’il avait du faire le nécessaire mais je posais tout de même la question à Yetsa :

Ta famille … On ne l’a pas retrouvée ?

Ce n’était pas très délicat de ma part mais elle semblait assez ouverte et bavarde alors peut être cela ne la gênerait pas d’en parler.

Elle me parla aussi d’Ohanko et de Chesmu, qu’elle trouvait gentils et avec qui elle jouait souvent. Elle rit, ce qui me fit sourire à mon tour. Elle semblait tellement heureuse, c’était plaisant à voir. Elle enchaîna ensuite en me demandant la raison de mon départ.

J’éludais sa dernière question pour le moment, préférant reprendre ses paroles point par point. Je profitais du fait qu’elle ait parlé de jeux, j’en profitais pour lui poser une autre question :

Tu as raison de t’amuser, c’est important. Et quand Chesmu et Ohanko ne sont pas là, tu as d’autres amis avec qui jouer ?

Je ne pensais pas que cela soit une barrière dans un clan comme le nôtre mais j’espérais vraiment que Yetsa ait des amis de son âge pour s’amuser. Je n’étais pas une experte en la matière mais pour avoir observé ma sœur, je savais qu’elle s’amusait beaucoup plus avec ses amis du même âge qu’elle plutôt qu’avec ceux qui étaient plus âgés.

Je lui laissais quelques secondes avant de répondre à sa question.

Si je suis partie, c’est pour plusieurs raisons à vrai dire. La première c’est parce que je venais de perdre mon père et je savais que je ne supporterais pas de rester ici, accablée de chagrin. Et la deuxième c’est que j’ai décidé de profiter de ce moment pour réaliser mon rêve.

Je fis une petite pause pour me tourner vers le Nord et tendre la patte dans cette direction.

Tu vois les montagnes blanches très loin là-bas ? C’est là que je veux aller. Je veux voir de plus près cette chose blanche que l’on ne trouve pas ici.

Je la laissais assimiler mes paroles et lui laissais aussi le temps de rêver elle aussi avant de reprendre :

Et toi, Yetsa, tu as des rêves ?

A son jeune âge, il était impossible qu’elle réponde non et j’attendais de voir de quoi pouvait bien rêver un lycaon.

Toute attentive à mes paroles, la jeune Yetsa ne perdait pas son sourire. Enfin jusqu'à ce que je parle de sa famille. Elle adopta une mine un peu plus pensive et je m'en voulais de lui rappeler ce qui n'était sûrement pas de bons souvenirs.

Ba nan. Sinon je serais avec eux je crois. Mais papy il dit qu'ils cherchent encore.

Déstabilisante était le mot qui définissait le mieux la jeune canidé. Elle était déstabilisante tellement elle était innocente. Et cette innocence refit ses preuves lorsqu'elle retrouva le sourire juste quelques secondes après.

Elle me parla ensuite d'un certain Faragha avec qui elle avait déjà joué mais qui malheureusement ne venait plus très souvent. Elle m'expliqua ensuite qu'il faisait le tour de Prideland avec ses parents et qu'il était peut être juste trop loin. Je grimaçais à cette explication. Prideland était certes un vaste territoire, cela ne prenait pas autant de temps que ça pour en faire le tour.

J'éprouvais de la peine pour elle. Les pridelanders étaient ouverts d'esprit et j'espérais que sa race différente ne lui poserait pas de soucis pour créer des liens. J'étais persuadée du contraire puisqu'elle faisait partie de la famille de Fleck désormais mais je me promettais intérieurement que je viendrais lui parler régulièrement lorsque j'aurais fini mon voyage.

D'ailleurs, lorsque j'évoquais celui-ci et surtout les montagnes du Nord, je remarquais ses yeux brillants. Elle avait l'âme d'une aventurière, ça se voyait et elle ne tarda pas à le confirmer :

Moi je veux découvrir plein de truc, et être forte comme Aïsha !

Yetsa adopta une posture fière et je n'avais nul doute qu'elle réussirait à voyager et qu'elle deviendrait forte à son tour comme elle décrivait Aïsha. A l'instar de Temaba, je n'avais jamais entendu le prénom d'Aïsha et je me demandais bien de qui il pouvait s'agir. Une lionne peut être ? Ou bien une éléphante ? Elle avait parlé de force après tout. Intriguée, je lui posais la question :

Je ne connais pas cette Aïsha, qui est-ce ?

Déjà partie sur autre chose, Yetsa reprit la parole :

Mais dit. Tu veux que je demande à Papy de t'aider à retrouver ton papa ? S'il est perdu, il doit avoir peur et se sentir tout seul ...

L'innocence était de retour dans ses paroles et je souriais à nouveau. Je n'avais pas choisi les bons mots en parlant de la "disparition" de mon père et la jeune femelle ne l'avait pas compris dans le sens où je l'utilisais. Je cherchais une manière de lui faire comprendre ce que j'entendais par perdre tout en restant vague par rapport à la mort. Elle n'avait apparemment pas conscience de cette notion chez des personnes proches et je ne voulais pas qu'elle l'apprenne par moi.

Je te remercie Yetsa, mais ce n'est pas nécessaire. Je sais où se trouve mon père mais malheureusement, il se trouve quelque part où je ne peux pas le rejoindre...

J'avais été douce dans mes paroles mais ma voix s'était brisée sur la fin. Même si notre relation n'était pas aussi forte que celle qu'il entretenait avec ma jumelle, mon père me manquait. Je regrettais de ne plus pouvoir lui parler mais je savais aussi qu'il avait rejoint les Esprits et sa compagne et qu'il était désormais en paix.

Ne connaissant pas les croyances d'un lycaon - encore moins celles d'un lycaon originaire d'ailleurs- je lui posais une autre question afin de pousser un peu plus loin les explications sur la "disparition" de mon père :

As-tu déjà entendu parler des Esprits, Yetsa ?

Elle n'était pas originaire d'ici mais peut être que ses parents ou sa famille adoptive lui en avaient parlé ?

Spoiler:

Yetsa émit un rire avant de m'en dire un peu plus sur cette fameuse Aisha.

C'est une petite Suricate. Elle m'a sauvé à l'étang. Elle c'est mise entre moi et un tout grognon ... Heu... Un phacochère, qui voulait me foncer dessus.

Je comprenais mieux l'admiration que la fille adoptive de Fleck vouait à sa sauveuse. Un si petit être n'avait pas hésité à aller à la rescousse de la jeune femelle alors que l'animal en face était bien plus imposant. Les personnes comme ça étaient rares et je devais bien avouer que cela imposait le respect.

Je ne voyais pas ce que je pouvais ajouter alors je la laisser continuer, la discussion continuant sur mon père.

Oh ba tu pourras le revoir un jour. Maman dis toujours que les gens qu'on aime ne reste pas indéfiniment loin de nous.

Son sourire chaleureux était touchant et je le lui rendis. Effectivement, je finirais par rejoindre mon père lorsque l'heure sera venue mais en attendant, je devrais me passer de sa présence. Même si je ne pouvais pas le voir, mon père était toujours avec nous car il était présent dans le cœur de ma sœur et dans le mien.

Ta mère a raison, Yetsa. Il est trop loin pour que je puisse le voir mais il sera toujours avec moi parce qu'il est là.

Je posais ma patte sur mon cœur en prononçant ces mots. J'avais mis du temps à le comprendre lorsqu'il avait s'agit de ma mère mais une fois que j'avais compris ça, j'avais pu m'ouvrir au changement.

Je la voyais réfléchir à la notion d'Esprits et elle finit par répondre, un peu hésitante.

Heu non... Enfin j'ai entendu des lions en parler des esprits ici mais je sais pas ce que c'est. Il est avec eux ton papa ?

Cela ne m'étonnait pas qu'elle en ait entendu parler ici. La plupart des pridelanders croyaient aux Esprits et les évoquaient régulièrement. Je cherchais les mots pour lui expliquer quand elle me devança :

Ils sont comme les Kukosa ? Mon papa me disait que les Kukosa vivaient dans les nuages et qu'ils voyageaient avec le vent. Il me disait aussi que parfois les gens partaient les rejoindre quand ils avaient besoin d'eux mais que c'était pour un voyage sans retour. Qu'une fois qu'on les rejoins, on devient comme eux.

Je ne connaissais pas cette façon de voir les Esprits - ou les Kukosas comme elle le disait - mais malgré la différence de race et d'origine les deux choses étaient assez semblables.

Il y a quelques différences entre les deux mais globalement oui, les Esprits sont comme les Kukosas.

Je ne voulais pas parler de mort alors j'essayais de nuancer la légende les concernant.

Lorsque les lions ont besoin des Esprits, ils les rejoignent pour un voyage sans retour. Contrairement aux Kukosa, les Esprits ne vivent pas dans les nuages. Ils se transforment en étoile. Tu sais, les lucioles qui s'accrochent au ciel, eh bien je crois qu'ils s'agit des Esprits. On raconte aussi que les Esprits veillent sur ceux qui ne peuvent pas les accompagner et qu'ils les guident jusqu'à ce qu'ils aient besoin d'eux à leur tour et qu'ils les rejoignent.

Je lui laissais un peu de temps pour assimiler ce que je venais de lui expliquer avant d'ajouter :

Oui, mon père est avec eux. J'aime croire qu'il veille sur ma sœur et moi et qu'il nous guide là où il est.

Je n'avais plus rien à ajouter alors j'attendais de voir quel serait la réaction de Yetsa face à cette histoire.

La petite canidé ne comprit pas tout de suite ce que je voulais dire lorsque j'affirmais que mon père était toujours avec moi bien qu'il était loin. Puis je vis la compréhension dans son regard et cela se traduisit dans ses paroles.

Oh ba oui.

Son sourire me toucha une fois de plus. Elle était vraiment mignonne et sa joie était tellement perceptible qu'elle en devenait contagieuse.

La discussion avait ensuite tourné sur les Kukosas et les Esprits, qui en soi étaient assez semblables. La jeune Yetsa écarquilla les yeux lors de mes explications sur les étoiles qui étaient la représentation des esprits des bons lions.

Oh ! Les lions esprits ils brillent dans la nuit !

Effectivement, la nuit étaient le seul moment où l'on pouvait les apercevoir. Bien qu'ils étaient toujours dans nos cœurs et nos mémoires, la plupart de ceux qui en avaient besoin attendaient la nuit pour s'adresser aux disparus. C'était le meilleur moment pour beaucoup mais surtout c'était un moment où l'on était presque sûr de ne pas être dérangé.

Il n'y avait pas grand chose à répondre alors je gardais le silence, me contentant de sourire en regardant la fille adoptive changer de réaction au fil de ses pensées.

Elle ne resta pas étonnée bien longtemps et un nouveau sourire vint éclairer son visage, juste avant qu'elle n'éclate de rire. Je ne savais quelle était la cause de ce fou rire mais je souriais à mon tour, attendant patiemment qu'elle se calme.

Et la lune ? C'est le lion le plus fort de tous les temps ?

Le calme avec lequel elle parla me fit comprendre que sa question était sincère et qu'elle ne se moquait absolument pas. Je ne savais pas quoi lui répondre étant donné que je n'en savais absolument rien.

Je ne sais pas. Nous n'avons pas de croyance concernant la lune.

Du moins je n'avais jamais entendu parler d'une telle chose, que se soit sur Prideland ou lors de mon voyage. Cela dit, il n'était pas finit alors peut-être que les lions que je rencontrerais durant les prochains mois auraient quelque chose à me révéler à ce sujet. Je notais ça dans un coin de ma tête, histoire de penser à leur poser la question.

Cependant, si je n'avais jamais entendu d'histoire sur la lune, cela ne m'empêcher pas d'avoir mon propre avis sur le sujet et j'en fis part à Yetsa.

Par contre, j'aime penser que la lune est la compagne du soleil.

C'était un peu fou et j'en avais conscience mais j'aimais cette idée. La fille adoptive de Fleck était la première à qui je l'avouais et j'étais curieuse de savoir ce qu'elle allait en penser.

C'est une drôle d'idée, non ? Qu'est ce que tu en penses ?

La jeune fille écouta attentivement mes paroles. Le mouvement de ses oreilles et son expression m'indiquèrent qu'elle était déçue de la réponse que je lui avais offerte mais polie, elle n'en dit rien.

Lorsque l'on y réfléchissait, cela était assez étrange qu'il n'y ait aucune croyance concernant la Lune alors que ses filles représentaient les Esprits des lions défunts.

Cela étant, Yetsa se tourna vers le soleil et sembla réfléchir intensément à mes dernières paroles. Peut-être pensait-elle qu'il allait lui donner la réponse ? Ou bien regarder l'objet de sa réflexion lui permettait de mieux concentrer son attention ? Elle finit par me regarder de nouveau et après s'être assise, elle m'offrit ses pensées avec un sourire.

Ba... On dit le soleil et la lune donc ça peut-être vrai. Mais ils doivent bien venir de quelque part non ?

Elle ne semblait déjà pas me prendre pour une folle et c'était un bon point. Elle avait même l'air d'accepter cette idée et d'y croire également. Sauf que puisque c'est moi qui imaginait ça, je ne savais pas du tout d'où ils pouvaient provenir. J'aimais simplement l'idée que le soleil et la lune puissent être un couple et alors que je cherchais comment répondre, Yetsa avait déjà réfléchi à la réponse.

Les étoiles sont des lions. Et les nuages sont des Lycaons. Alors la lune et le soleil sont forcément un animal aussi... Un animal qui doit être très très très fort.

Son analyse me laissa sans voix. Elle n'avait pas forcément tord mais quel animal pouvait correspondre à cette description ? Il existait plusieurs animaux puissants dans la savane alors lequel avait eu l'honneur d'être représenté de la sorte. La réponse m'apparut soudainement et la lueur dans les yeux de Yetsa m'indiqua qu'elle avait trouvé elle aussi.

Oh ! Je sais ! Ce sont deux éléphants ! Il n'y a rien de plus fort qu'un éléphant ! Et de plus gentil en plus ! Et le soleil et la lune ils veillent sur nous. Alors c'est forcément des éléphants ! Ils brillent pour nous et veillent sur nous. Les éléphants ils veillent sur tout le monde !

Son enthousiasme était palpable et j'étais convaincue qu'elle avait raison. Les éléphants étaient de loin les animaux les plus imposants et ce n'était que logique que la représentation de leurs esprits soient aussi impressionnant. Toutefois, il n'existait pas que deux éléphants alors où étaient les autres ? A moins qu'ils rejoignent tous le même endroit ? Mais dans ce cas, pourquoi y avait-il le soleil et la lune ? Pourquoi leurs esprits étaient-ils séparés et quels étaient les critères de cette séparation ? Cette réponse amenait bien plus de questions que je ne l'aurais cru. Légèrement fatiguée, je n'avais pas envie d'y réfléchir pour le moment et je me contentais simplement de répondre à Yetsa.

Je suis certaine que tu as raison. Je n'ai encore jamais parlé à un éléphant mais la prochaine que l'occasion se présente, je leur poserais la question. Et je compte sur toi pour me donner la réponse si tu l'as avant moi !

Lui offrant un sourire, un mouvement à la périphérie de mon champ de vision attira mon attention. La silhouette rousse ne m'étais pas inconnue et mon sourire s'élargie en pensant à la surprise que j'allais faire apparaître sur son visage. Cela faisait bien longtemps que je ne l'avais pas vue et maintenant qu'elle était à portée de patte, l'envie d'aller la retrouver était insoutenable.

Reposant mon regard sur la fille de Fleck, j'entamais la fin de notre discussion.

J'ai beaucoup aimé passé du temps en ta compagnie Yetsa et j'espère qu'on se reverra à nouveau quand je serais rentrée définitivement. Cependant, je viens d'apercevoir ma sœur et j'aimerais lui faire la surprise de ma présence avant qu'elle ne me voit, tu comprends ?

La jeune canidé souria et après quelques paroles, termina notre rencontre. Je lui adressais un dernier sourire avant de m'élancer vers ma jumelle.