Précision de temporalité : Ce RP se déroule après l'élection et avant que Siri ne parte sur Apeland.


Baradi était de retour sur la Lande depuis quelques heures seulement, et des centaines d'informations tournaient dans son esprit. Elle avait laissé Nsaï à ses retrouvailles avec sa mère, et avait choisit de s'isoler un peu pour réfléchir. Le clan s'était divisé, la sciure était réelle cette fois. Kwadja allait entraîné ceux qui le souhaitaient dans une guerre sanglante et désespérée, tandis que Siri guiderait la deuxième partie des Mositus vers de nouvelles terres. La femelle aux yeux d'émeraudes avait choisit de suivre Siri, qui proposait la meilleure alternative selon elle. Pourtant, au fond de son cœur, elle tremblait. Combien de ceux qui suivraient Kwadja allaient mourir ? Parviendraient-ils à reconquérir l'Oasis ? Cette entreprise semblait démesurément. Les Mositus n'avaient aucune chance, ils allaient se faire décimé. Les Jangowas étaient des guerriers, ils allaient les rayer de la surface de la terre. Le seul espoir de la femelle résidait dans Vako, le nouvel Empereur du Désert. Lorsqu'elle lui avait parlé, il avait semblé ouvert à une paix entre leur clan. Pouvait-elle compter sur lui pour empêcher cette guerre ?

Baradi secoua la tête et s'assit au pied de l'arbre gigantesque. Son regard se promena le long du tronc pour arriver jusqu'à la cime, se perdant dans le feuillage épais du Baobab. Ils allaient bientôt partir, eux aussi, à la recherche d'un nouveau territoire. La Mositus revenait tout juste de son propre voyage, et déjà devait-elle se remettre en route. Elle était toutefois pleine d'espoir, et s'en remettait à Siri. Il était sage, il saurait les guider. Elle éprouvait une certaine peine à l'idée de laisser Lukah derrière elle, le vieux lion étant trop vieux pour les suivre. Au moins, il avait retrouvé son fils et resterait avec lui jusqu'au jour où... Le cœur de Baradi se serra. L'idée que ce grand mâle meurt lui était difficile, elle préférait ne pas y penser. Tout s'était enchaîné si vite, elle avait du mal à réaliser que ce qu'elle vivait était bien réel. Elle était revenue à la Lande avec Nsaï, qui était devenu son compagnon au cours de ce voyage, tout se mélangeait dans son esprit. Ses péripéties défilèrent dans son esprit, elle se souvint de Freeland, de la hyène au Cimetière des Elephants, de l'Outlander, Chombi Hiki...

Baradi ouvrit grand les yeux. Chombo Hiki ! Le visage grave du lion à la crinière noire s'imposa à son esprit. Il cherchait son neveu, qui n'était autre que Jango, un ami d'enfance de la Mositus. Elle avait promis à l'Outlander qu'elle tâcherait de le retrouver et qu'elle le ramènerait dans le droit chemin, mais il ne s'était visiblement pas rendu sur Freeland. Elle avait espéré qu'il serait dans la Lande. Leur retour l'avait fait oublier cette quête mais à présent que cela lui revenait en tête, ses prunelles balayèrent les alentours. Se pouvait-il réellement que Jango fut ici ? La femelle se redressa et se mis à fureter, le museau en l'air, les yeux écarquillés. Il fallait qu'il soit ici ! Son instinct lui soufflait qu'elle avait vu juste. Après quelques minutes à avoir bousculé la moitié des habitants du Baobab, Baradi aperçu une robe sable, au milieu de tout ces pelages fauves. Elle poussa un petit cri et se jeta droit sur lui.

- Jango ! Jango c'est toi ?!

La dernière fois qu'elle l'avait vu il n'était qu'un enfant, avec une petite touffe de poil jaune sur le crâne. C'était un adulte à la crinière fournie qui se tenait là, mais elle reconnaissait sans mal son regard bleu. Elle ne s'était pas trompée. C'était bien lui. Elle s'arrêta devant le mâle, un immense sourire sur son visage.

- Par les Grands Esprits Jango, tu es là ! Je savais que tu serais là !

Baradi se demanda si son vieil ami la reconnaîtrait, après tout ce temps. Elle avait changé elle aussi, beaucoup grandit, mais la lueur qui brillait dans son regard était toujours la même.

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Lorsque le regard du jeune mâle croisa celui de la féline, elle su aussitôt qu'il l'avait reconnu. La scène était presque irréelle, Baradi avait l'impression de rêver. Elle s'était maintes et maintes fois demandé comment se déroulerait ses retrouvailles avec son vieil ami, s'il se souvenait d'elle, s'il serait content de la revoir. Visiblement il ne l'avait pas oublié, et sa joie se lisait sans mal sur son visage. La Mositus était soulagée, Jango était bien en vie et il s'était rendu sur la Lande, où il avait été en parfaite sécurité pendant tout ce temps. Chombo Hiki serait rassuré de l'apprendre.

- Baradi ! C'est toi ?! Vraiment toi ?!

Il couru vers elle et frotta son crâne contre celui de la femelle au pelage sombre. Cette dernier ria joyeusement devant son enthousiasme, puis le regarda avec attention. Il n'avait aucune plaie ni marque de blessure, il avait bien grandi et semblait avoir mangé à sa faim. Les habitants de la Lande avaient pris soin de lui. Il était du côté des Pridelanders, ce qui étonna un peu la Mositus. Dans quelle circonstances s'était-il allié à eux ? Les aléas des rencontres étaient toujours pleins de surprises, et Baradi avait hâte de savoir ce qui l'avait conduit jusque ici. Elle devait absolument lui dire que son oncle était très inquiet et qu'il devait retourner auprès de sa famille sur le champ. Elle ne voulait toutefois pas le brusquer, ils venaient à peine de se retrouver, et ils avaient beaucoup de chose à se dire. Jango fut le premier à reprendre la parole, la voix légèrement tremblante, comme s'il peinait à en croire ses yeux.

- Où étais-tu pendant tout ce temps ?! Qu'as-tu fait ? D'où tu reviens ? Ca fait plusieurs mois que j'suis ici et je t'avais pas encore trouvée, comment ça se fait ?

Cela faisait beaucoup d'information à donner, et Baradi ne pu s'empêcher de lâcher un petit rire. Sa manière de parler n'avait pas changé, il était toujours aussi vif que le lionceau qu'elle avait rencontré jadis. Evidemment, quelque chose dans son regard avait changé, il avait, lui aussi, du affronter des choses terribles. Baradi avait vu la guerre, l'exil de tout son clan, la perte de sa mère, mais elle avait toujours réussi à aller de l'avant, à croire en ses rêves. Son voyage lui avait montré que le monde n'était pas aussi idyllique que de qu'elle s'était représenté, beaucoup de clans avaient des problèmes, beaucoup de lions souffraient. Mais Baradi ne s'était pas laissé abattre et elle était rentrée auprès des siens, prête à les accompagner dans les quêtes qui restaient à venir. La Mositus allait répondre aux interrogations de son vieil ami lorsque ce dernier repris :

- Et comment t'es-tu sortie de l'assaut Jangowa sur l'Oasis ? Je croyais... Je croyais que tu y avais été tuée...

Des images défilèrent dans son esprit, la remplissant d'une multitude d'émotion. Elle se rappelait les cris d'alertes qui signalaient l'arrivée des Jangowas, les ordres qui fusaient, les enfants, dont elle faisait partie à l'époque, qui avaient du fuir de leur côté. La peur au ventre, elle avait pris la tête de ce groupe de lionceaux pour tenter de les sauver. Ils s'était aventuré dans le Désert, et ils y étaient tombé sur deux petites lionnes des sables, Suki et Niwata. Une vraie aventure... Ils avaient retrouvé leur parents un peu plus tard, en constatant que la guerre était finie, que les Mositus avaient perdu et devaient dorénavant s'exiler. Baradi avait également appris ce jour là que sa mère était morte. La féline tâcha de mettre sa peine de côté, et répondit, me regard légèrement voilé.

- Lorsque les Jangowas nous ont attaqué, les lionceaux ont été envoyé se cacher le plus loin possible du champ de bataille. J'ai donc pu éviter le massacre. J'ai retrouvé mon père et le reste du clan dans le Désert, alors qu'ils s'exilaient. Ma mère a péri pendant cette guerre. Puis nous sommes arrivés ici, plus ou moins au même moment que les Pridelanders, qui avaient eux aussi été chassé de leur terre.

Elle remis un peu d'ordre dans ses pensées. Il lui restait encore beaucoup de choses à raconter, le récit commençait seulement. Elle enchaîna donc, d'un ton un peu plus enthousiaste.

- J'ai terminé de grandir ici, puis je suis partie en voyage avec Nsaï, un ami de mon clan. C'était mon rêve, tu te souviens ? Nous avons du beaucoup de choses, traversé grand nombre d'endroits, et nous sommes revenus aujourd'hui même. Je viens d'apprendre que les Mositus s'étaient divisés, et qu'une partie de mon clan allait repartir à la guerre contre les Jangowas. Je n'en ferais pas parti. Je vais partir avec Siri, pour essayer de trouver un nouveau territoire où nous pourrons vivre en paix.

Voilà, elle avait plus ou moins résumé toute la situation actuelle. Elle savait, quant à elle, beaucoup plus de choses sur Jango depuis qu'elle avait rencontré Chombo Hiki. Elle avait appris que Valaka, la sœur de l'Outlander et mère de son ami, s'était rebellé contre l'Empereur en refusant de se battre contre les Mositus. Toute sa famille avait été exilé du Désert, et Jango aussi. Le jeune lion avait ensuite quitté sa famille lorsque Chombo Hiki était parti affronté son père, un Jangowas cruel et sans pitié. Baradi redressa la tête, et lança :

- Et toi alors ? Pourquoi te trouves-tu ici ? Je... J'ai rencontré ton oncle en me rendant sur Outland, il se fait beaucoup de soucis pour toi, et ta mère aussi. Pourquoi es-tu parti loin d'eux ?

Il n'y avait aucune agressivité dans sa voix, qui était toujours chargée de douceur. Elle essayait seulement de comprendre ce que son vieux camarade avait pu traverser, pendant qu'elle-même vivait ses propres aventures.

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Jango écouta le récit de la Mositus avec attention, une expression de tristesse passant sur son visage lorsqu'elle évoqua la mort de sa mère. Il lui exprima son soutien, puis la laissa continuer. Elle pu donc poursuivre son histoire, et lorsqu'elle arriva à la séparation du clan et à la volonté de Kawdja de reprendre l'Oasis, le lion des sables eu une nouvelle réaction, s'offusquant devant la folie de ce geste. Baradi était bien d'accord avec lui mais telle était la volonté de ceux qui l'avaient élus comme chef. La jeune lionne aux yeux verts ne pouvait rien faire à présent, elle n'avait pas le pouvoir de les empêcher de partir. Elle ne pouvait que prier que Vako fasse preuve de clémence et les laisse s'en aller ou peut-être, dans un fol espoir, qu'il accepte que les Mositus regagnent l'Oasis. Baradi n'y croyait guère. Lorsqu'elle avait parlé au jeune Empereur, ce dernier lui avait confié ses désirs de paix entre leur clan, mais également son incapacité à agir dans l'immédiat, à cause de la pression des Jangowas. Ces derniers n'étaient pas encore prêt à accepter une quelconque paix entre eux, la guerre était encore trop fraîche et l'assaut de Kwedja n'allait rien arranger. La lionne était découragée. Pourquoi fallait-il que les choses se passent ainsi ? Si seulement elle avait eu quelques mois de plus, peut-être aurait-il pu parler avec Vako, et espérer faire la paix entre leur clan...

Le visage du mâle aux prunelles bleues s'assombrit lorsqu'elle parla de Chombo Hiki et de sa famille. Il sembla hésiter un court instant, puis se lança, racontant enfin son histoire. Baradi l'écouta, son regard cherchant le sien, en quête de réponse. Il s'était enfuit, comme elle avait pu le deviner, il avait volontairement choisit de quitter les siens. Il était donc parti, sans les prévenir, s'envolant dans la nature lorsque Chombo Hiki était aller défier son géniteur. Jango évoqua la nostalgie que lui inspirait le désert, et la féline pouvait le comprendre. Elle aussi regrettait son Oasis, les arbres immenses, l'air doux et humide, le paysage vert et le feuillage épais... Il y avait également un côté hors du temps à l'Oasis, écarté du reste du monde. Baradi avait, durant toute son enfance, désiré partir en voyage pour découvrir le monde, persuadée d'être emprisonné dans l'Oasis. Elle réalisait à présent que l'Oasis avait été un paradis, mais un paradis perdu désormais. Un soupir s'échappa discrètement de sa gorge, alors qu'elle revoyait cet endroit qui avait bercé ses rêves d'enfance. Elle ne retrouverait plus jamais l'Oasis, mais elle pouvait espérer que son clan dénicherait un nouveau paradis, où ils n'auraient plus d'ennemi à craindre.

Elle laissa le mâle poursuivre son discours, sans l'interrompre, sentant une curieuse mélancolie la saisir. Baradi fit cependant un effort pour rester concentré, et laissa sa voix, à présent sombre, l'entraîner dans son récit. C'était donc écrasé par toutes incertitudes que Jango avait fuit, sans doute se cherchant d'avantage lui-même, refusant les actions de son oncle. Chombo Hiki avait vaincu, il avait réussi à tuer son père, et avait offert une vie plus paisible à sa famille. La Mositus ne connaissait pas les détails, mais elle savait que désormais, la sœur de l'Outlander était en sécurité, elle devait le lui dire. Même s'il ne voulait pas vivre avec un tueur, il devait au moins être au courant. Et, dans cette terre bouleversée par toute cette violence, quel lion pouvait se venter d'avoir les pattes propres ? Baradi refusait de salir les siennes, c'était pour cela qu'elle partait avec Siri et non avec Kwadja. Elle était une pacifiste, mais tout le monde ne partageait pas ses convictions. Les Pridelanders allaient bientôt livrer leur guerre, les Freelanders y prendraient sans doute part, ainsi que les Outlanders. Cette bataille allait mêler de nombreux clans, et tous auraient alors du sang sur le cœur et sur les pattes. De quel côté Jango allait-il se placer à ce moment là ? Prendrait part à ces conflits ou resterait-il ici à la Lande, seul ?

Non, là n'était pas sa place, Baradi en était sûre. Elle avait sentit le lien qui existait entre l'ancien Jangowas et son oncle, à travers les mots de ce dernier et son inquiétude qu'il dissimulait derrière un visage bougon. Jango confia que sa famille manquait, mais qu'il était réticent à l'idée de retourner vivre avec eux. La Mositus le laissa finir, et quelques secondes s'écoulèrent alors qu'elle cherchait ses mots. Elle le regarda droit dans les yeux, et lui lança, d'une voix plus adulte que jamais, preuve réelle que son voyage l'avait changé à jamais.

- Jango, ta place n'est pas ici à errer loin de ceux qui t'aime. Ils t'attendent, ils veulent te revoir. Chombo Hiki a réussi à vaincre son père, et même si un meurtre reste un meurtre, n'oublie pas qu'il l'a fait pour vous, pour vous protéger toi et tes parents. Je sais que ça ne diminue pas son crime, mais ton oncle n'est pas un assassin froid et sanguinaire, j'en suis sûr. Je l'ai rencontré, et alors que nous étions des intrus sur son territoire, il nous a aidé. C'est quelqu'un de bien.

Elle n'avait pas eu l'occasion de passer beaucoup de temps avec l'Outlander, mais elle avait sentit cela en lui, et elle se fiait toujours à son instinct. Elle n'était pas en droit de dire à Jango comment vivre sa vie, mais elle avait promis à Chombo Hiki de retrouver son neveu et de tout faire pour qu'il revienne auprès des siens. Elle était elle-même persuadée que pour le bien du lion, il devait les retrouver, même si cela signifiait qu'elle ne le reverrait sans doute plus jamais, ce qui l'attristait bien évidemment alors qu'ils venaient juste de se retrouver après toutes ces années.

- Tu ne peux pas fuir ton passé, pas éternellement. Ce passé fait aussi ce que tu es, il est inscrit en toi et même en partant loin de la Terre des Lions, tu ne pourras pas le nier. Pour grandir, pour devenir plus fort, tu dois affronter ton passé, le regarder droit dans les yeux et l'accepter. Ton oncle a eu besoin de cela lui aussi, c'est pour cela qu'il a voulu combattre son père. Une vie heureuse t'attend auprès d'eux, tu n'as pas besoin du Désert. Ce que tu aimais dans ces dunes, tu le trouveras dans le regard de ceux que tu aime.

C'était également ce qu'elle se disait lorsqu'elle pensait à l'Oasis et à sa famille. Certes, la terre de son enfance lui manquait mais il lui restait le plus important : les siens. Sa mère avait péri, mais elle avait encore son père, ses amis, Nsaï bien sûr, son clan tout entier. C'était dans leurs yeux qu'elle revoyait son Oasis et la joie qu'elle y avait ressenti, dans les souvenirs qu'elle partageait avec chacun.

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Malgré les paroles pleine de sagesse de la féline, l'ancien Jangowas ne semblait pas avoir changé d'avis. Une multitude de doutes passaient néanmoins sur son visage, accompagnés d'inquiétudes et de questionnements. Baradi savait que son ami n'était pas dans une situation aisée, un grand dilemme s'opposait à lui, qui espérait sans douter trouver la paix loin de sa famille. La Mositus pouvait comprendre ce besoin, mais à ses yeux, la place du jeune mâle était auprès de ceux qui l'aimaient. Il ne pourrait jamais être pleinement heureux en songeant que sa famille était peut-être en danger, malheureuse. Il aurait constamment l'esprit dans ses souvenirs, à se demander s'il avait pris la bonne décision. C'était cela qui avait poussé la femelle à partir à l'aventure : pour éviter les regrets. Elle s'en serait voulu de renoncer à son rêve alors qu'elle avait justement l'occasion de l'accomplir. Elle était cependant tellement heureuse de retrouver son père et tout le reste de son clan, elle comprenait enfin où était sa véritable place. Jango allait devoir mener cette réflexion à son tour, et lui seul avait la réponse. L'émotion faisant légèrement trembler sa voix, le lion répondit, entamant un sombre récit sur son oncle. Baradi avait compris que l'Outlander n'avait pas eu une vie facile, mais elle était loin de se douter des horreurs qu'il avait vécu, et du monstre qu'il avait été, jadis. Cela ne ressemblait pas au lin qu'elle avait rencontré, qui malgré un comportement surprenant, les avait aidé.

La féline écouta son interlocuteur jusqu'au bout sans oser l'interrompre, sentant qu'il faisait des efforts pour contenir l'émotion que lui inspirait cette histoire. Elle ne pouvait bien sûr pas comprendre la peur que lui inspirait un membre de sa famille, ses parents avaient toujours représenté la sécurité et la sagesse pour elle. Lorsque sa mère était partie, elle l'avait pleuré, éprouvant un chagrin immense, mais Chezo l'avait aidé à surmonter cette épreuve, ainsi que Lukah et Nsaï. Son père et ses amis avaient été là pour elle, tout comme elle espérait être là pour eux lorsque le moment serait venu. Jango acheva son récit, rappelant que Chombo avait perdu la lionne qu'il aimait, chose que Baradi ignorait, puisqu'elle ne connaissait pas la totalité de l'histoire de l'Outlander, puis plongea son regard dans les prunelles de jade de la féline. Cette dernière ne baissa pas la tête, affrontant ses yeux dont le bleu parfait lui rappela des souvenirs. Elle le revoyait, enfant, si joyeux et vif, des années en arrière. Où était parti ce temps d’insouciance ? Baradi, refusant de s'avouer vaincu, répondit, sans se départir de son calme.

- Ton oncle a commis des erreurs par le passé, tout comme nous en commettons tous. Cela n'enlève rien à la sauvagerie de ses actes, mais il a changé. Je n'ai pas vu en lui un être instable. Et même si cela est le cas... Ne devrais-tu pas être auprès de tes parents pour les aider ? Pourras-tu réellement vivre en te demandant perpétuellement si ta famille va bien ? Si tu décide de leur tourner le dos, tu le regretteras à jamais. Tu ignore comment ils vont, tu ne sais même pas s'ils sont toujours sur Outland comme des intrus ou comme des Outlanders. Les choses ont sans doute changé depuis ton départ, je ne pense pas que Chombo espérait les cacher éternellement.

Il ne s'agissait là que de suppositions, mais Baradi pouvait aisément imaginer que le mâle allait essayé de faire intégrer le clan à sa sœur et à son beau frère. Avec les temps de guerre qui approchait, Massempo ne dirait sans doute pas non à de potentiels guerriers, la réputation des Jangowas pourrait leur servir. Après un léger temps d'hésitation, la femelle ajouta :

- Je ne peux pas te donner d'ordre Jango, tu es le seul maître de ton destin. Mais je n'ai qu'un conseil à te donner : retrouve ta famille. Vas sur Outland, et essaye au moins de savoir ce qu'ils deviennent. Tu pourras toujours repartir, mais ne reste pas l'incertitude. Tes parents sont tout ce qu'ils te restent, compte-tu vraiment les rayer à jamais de ta vie ?

La Mositus pencha la tête en avant, espérant que ses paroles feraient réfléchir le jeune mâle. Elle se doutait qu'il ne changerait pas d'avis aussi rapidement, mais elle ne pouvait le forcer à retourner sur Outland s'il n'en avait pas envie. Elle se contentait donc de le conseiller du mieux qu'elle le pouvait, en priant pour que la bonne solution lui apparaisse finalement.

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En voyant la peine et l'inquiétude se dessiner sur ses traits, Baradi s'en voulu d'avoir user de cet argument. Elle savait que Jango pensait à sa famille, et qu'il se souciait d'eux, il avait simplement besoin de le réaliser, d'aller au delà de ses peurs. Il aurait sans doute de belles surprises en les retrouvant, plus grandes encore que ce que la Mositus pouvait s'imaginer. Elle était en effet loin de se douter, et Jango aussi, que la mère de l'ancien Jangowas avait donné naissance à un nouveau lionceau, et que Chombo Hiki ne tarderait pas non plus à être père. Tout cela, il le découvrirait en retournant à Outland.

- Je… Tu as raison…

Une larme solitaire coula sur la joue du félin couleur de sable, fendant le cœur de la lionne brune. Il n'était pas dans une situation facile, elle le savait. Après toutes ces années sans se voir, voilà qu'ils se retrouvaient au milieu de l'incertitude et du doute. Baradi et les siens ne traversaient pas non plus une époque simple, le clan était déchiré et l'avenir était recouvert de brume. La Mositus aurait aimé revenir en arrière, redevenir une enfant, avant la guerre, avant que tout n'éclate. En d'autres circonstances, elle aurait proposé à Jango de venir avec elle, de partie explorer de nouveaux territoires, comme ils se l'étaient promis étant enfant. Mais Jango devait retrouver sa famille, Baradi le savait et lui aussi. Peut-être un jour, lorsque les Mositus auraient un endroit où vivre paisiblement, lorsque Jango aurait l'esprit plus clair... Peut-être pourraient-ils vivre l'aventure qu'ils avaient imaginé.

- Je vais avoir besoin de temps, pour y réfléchir… Et toi ? Pendant ce temps ? Que vas-tu faire ?

La femelle repensa à ce que Siri et les autres lui avaient expliqué. Leur départ était pour bientôt, ils allaient quitter le Baobab et chercher un endroit où s'installer, un endroit où ils pourraient vivre en paix. Kwadja avait fait le choix de la guerre, et Baradi savait au fond d'elle qu'elle prenait la mauvaise décision. Elle ne prendrait pas part à ce massacre. Moka était morte à cause de la guerre, Baradi ne voulait plus perdre personne. Son père et Nsaï suivraient Siri, avec elle, et ils seraient tous en sécurité. Du moins, c'était ce qu'elle espérait. Elle n'avait aucune certitude quant à l'avenir, peut-être leur guide les menait-il vers des dangers bien plus grand. Mais tant qu'ils ne l'auraient pas vu de leurs yeux, ils ne pourraient en être sûrs. Ils avaient besoin d'une terre où s'établir, où reconstruire leur vie. C'était le plus important.

- Eh bien, je vais partir. Je rentre tout juste de voyage, mais je dois déjà m'en aller. Nous n'avons plus de territoire, et nous ne pouvons pas rester au Baobab indéfiniment. Siri veut aller explorer Apeland, il pense que nous y trouverons un endroit propice où nous installer. J'ignore où tout cela nous mènera, mais nous n'avons pas le choix. Partir à la reconquête de l'Oasis ne me semble pas une bonne idée, nous avons eu notre lot de guerre. Je veux pouvoir vivre en paix maintenant, offrir un meilleur futur pour les générations à venir.

Il était étrange pour elle de penser à tout cela de cette manière à présent. Elle et Nsaï formaient un couple à présent, et peut-être pouvaient-ils envisager d'avoir des petits, un jour. Cette idée, qui ne l'avait jamais effleuré auparavant, lui apparaissait désormais clairement. Lorsque le clan aurait un endroit paisible où vivre, elle donnerait la vie à son tour. Mais pour l'heure, l'objectif principal était de trouver cet endroit paisible auquel ils rêvaient tous.

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Le regard du jeune mâle se perdit un instant dans le vague. Imaginait-il à quoi sa vie pourrait ressembler une fois qu'il serait revenu à Outland ? Ou se questionnait-il quant au futur encore trouble des Mositus ? Baradi était partagée, plusieurs émotions se disputaient dans son cœur. Elle venait de rentrer d'un long périple, elle aurait aimé se reposer auprès des siens mais un nouveau voyage l'attendait déjà. Elle était curieuse et excitée à l'idée de partir explorer un territoire encore inconnu, inquiète également car elle n'avait aucune idée de ce qui l'attendait. Elle était heureuse d'avoir retrouver Jango après tout ce temps mais consciente que leurs retrouvailles ne pourraient pas durer. Une fois de plus, le destin les séparait. Pourquoi sa joie devait-elle toujours se teinter de peine ? Avait-elle le droit d'être pleinement heureuse, sans qu'une ombre ne se profile à l'horizon ? Les temps paisibles de l'innocence étaient loin désormais, ils remontaient à une éternité. Son enfance était restée à l'Oasis, alors qu'elle n'avait qu'à ouvrir les yeux le matin pour vivre sans crainte.

- Dans ce cas, j'imagine que je dois te souhaiter un bon voyage, en espérant que vous trouverez ce que vous cherchez...

La féline esquissa un sourire et hocha doucement la tête. Elle priait aussi que leurs recherches ne soient pas vaines. Ils n'étaient plus qu'une moitié de clan, mais ils avaient des enfants avec eux, des vieillards affaiblis, des adolescents encore nerveux. S'ils devaient errer pendant des mois, certains perdraient sans doute la vie sans avoir atteint un nouveau territoire. Baradi pensa alors à Lukah, et son regard s'assombrit. Son vieil ami allait rester ici, près de Prideland. Il avait retrouvé son fils, et se considérait trop âgé pour entreprendre un tel voyage. Il avait beaucoup fait pour le clan, personne ne pouvait lui reprocher de vouloir mourir auprès de la seule famille qui lui restait. La jeune Mositus espérait qu'il serait heureux lors de ces derniers instants, et qu'il n'avait aucun regret. Il avait eu une longue et belle vie, après tout. Baradi chassa ces pensées de son esprit, et leva les yeux vers Jango. La peine qu'elle lu dans son regard l'étonna soudain. Repensait-il à sa famille ? Avait-elle dit quelque chose de mal ?

- Est-ce que...ça veut dire qu'on ne verra plus ?

Ses paroles frappèrent comme une gifle dans l'esprit de la lionne. Pendant un instant, elle revit Jango tel qu'il avait été, longtemps en arrière : un petit lionceau plein de rêves. Leur rencontre lui revint en mémoire, les premiers mots qu'ils s'étaient prononcés. Puis les derniers, leur promesse de partir explorer le monde ensemble. Et voilà qu'ils en étaient là à présent, à devoir partir, chacun de leur côté. Apeland était une terre lointaine, très éloignée d'Outland. Si les Mositus s'installaient là bas, Baradi n'aurait sans doute pas le temps de revenir voir son ami. Et si Jango retournait définitivement auprès de sa famille, il en serait de même pour lui. Le cœur de la féline brune se serra. A quoi aurait ressemblé leur avenir si les Jangowas n'avaient pas attaqué l'Oasis, lorsqu'ils étaient enfants ? Baradi serait-elle partie en voyage avec Lukah ? Jango se serait-il joint à eux ? Elle pouvait imaginer cet avenir fantasmé, mais les Grands Esprits en avaient décidé autrement. La gorge nouée, la Mositus baissa les yeux, tentant de dissimuler la peine qui l'envahissait. Elle releva la tête et chercha une réponse dans les prunelles de l'adolescent, comme si le futur pouvait se lire dans le bleu de son regard. Elle n'y vit que le reflet de son propre chagrin et de son incertitude.

- Je... Je l'ignore.

Ils ne pourraient sans doute jamais tenir leur promesse, pourtant Baradi se mis à rêver. Elle songea à arrêter le temps et à partir aussitôt, sans un regard en arrière, pour affronter de nouvelles aventures avec Jango. Cette douce rêverie ne dura qu'un instant, car la jeune lionne se souvint que son père avait besoin d'elle, que Nsaï avait besoin d'elle, et qu'elle ne pouvait pas tourner le dos aux siens. Malgré tout ce qu'elle avait pu imaginer étant enfant, elle était une Mositus, son clan comptait bien trop à ses yeux pour qu'elle puisse l'abandonner.

- Je ne peux prédire de quoi l'avenir sera fait. Si les Grands Esprits le veulent, alors peut-être nos routes se croiseront à nouveau. Elle marqua une pause, et repris. Tu m'as beaucoup manqué Jango. Quoi qu'il arrive, tu resteras toujours dans mon cœur, mon ami.

Prenant sur elle pour mettre sa propre tristesse de côté, Baradi esquissa un sourire, faible mais chargé de tendresse. Non, jamais elle n'oublierait Jango, ce petit lionceau si joyeux avec qui elle avait voulu voyager, et qui était aujourd'hui un grand lion prêt à faire face à sa destiné. Ils avaient grandi, ils avaient changé, mais au fond de leur cœur, ils étaient restés les mêmes. Au fond de leur cœur, leur amitié avait persisté.

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La peine que Baradi lu dans les yeux de son ami d'enfance raviva la sienne. Pourraient-ils un jour se retrouver ? La jeune lionne n'avait pas pu répondre à cette question quelque instant auparavant, et peut-être n'aurait-elle jamais de réponse à donner. Elle confiait son destin entre les pattes des Grands Esprits, leur volonté était toujours faite, il en allait ainsi depuis toujours. Pourtant au milieu du chagrin qui luisait dans les prunelles de Jango, la Mositus vit aussi de l'amertume. Mettait-il en doute la force des Grands Esprits ? En cet instant, Baradi se rendit compte qu'elle ne savait presque rien de l'ancien Jangowas. En quoi croyait-il ? Quels étaient ses rêves, ses aspirations ? Avait-il quelqu'un dans sa vie ? Aimait-il se promener le soir pour regarder les étoiles ou préférait-il la chaleur du jour ? Était-il bon combattant ou chasseur aguerri ? Elle ignorait pratiquement tout du lion qu'il était devenu en quittant l'enfance et sans doute ne saurait-elle jamais rien de lui, s'ils se quittaient aujourd'hui et ne se revoyaient plus jamais. Cette perspective était peut-être encore plus difficile à accepter vue sous cet angle.

- Tu m'as beaucoup manquée aussi... Si...si un jour, je peux me permettre d'entreprendre un long voyage, alors je te rendrai visite, je te le promets...

Elle le croyait, elle savait que s'il en avait le pouvoir, il viendrait la voir. Elle aurait aimer pouvoir lui promettre la même chose, mais son clan avait tant besoin d'elle qu'il était pour l'heure impensable de les quitter. Ils avaient des choses à reconstruire, un territoire à trouver, des familles à protéger. Qui pouvait bien savoir combien de temps ils erreraient sans avoir de maison ? Les Grands Esprits allaient les guider, mais le voyage pourrait bien s'avérer être long. Une fois encore, Baradi choisissait de leur faire confiance et de suivre aveuglément Siri dans cette dangereuse quête, qui lui paraissait bien plus saine que celle de Kwadja. Il y avait eu suffisamment de guerre sur la Terre des Lions, l'heure était à la paix, pour les Mositus du moins.

- C'est bizarre...depuis que je suis ici, j'ai rencontré quelques personnes, notamment une lionceau Pridelander. Elle me fait penser à nous, étant enfants. Et comme toi, elle veut impérativement que je retourne auprès des miens, au point qu'elle a voulu m'y emmener elle-même malgré son âge et la difficulté du voyage. Peut-être que...je vais attendre qu'elle grandisse un peu pour m'y ramener, comme ça elle tiendra sa promesse de m'y traîner elle-même.

La lionne esquissa un sourire. Au moins, son ami n'était pas seul. Il semblait savoir s'y prendre avec les enfants, et Baradi n'était pas étonné qu'il ait fait la connaissance d'une petite féline prête à le ramener chez lui. Il était sans doute effectivement plus prudent de se rendre sur Outland accompagné, mais cela voulait également dire qu'il était prêt à entraîner cette Pridelander dans cette aventure dangereuse. Baradi pouvait-elle réellement le lui reprocher ? Elle était partie découvrir le monde elle aussi après tout, et Outland avait fait parti de ses destinations. Elle était désormais soulagée d'y avoir rencontré Chombo Hiki, ce dernier leur avait non seulement permis de passer, mais lui avait appris beaucoup de chose notamment sur Jango. Lorsqu'elle redressa la tête, la Mositus constata que les yeux du lion clair étaient remplis de larmes, tandis que son regard était posé sur elle. Ainsi... Il était également l'heure des adieux.

- Cela dit...je m'en voudrai de te retenir... Au revoir Baradi, prends soin de toi. Tu vas me manquer...

Une fois encore, le cœur de la lionne se serra. Lorsqu'elle avait quitté le désert, deux ans en arrière, elle avait dit adieu à beaucoup de choses, à des amis, à un mode de vie, à une terre. Elle avait espéré ne plus connaître pareil déchirement, mais les Grands Esprits en avaient décidé autrement. Son destin l'appelait, elle ne pouvait lui tourner le dos malgré son envie de rester avec son ami pour vivre de nouvelles aventures. Elle frotta son museau contre la joue du mâle, combattant ardemment les larmes qui menaçaient de jaillir de ses yeux. Elle ne voulait pas rendre les choses plus difficiles qu'elles ne l'étaient déjà. Elle le regarda et songea que s'il prenait les bonnes décisions, il deviendrait quelqu'un d'incroyable, elle en était persuadée. Elle espérait qu'il suivrait son cœur, qu'il retrouverait les siens, qu'il trouverait sa place en ce vaste monde.

- Au revoir Jango. Sois fort, ne tourne pas le dos à ceux que tu aimes et n'oublie pas d'être heureux. Que ta vie soit longue et belle.

La féline lui donna un coup de langue sur l'oreille en signe d'adieu, et le regarda s'éloigner, une boule dans le ventre. Baradi resta plusieurs instants à l'observer s'en aller, les pattes engourdies et le cœur douloureux. Elle avait néanmoins bien des choses à faire pour préparer leur voyage, qui commencerait dès le lendemain. Il lui fallu encore de longues minutes avant que son esprit embrumé ne se détache de son ami. Elle ne l'oublierait jamais, elle lui en avait fait la promesse.

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