Si le désert était comme un buffet à ciel ouvert il était cependant beaucoup trop grand et par conséquent il était assez difficile de mettre les serres sur quelque chose à se mettre sous le bec, sans se perdre ou se déshydrater. Ce pourquoi, le champ de roche était l'endroit parfait pour trouver de la charogne. Les cadavres de pauvres maladroit gisait çà et là dans le labyrinthe rocheux et peu de charognard s'y aventurait par peur de se retrouver coincer face à plus gros qu'eux. Un accident était si vite arrivé dans le coin.
Kaho s'attarda sur la carcasse encore presque fraiche de ce qui avait été une petite antilope. Certes, à diverses endroits l'animal semblait percé par les vers ce qui n'empêchait pas le jeune oiseau de trouver ce mets assez appétissant. Finit de tournoyer comme un vautour affamé, il perdit de l'altitude et vint se poser non sans mal à quelques mètres de son futur repas. Penaud, il s'approcha de sa charogne en s'avançant avec toute la grâce d'une dinde sur le chemin rocailleux, volant parfois d'un promontoire à l'autre pour avancer plus rapidement.

Ses prunelles réduisent de taille au point de n'être que deux points rouges. Bientôt ses plumes se dressèrent de l'arrière de sa tête jusqu'en bas de sa nuque et son regard se planta sur la puissante silhouette d'un lion. Tout de suite sur la défensive, le jeune oiseau était tout sauf rassuré, il n'était clairement pas en position de force: Les vents ici étaient peu favorable et avaient vite fait de vous envoyer valdinguer sur les roches finement aiguisées.

▂ SKRRRIIIHIIIIII! Hurla t-il a l'égard de l'inconnu, se voulant menaçant. Mais aux yeux du lion il ne devait être rien de plus qu'une pauvre autruche apeuré. On aurait presque pût l'entendre feuler.

Au cours d'une journée bien avancée, Hatari déambulait comme son habitude. Seul, comme toujours. Oh bien sur, il aurait pu accompagner les autres lions à la chasse, ou même rester près du Clan, mais son désir de liberté - trop entravé à son goût - prenait toujours le dessus. De plus, au fur et à mesure du temps, ses déambulations avaient donné à son corps une musculature plus développée, et depuis qu'il s'en était rendu compte, il intensifiait ses sorties, allant parfois jusqu'à courir rien que pour échauffer ses muscles.

En cette chaude journée, donc, le jeune mâle marchait souplement dans le labyrinthe qu'était le champs rocheux, où des falaises s'élevaient de part et d'autre. Son odorat affiné détecta bientôt une odeur courante. Celle d'une charogne. Une vieille carcasse que le prédateur n'avait pas pris le temps de terminer, ou bien de remmener. Lui, en tant que membre d'un Clan - et aussi parce que Kifua l'y obligeait - ne laissait jamais de proies pourrir. Mais tous n'étaient pas comme lui.

Il avisa alors un gros oiseau non loin de la charogne. Et un sourire se dessina sur ses babines, en même temps qu'une idée vicieuse germait dans son esprit. Il était seul, alors pourquoi ne pas s'amuser un peu ? Prenant son élan, il s'élança en direction du gypaete barbu, comme s'il désirait l'attraper. Comme un prédateur prend sa proie en chasse.

Voilà que l'autre se mit à charger. Bientôt le sentiment de peur se mêla à l’excitation d'un affrontement imminent. L'oiseau ouvrit grand les deux voiles de plumes qui lui servaient d'ailes et gonfla ses poumons d'air avant de hurler une nouvelle fois son désagréable cris strident à la face de l'autre. Il virevolta, détachant à peine les pattes du sol et laissa glisser ses serres contre les rochers alentours dans un atroce grincement. C'était aussi agréable que le bruit qu'un clou produirait en rayant un tableau noir.
Voulant se faire toujours plus gros, toujours plus imposant, il fit se dresser toutes les plumes de son corps, ayant l'air d'un oiseau décoiffé par un bourrasque. Comme deux dagues, ses yeux rouges s'étaient plantés sur le lion de couleur sable. Ce dernier semblait prendre ça pour un jeu, mais c'était loin d'être le cas de Vulture qui, se sentant réellement menacé, pointait les serres vers l'avant, prés à les enfoncer dans de la chaire s'il le fallait.

▂ Viens que j'te racle la face! Cria t-il, aussi menaçant qu'un oiseau pouvait l'être. Son gabarit était loin d'être assez imposant pour lutter avec un lion adulte, mais néanmoins il savait en découdre et comme sa cicatrice en témoignait ce n'était pas la première fois que Kaho se dressait face à un lion. Un gypaète était un oiseau fier, pas l'un de ces ridicules vautours africains.

Tandis qu'Hatari faisait semblant de charger, l'oiseau s'agita, se mettant à pousser son cri strident, et faisant grincer ses affreuses serres contre les rocher. Evidemment, c'était assez désagréable, mais pas vraiment dangereux. Pourtant, c'était là d'un véritable avertissement qu'il s'agissait.

▂ Viens que j'te racle la face!

Les plumes ébouriffées et le regard perçant, le gypaète semblait prêt à en découdre. Mais ce n'était pas là le but du jeune Jangowa, et il ralentit la cadence jusqu'à retrouver un pas souple et cadencé, se dirigeant tranquillement vers l'oiseau. A proximité de celui-ci, il laissa échapper un petit rire moqueur, et la mimique qui couvrit son visage en disait long sur ce qu'il pensait de l'oiseau. D'une voix narquoise, il déclara :

▬ Et ça se pense effrayant. On dirait un gros dindon qui s'agite.

Comme présentation, il y avait plus charmant, mais ce n'était surement pas cette grande poule aux cris stridents qui allait lui faire la leçon. Car au fond, Hatari était sur que le gypaète savait que, même s'il restait dangereux, il ne gagnerait pas contre le mâle Jangowa.