Nous sommes environ un mois après l'incident de Leilani. Une bête chute et voilà où ça l'avait menée, au fond du trou. Elle qui faisait tant d'effort pour qu'on la considère comme une adulte responsable au sein du Clan, et voilà qu'elle serrait cataloguée à vie comme une gourde maladroite. Si maladroite qu'elle avait réussi à s'ouvrir et à perdre la mémoire temporairement. Depuis son père la surveillait, encore plus qu'avant. Elle n'en pouvait plus. Ce matin là son père lui fit un énième sermon, et ce fut la goûte d'eau. La femelle sentit que si elle ne partait pas très vite, quelque chose se casserait en elle à jamais. Elle ne souhaitait absolument pas être en mauvais terme avec al seule famille qu'il lui restait aujourd'hui. Des larmes de colères roulaient sur ses joues. Cette jungle l'étouffait. Prise de panique, la femelle s'arrêta net, elle hyperventilait, c'était comme si ce qu'elle aspirait d'air ne lui servait à rien. Elle s'assit. Rouge pivoine de colère et parce qu'en crise de panique. Personne n'était à même de la comprendre et elle le déplorait. Elle allait mourir si elle n'arrêtait pas sa crise de panique. Être si stupide ne lui ressemblait pas.

La femelle s'était plutôt bien remise de son accident. Sa blessure avait bien cicatrisé, une belle croûte lisse s'était formée, lisse mais solide. A présent elle ne menaçait plus de s'ouvrir au moindre choc, quant à al douleur, bien qu'elle perdait chaque jour plus de terrain, il lui arrivait encore parfois qu’elle la lance un peu. La guérisseuse apprentie du Clan, Aruna, avait appliqué ce que l'ancêtre lui avait appris avec brio. Quant à sa mémoire elle était en fait revenue quelques jours seulement plus tard. Depuis elle évitait un peu gênée face à Uhta et essayait de la croiser le moins possible; elle ne souhaitait pas que quelques chose d'étrange s'installe entre eux, alors que leur relation était plutôt amicale jusque là.

Quelle ne fut pas sa surprise de voir que ses pattes l'avaient menée exactement à l'endroit où avait eu lieu l'incident. Ne manquait plus qu'elle y croise à nouveau Uhta tiens. Pour l’embarrasser encore plus. Lentement, elle vagabonda, dans cet endroit idyllique, regardant scrupuleusement là où elle posait les pattes cette fois. Ses pensées vagabondant elles aussi, le regard perdu par moments dans le ciel de branchages. Après une bonne heure de marche, la femelle vit une silhouette familière se découper sur le fond de la jungle. Le mâle au pelage rouge qui lui avait sauvé al vie le mois passé se trouvait avachi, couché sur une énorme racine. Perdu dans ses pensées lui aussi. Leilani inspira, essayant de se faire discrète, mais alors qu'elle faisait volte face, une branche craqua sous son pas léger pourtant.

Le bruit créé, pourtant léger comme le battement d'aile d'un papillon, fit brutalement sursauter le grand mâle. Et qui eut pour effet de le faire tomber de son perchoir, pour atterrir dans le petit étang situé plus bas. Leilani, se rua vers le dit étang pour vérifier que Uhta allait bien, et manifestement c'était le cas, car celui-ci n'était en fait que très peu profond. Il était honteux face à elle et trempé de la crinière aux pattes, Leilani ne put se retenir de lui adresser un sourire espiègle, et lui lança un "Comme ça on est quitte!" elle espérait qu'il y voit une touche d'humour. Elle ne voulait plus continuer à broyer du noir, c'était devenu depuis trop longtemps son quotidien, elle n'en pouvait plus. Ça lui faisait un peu l'effet de grandir d'un seul coup. Étrange, mais une douce douce et agréable sensation également. Lentement, elle se recula un peu, histoire de ne pas empiéter sur son espace personnel.

- Que ? Que viens-tu faire ici ? Fin...Tu te sens mieux ?

La femelle étudia un instant son état. Oui elle allait mieux; c'était indéniable, en même temps après un mois de repos, il était temps. Leilani allait profiter du fait qu'il ramène le sujet pour le remercier. Mais elle voulait d'abord lui montrer que tout allait bien, alors elle entama une série de cercles au tour de lui. Sa cicatrice, rosée/rouge la marquerait probablement à vie, elle se souviendrait d'ailleurs toujours qu'il lui avait sauvé la vie. Lui et personne d'autre. Il lui avait apporté les soin nécessaires, l'avait pratiquement traînée jusqu'au clan, avant d'ordonner qu'on la soigne et de veiller la première nuit sur elle pendant de longues heures. C'était le Destin, elle en était convaincue. Mais elle ne comprenait pas encore la raison pour laquelle le Destin avait placé Uhta sur sa route. Tous deux étaient si différents. Elle arrêta de lui tourner au tour, pour se rapprocher. Elle plongea ses prunelles océaniques dans les siennes, et s'adressa une nouvelle fois à lui.

- Uhta .. je voulais te remercier pour tout ça tu sais. Maintenant je t'en dois une. Saches que je donnerais ma vie pour la tienne si cela s'avérait nécessaire. Ma famille ne rigole pas avec les dettes, sa voix était douce et mélodieuse, malgré le sérieux de ses propos.

Une lueur de volonté apparut dans son regard un instant. Juste un instant, si court que quelqu'un ne al connaissant pas pourrait croire avoir rêvé. Alors que quelque chose de bizarre la secoua de l'intérieur. Un courant d'air passa sur son pelage et sur sa cicatrice. La femelle serra les dents. Foutu vent. Qu'avait-il en ce moment. Uhta avait l'air de grelotter. En même temps avec son plongeon dans l'eau tiède et ce courant d'air froid, cela ne serait pas étonnant. Leilani, attentive et bienveillante lui dit dans un murmure. "Tu as froid?"

- Oui... C'est de ma faute, mais ne t'inquiète pas ! Ça sèchera d'ici quelques minutes. Oui il avait raison. Mais c'était plus fort qu'elle, Leilani ne supportait pas que des lions auxquels elle tient soient mal. Sur ce point, Uhta et elle se ressemblaient plus qu'elle ne voulait l'admettre. Elle lui sourit. Si ses ambitions n'avaient pas été de quitter cette jungle, sans doute aurait-elle décidé de voter pour lui en tant que chef. Mais depuis sa rencontre avec Masbat, elle ne se sentait plus très bien ici. Aujourd'hui cette jungle l'étouffait, et ce sentiment allait croissant. Qu'allait-elle faire si ses crises s'intensifiaient ? Devrait-elle quitter à tout jamais la jungle, laissant tout ce qu'elle connaissait derrière elle, y compris son père, sa seule famille. Tenzin voulait trouver un territoire qui serrait leur vraie maison, cela ne signifiait pas diviser son Clan, mais au contraire l'unifier dans un milieu non hostile. Son regard toujours posé dans les prunelles du mâle, elle prit une décision. Sans doute que cela le mettrait mal à l'aise mais tant pis. Lentement elle le poussa pour qu'il se couche, et vint se coucher à côté de lui. "Allez, ne discute pas, ça ira plus vite comme ça" ça lui faisait un peu bizarre d'être si proche d'un mâle qui n'était pas son père, mais ce n'était pas désagréable.

Et puis bah, couper la distance permettrait peut-être qu'il la considère vraiment. Peut-être comme une amie qui sait. La brune s'étira un peu, pour détendre son dos, avant de porter son attentions sur Uhta. C'était simple d'être avec lui, de lui parler. Ça lui ferrait tellement de bien d'avoir un ami, quelqu'un à qui se confier, et sur qui elle pourrait compter si nécessaire. Bien que le mâle ait déjà prouvé qu'il était capable d'agir pour protéger une personne de son Clan, autrement dit elle même mais pas que. Il avait sauvé Ajjin des griffes de léopards. Et certainement bien d'autres lions au cours de sa vie. Avoir Uhta comme ami lui semblait impossible. Il avait bien trop de qualités. Quant elle, tout ce qu'elle avait à offrir était sa maladresse et sa bienveillance. Elle n'était pas même utile en orientation ou en combat, encore moins en discrétion.

Puis elle décida de prendre soudainement la parole. Il fallait que ça sorte. Elle devait en parler à quelqu'un, elle avait l'impression qu'elle allait exploser si elle ne le faisait point. Sa voix était tremblotante. Elle ne savait pas vraiment par quel bout le prendre, alors tout sortit, un peu emmêlé. "Dis Uhta, t'est-il déjà arrivé de te sentir observé? .. Les singes, ce léopard..Je ne sais plus .." gros désordre interne. Si elle ne le faisait pas fuir à toute allure avec les inepties qu'elle venait de raconter. Elle ferma la bouche et baissa la tête en fermant les yeux, essayant de contenir ce qui bouillait en elle. Si Uhta acceptait de l'écouter c'est qu'il était juste un dieu pour faire preuve d'autant de compassion et de patience. Finalement la femelle, rouvrit les yeux après un laps de temps qui lui sembla être une éternité, et du bout d'une griffe commença à faire des cercles dans la terre humide de la jungle.

Etre si près d'Uhta, ne la perturbait pas outre mesure à vrai dire. Elle avait toujours été assez fusionnelle avec son père, enfin autrefois. Comme souvent avec Leilani, il s'agissait de pure bienveillance et non pas d'un geste voulant dire autre chose. Elle n'était pas douée pour acter d'une façon qui ne lui ressemblait pas. Mais le contact de sa fourrure contre la sienne lui plaisait. Cela faisait un moment qu'elle n'avait plus eu de contact physique, elle étant plutôt tactile de base cela lui faisait du bien. Lentement elle inspirait, laissant son regard se balader dans les arbres centenaires en attendant une réponse du grand lion rouge couché contre son flanc. - Hé bien... Je dois t'avouer que par moment oui. Il est difficile de le nier au vue des circonstances. J'imagine que tu fais référence à ta mésaventure avec Masbat... Je comprends parfaitement, j'y dû m'opposer contre lui pour aider Ajjin fut un temps et j'en ai payé le prix. Il avait tourné la tête, histoire de la regarder droit dans les yeux. Leilani l'écoutait attentivement, elle avait envie de tout lâcher maintenant, mais elle sentait qu'Uhta avait encore des choses à dire, alors elle le laissa faire. Non elle ne faisait pas vraiment référence à l'incident avec Masbat qui lui avait presque coûté un oeil. Mais plus tôt de ces regards qu'elle sentait constamment braqués sur eux, les Mositus. Ils ne pouvaient rien faire sans qu'ils soient là, vils et discrets. Le mâle lui expliqua qu'il préférait voir l'Avenir et protéger les siens. De nobles résolutions que voilà.

Puis il enchaîna sur le fait qu'il aurait été triste s'il lui était arrivé quelque chose. La femelle piqua un léger fard. Ainsi il la voyait plus que comme une connaissance maintenant. Leilani secoua la tête pour dissiper ses rougeurs, et lui adressa un sourire plus grand encore. Enfin, elle avait trouvé cette personne qu'elle avait attendue toute sa vie. La lumière au milieu des ténèbres de sa vie. Un ami. Un véritable ami. Ses yeux brillèrent un instant. Puis l'éclat disparut. Il était temps de lui répondre. Avec une voix douce mais plus assurée; elle lui faisait confiance, elle s'apprêtait à lui confier quelque chose qu'elle n'avait confié à personne jusqu'alors. Son coeur s'ouvrit, libérant les démons qui y étaient enfermés.

"- Uhta, je.. tu sais je me souviens de ce qui m'est arrivé avant mon accident... elle reprit son souffle; histoire d'amorcer la suite de l'histoire, des singes dans les arbres, voilà ce qui m'a fait chuter, je courrais pour leur échapper.. les singes.. les léopards. Nous sommes constamment surveillés ici .. nouvelle pause, et .. et .. j'étouffe ici.. quelques larmes roulèrent sur ses joues.

Il devait la prendre pour une folle. Mais il l'avait choisie comme amie, elle ne voulait pas avoir de secrets pour lui. L'honnêteté ayant toujours été sa valeur fétiche. Elle baissa alors les yeux, posant as tête sur ses pattes, regardant les gouttes de pluie tomber sur le sol emmêlé de racines de diverses tailles. Une éternelle enfant. parfois, elle n'en pouvait plus de tout prendre sur elle, et explosait comme font les barrages lorsqu'ils débordent parfois. Elle pleurait en silence, sans pouvoir pour autant s'arrêter. Maintenant que les vannes étaient ouvertes.

Des larmes...Qu'elle était idiote. Mais elle n'arrivait pas à se calmer. C'était comme si des vagues et des vagues de larmes ruisselaient jusqu'à ses prunelles fermées, nerveux certainement. Leilani avait vidé son sac, et bien qu'elle sente la tristesse et la peur l'envahir. Mais dorénavant elle n'était plus seule, Uhta était là. Ça lui fit du bien d'en parler et de sentir écoutée, même si prise à la gorge par l'émotion, la femelle était incapable de le ressentir maintenant. Puis la femelle perçut du mouvement. Uhta avait peut-être une crampe ou des fourmis dans les pattes. Il était vrai qu'elle lui imposait un rapprochement forcé, la position n'était pas forcément confortable pour lui. Mais ce qui se passa ensuite, surprit fortement Leilani. Uhta, à sa grande surprise s'était encore plus rapproché, et posa sa tête sur la sienne dans un geste tendre et rassurant. Un léger ronronnement lui échappa. Le coeur de Leilani dérapa un instant avant de recommencer à battre normalement lorsque le grand mâle se recula un peu, manifestement perturbé par ce contact inopiné. Leilani le regardait, la surprise présente dans son regard turquoise. Celle-ci n'était pas sûre de comprendre la nature de ce geste. Bien qu'il n'ait pas eu de mauvaises intensions à son égard, loin de là. La femelle se sentait troublée comme elle ne l'avait jamais été auparavant.

- Je ... désolé Leilani, c'est que ... Fin ... Mon corps a bougé tout seul ... Fin non, mais ...

La femelle le regardait toujours, clignant des yeux, ne comprenant pas vraiment la situation actuelle. C'était la première marque d'affection que quelqu'un hors famille lui offrait. Elle était flattée. Mais c'était comme si on lui avait volé la voix. Elle était incapable de réagir à ce que Uhta lui disait. Il s'excusait. Un idiot, lui aussi. Enfin pour elle il n'avait pas vraiment de raison de s'excuser. Leilani essaya de sonder son état d'esprit, mais tout ce qu'elle voyait était une sorte de culpabilité vile. La femelle se redressa un peu et lui donna un coup d'épaule complice. Elle ne pouvait pas lui donner de réponse, son avenir propre étant plus que sombre et indécis pour l'instant. La seule chose sûre, étant que lorsque Tenzin sonnera le glas de leur départ, elle le suivra. Mais qui sait ce qui pouvait arriver avant, ou après. Celui-ci n'étant pas écrit. Peut-être al rejoindrait-il plus tard. Elle le souhaiterais, avoir un bon ami était toujours quelque chose dont elle rêvait. Peut-être qu'elle se faisait des illusions après tout. Elle s'était confiée, car elle avait confiance en son ami. Peut-être qu'un jour il lui ferrait lui aussi assez confiance pour s'ouvrir à elle. La femelle lui adressa un énième petit sourire.